samedi 31 octobre 2009

Glanage de saison

Dès que le soleil ira se coucher, des lutins déguisés viendront sonner aux portes des maisons....frissons garantis si les occupants ne sont pas munis de friandises et autres douceurs sucrées!
En attendant, Chatperlipopette, en balade sur le web, a trouvé une bien jolie photo pour illustrer ce jour d'Halloween:
Joyeux Halloween


Héhéhéhé, je savais que vous alliez être terrorisé à la vue de ce chat en pleine méditation halloweenesque!

vendredi 30 octobre 2009

La culture sur le web


(photo trouvée sur le web, auteur Raoul Trifan, album flick.fr)

Cet après-midi, dans ma boîte à courriels, j'ai trouvé un message m'invitant à cliquer sur quelques liens: ce sont des entrevues d'auteurs réalisés à la BNF. J'ai visualisé la première partie de l'émission littéraire "Interlignes" consacrée à Laurent Mauvignier.


"Interlignes" donne la parole aux "écrivains susceptibles de remporter un prix littéraire cette année."

"Animée par Dominique Antoine, Intrelignes prend le temps (4 épisodes par auteur) d'approcher, de découvrir et de décrypter l'écriture et le travail d'écriture de chacun des auteurs invités."

J'ai trouvé ce concept très intéressant, l'ambiance intimiste, on a l'impression d'être aux côtés des auteurs et surtout, je me suis régalée à écouter Laurent Mauvignier!

"Jusqu'ici ont participé : Patrick Besson, Dany Laferrière, Laurent Mauvignier et Frédéric Beigbeder. Au programme dans les prochaines semaines : Marie N'Diaye et David Foenkinos le 31 octobre. Yannick Haenel et Bruno Tessarech le 7 novembre. Simon Liberati et Clémence Boulouque le 14 novembre. Daniel Picouly le 21 novembre."


Merci Camille Jung pour ce courriel qui ayant piqué ma curiosité m'a emportée dans un charmant sillage!

jeudi 29 octobre 2009

La vengeance est un plat qui se mange froid



Lincoln Perry est un ancien flic devenu détective privé: suite à un accrochage sérieux avec l'homme qui fut son rival, LP dut quitter la police. Alors qu'il s'occupe sans histoire de son agence, qu'il attend que son associé se remette de ses blessures, son ex-fiancée l'appelle pour lui demander de retrouver Matthew, le fils de son défunt mari. En effet, ce dernier, Alex Jefferson, a été retrouvé assassiné et laisse un héritage conséquent à son fils. Lincoln Perry ne sait pas encore qu'en acceptant d'aider son ex, il va s'embourber dans un chemin des plus douteux: il devient très vite le suspect numéro 1, d'autant que tout concorde à l'accuser malgré toutes ses dénégations!
Commence alors une dangereuse partie gendarme et voleur où la corruption, les mensonges et les dissimulations mènent la danse. Qui se cache derrière le tueur, ce boucher tortionnaire qui se repait de la longue souffrance de ses victimes? Quelle vengeance lui dicte ses actes cruels? De révélations en sordides mensonges, se déroule une enquête en eaux troubles dans lesquelles nagent les prédateurs manipulateurs et leurs poissons pilotes manipulés; eaux marécageuses où les détenteurs du pouvoir de l'argent n'ont que faire des vies des plus démunis qu'ils détruisent sans ciller.
"Une tombe accueillante" est un roman noir, un thriller rondement mené, au suspense bien construit, à l'écriture suffisamment efficace pour tenir en haleine le lecteur malgré les ficelles du genre rapidement décelées. La psychologie des personnages a juste ce qu'il faut de profondeur pour les rendre crédibles, cependant elle ne parvient pas à masquer le côté irritant du héros, privé au grand coeur, désabusé mais encore un peu idéaliste, jouant sur la corde usée des poncifs du genre. Bien entendu il y a le flic collant, celui qui ne voit pas que le héros est innocent et qui le charge dès qu'il le peut; bien sûr il y a l'ex qu'il n'a pas rayée de ses souvenirs et la future petite amie qui se cache derrière une bonne camaraderie; certes il y a l'associé à la fidélité indéfectible et au regard extérieur de la raison; il y a tous les ingrédients pour que la mayonnaise prenne mais, car il y a une réserve, le lecteur ressent comme une insatisfaction à l'issue de sa lecture....il passe un bon moment mais sans plus. J'aurai aimé un peu plus de chemins tortueux, de méchanceté, de personnalités cauteleuses et moins de stéréotypes. Même si la lecture du roman est fluide, s'écoule avec l'envie de savoir comment cela se termine, l'histoire est loin d'être aussi sombre que je ne l'espérais....le politiquement correct serait-il un peu trop de mise? Bref, Lincoln Perry est loin d'être un personnage à la hauteur d'un Harry Bosh ou d'un Philip Marlowe!

