mardi 12 juillet 2022

Emma

 


Je n'avais pas lu de roman de Jane Austen depuis longtemps, une des thématique du Mois anglais 2022 concernait cette autrice, ni une ni deux j'ai ouvert « Emma » et ce pour mon plus grand bonheur.

« Emma » relate l'histoire d'une jeune héritière qui entre tentation du célibat et envie de devenir une marieuse avisée se rend compte que tout n'est pas aussi simple que cela. On retrouve les thèmes récurrents de Jane Austen abordés de manière différente puisque l'héroïne, que son père adore, n'a pas besoin d'absolument de se marier pour conserver son héritage. Emma se délecte du rôle d'entremetteuse qu'elle s'est allouée pour faire et défaire les couples dans le village d'Hightbury. Quoi de plus distrayant que d'arranger rencontres et naissance de sentiments amoureux pour une jeune fille oisive ?

Emma est, dit-on, une des héroïnes les plus complexes créées par Jane Austen ce que je veux bien croire l'issue de ma lecture.

Emma Woodhouse est adorable et agaçante quand elle fonce, tête baissée, pour faire le bonheur des autres malgré eux, sans s'attarder à connaître leurs envies ce qui la rend un peu caricaturale. Sans compter que sa position sociale et sa joliesse font d'elle une jeune personne, loin d'avoir bonté, mesure et clairvoyance comme les habituelles héroïnes d'Austen, qui n'en fait qu'à sa tête, qui n'écoute personne et qui apparaît vaine et maladroite. Elle possède une assurance frisant l'autosatisfaction ce qui peut la rendre blessante envers les dames plus pauvres qu'elle.

Cependant, à sa décharge, elle affirme son indépendance, elle n'a cure de trouver un bon parti, avec conviction et maladresse. « Je n'ai aucune raison que les femmes ont normalement de se marier » assurant par là préférer le célibat à un mariage sans amour. Elle enfonce le clou en expliquant «Je ne crois pas que beaucoup de femmes mariées aient autant d'autorité dans la maison de leur mari que j'en ai, moi, à Hartfield. Et jamais, jamais vous m'entendez, jamais je ne pourrai espérer être aussi sincèrement aimée ni avoir autant d'importance aux yeux d'un autre homme que mon père. » Sauf que...elle sera prise à son propre piège.

Pour en revenir à son affirmation, Emma énonce un principe qui sera repris, plus tard par les féministes, celui de l'indépendance financière première condition de l'émancipation des femmes. Elle exprime également un certain pouvoir féminin, celui de ne pas se laisser dicter sa conduite par les hommes. En cela elle a un avantage : son père est en adoration devant elle et accède à tous ses caprices. D'un côté, elle supporte les humeurs hypocondriaques de son père.

Ce qui rend Emma différentes des héroïnes austeniennes c'est que malgré son incurable snobisme, son bavardage intempestif, son insensibilité envers le remue-ménage provoqué par ses lubies d'entremetteuse, cela ne relève pas d'une volonté perverse et calculatrice car Emma, sans être empathique, a bon cœur : elle sait se montrer souvent généreuse et accepte d'ouvrir les yeux sur ses erreurs et d'y remédier.

Emma agace, énerve au point que lorsqu'elle comprend de qui elle est amoureuse j'ai eu une réaction jubilatoire en constatant qu'elle devait se donner la peine d'être à l'écoute pour ne pas perdre son soupirant. Pourtant, tout au long du roman je n'ai jamais pu la détester car au final je l'ai bien aimée. Je n'ai pas insisté sur les personnages gravitant autour d'Emma, ils sont savoureux et à la hauteur de leur rôle. Chacun a sa place et permet d'éclairer le personnage d'Emma. C'est ce qui rend, à mon sens, le roman très réussi et très abouti.


« Emma » fut une lecture jubilatoire et délectable car l'histoire est servie, avec art, par la plume délicieusement ironique de Jane Austen qui accompagne le récit avec son humour et les piques glissées dans les répliques des personnages principaux et secondaires. Le tout servi par les superbes descriptions de la campagne anglaise du XIXè siècle.


NB : le film « Emma », paru en 2020, est excellent et ne gâche en rien le roman.


Traduit de l'anglais par François Laroque


Quelques avis :

Babelio  Jane Austen  A la lettre  Sens critique

Lu dans le cadre




3 commentaires:

rachel a dit…

Oh ce n'est pas mon JA favori....bien qu'il est son charme...il est vrai

Katell a dit…

J'ai vraiment apprécié ce roman et cette héroïne, Emma, plus complexe qu'elle n'en a l'air.
Ce fut un vrai beau moment de lecture.

rachel a dit…

Oups...qu'il ait son charme....oui faudrait que je le relise....;)