Roman traduit de l'anglais (USA) par Mireille Vignol






Merci à Nanou qui m'a gentiment prêté ce roman.

Les avis de vent sombre keisha nanou

mercredi 28 octobre 2009

Le pousse-pousse, c'est toute sa vie



Le Veinard est tireur de pousse à Pékin; il est intègre, sobre, dur au labeur et n'a qu'un seul objectif en tête: économiser assez de yuan pour acquérir son propre pousse et devenir ainsi son propre patron! Le Veinard rogne sur tout pour gonfler au fil des mois et des années son petit pécule et, tout en étant bien considéré par ses compagnons de misère il est loin de partager leurs tendances de consommateurs d'alcools et de filles de joie.
Il loge, quand il n'est pas engagé au mois chez un particulier, dans une chambre pour célibataire au-dessus du garage de Maître Liu et sa fille La Tigresse. Entre les courses à travers la ville et les engagements dans les familles, Le Veinard rempli sa tirelire et parvient enfin à réaliser son rêve le plus cher: acheter son pousse et pouvoir s'énorgueuillir de sa réussite, de sa belle stature d'athlète ainsi que de penser à prendre femme. Très vite, le malheur ternit l'avenir radieux qui s'offre au Veinard: lors d'une course risquée en-dehors de la ville, alors que les rumeurs de guerre enflent chaque jour, pour le gain de quelques yuan supplémentaires, il se retrouve arrêté et embarqué par un groupe de soldats qui lui volent son pousse et lui laissent la vie. Notre Veinard est de retour à la case départ, sa liberté si chère à son coeur entravée et le moral au plus bas. Cependant, notre tireur de pousse a de la ressoource et comme tant qu'il y a de la vie, il y a de l'espoir dès que l'occasion se présente à lui, il s'empresse de fausser compagnie aux soldats en emportant, en prime, à défaut de son pousse, les trois chameaux du convoi.
Le Veinard récupère une partie de son argent en vendant à perte les chameaux et de retour en ville, rebondit pour atteindre une fois de plus son rêve, acheter un pousse. Seulement, même si la chance demeure une compagne discrète mais réelle, Le Veinard rencontre plus d'obstacles qu'auparavant: entre les maisonnées désagréables où les épouses sont de vraies harpies, la concupiscence de La Tigresse qui le leurre et la surveillance policière de la famille Cao, les déconvenues se succèdent et apportent découragement et amertume. Notre Veinard tombera de Charybde en Scylla et lecteur sera le spectateur impuissant d'une vie déchue où la tristesse, la souffrance et le désespoir se disputent les lambeaux d'un rêve devenu vaine chimère. Il suit les efforts, sans cesse renouvelés, d'un pauvre hère, soumis à la dure loi d'un karma mais surtout d'une époque et d'un vent de l'Histoire, rouleaux compresseur d'une population fragile et miséreuse, en quête d'une pitance journalière qui lui permettra de voir chaque lendemain.
Lao She signe avec "Le tireur de pousse" un roman social digne d'un Zola, tant le réalisme est présent; il met en scène, avec tendresse, sans pathos exagéré et un humour décapant , le menu peuple de Pékin, celui qui par sa misère apporte la richesse et l'insouciance aux castes aisées et aux puissants. Le Veinard tente de sortir de sa condition de subalterne voire d'esclave, malgré son manque d'instruction et sa grande solitude (il a perdu les siens et du quitter sa campagne pour gagner sa vie en ville). Or, la marche d'une société en bout de course (Lao She suggère à demi-mot les futurs bouleversements de la Chine), refuse, par son fatalisme et son attachement à l'ordre des choses, l'espoir d'une vie meilleure aux hommes de bonne volonté. Le héros vit ses malheurs sans pouvoir être dans la capacité de faire les bons choix en raison de sa naïveté et de son absence d'éducation: le lecteur se demande, tout au long du récit, si la vie du Veinard aurait été différente s'il n'avait pas choisi cette funeste course en dehors de la ville.
Lao She utilise, avec un savoureux brio, le burlesque, non seulement de la description des personnages mais aussi des situations dans lesquelles Le Veinard se retrouve pour en extraire une force romanesque où la farce côtoie le tragi-comique. Cependant, à côté d'une verve pleine d'humour, Lao She sait décrire les mille et un petits détails du quotidien (la hiérarchie chez les pousse-pousse, leurs vêtements, leurs postures ou encore les plats revigorants achetés dans les gargotes...) sans lasser le lecteur, sans oublier d'accompagner les moments les plus critiques vécus par son héros de splendides descriptions empreintes de poésie, descriptions qui participent à la dramaturgie romanesque.
"Maintenant le ciel gris se diaprait de rouge, et les contours des arbres et des lointains se précisaient. Puis, peu à peu, le rouge se mêla au gris, formant des taches pourpres et violettes. L'horizon avait la couleur des raisins pas encore mûrs. Peu après, une teinte orange vif apparut et le coloris du ciel devint plus lumineux. Soudain, tout le paysage se détacha distinctement; la brume matinale qui couvrait l'orient se moira d'un rouge éclatant tandis que le zénith bleuissait. Puis la brume se dissipa et les rayons dorés du soleil apparurent enfin, tissant dans la trame des nuages une immense toile de feu: et les champs, les arbres, l'herbe passèrent alors du vert bleuté à un jade resplendissant." (p 38)
"Les eaux des douves du Palais étaient déjà complètement gelés, et leur brillant ruban gris longeait les anciens remparts de la Cité interdite. Aucun son ne parvenait de l'intérieur des murs. Les tours de guet aux toits finement travaillés, la voûte aux reflets d'or, les grands portails vermillon et les kiosques de la colline du Belvédère semblaient demeurer en suspens dans le clair de lune. On eût dit qu'ils attendaient que retentît l'écho de quelque voix à jamais silencieuse. Un vent léger soufflait doucement, franchissant les murailles de la Cité interdite. Il effleurait légèrement les kiosque et les palais comme s'il voulait leur raconter quelque histoire secrète d'un lointain passé." (p 126)
La lecture de ce roman m'a emmenée dans l'univers pittoresque, chaleureux et parfois épouvantablement tragique, du petit peuple pékinois du début du XXè siècle. Ce menu peuple, Lao She l'avait déjà admirablement peint dans "Quatre générations sous un même toit".
"Le tireur de pousse" est un prélude à tout ce que Lao She développera par la suite: la misère crasse des plus pauvres, la hantise du lendemain, les saisons apportant leur lot de drames, la fange qui semble ne jamais décoller des pieds des masses laborieuses, la corruption, pieuvre étouffant les plus faibles, ou la richesse méprisante de certains riches.
Il met en scène aussi les progressistes qui souhaitent voir le pouvoir être plus à l'écoute des misères du peuple et s'ouvrir un peu plus au monde moderne et se fait l'écho d'une vague qui bouleversera pour longtemps le visage, hors du temps, de la Chine.

Nota Bene: la traduction de mon exemplaire n'a pas été revisitée par François Cheng et sa fille; elle date de 1985 et parfois le style m'a paru un peu lourd. Cependant, elle n'a en rien diminué mon plaisir de lire ce premier roman de Lao She!

Roman traduit du chinois par Denise Ly-Lebreton







Roman lu dans le cadre des Lectures communes de Parfums de Livre



mardi 27 octobre 2009

Un défi personnel


Me rendant, dimanche matin, au Festival du Livre de Carhaix, la honte m'est tombée dessus, telle la vérole sur le bas-clergé breton: je n'avais pas pris le temps de lire les romans achetés au salon!!!

Ce soir, en allant chez Yvon, l'idée d'un challenge particulier m'est venue: et si je me lançais un défi à moi-même ayant pour objectif de lire d'ici la prochaine édition les romans bretons qui m'attendent dans ma PAL?

En effet, depuis le temps, ils s'accumulent:


Jamais de la vie de Françoise Moreau

Des gourmandises sur l'étagère de Françoise Moreau

Plume, lettre à un chat disparu de Claude Ansgari

Un an avec les trois petites soeurs de Yolande Catelain (littérature jeunesse)

La nuit blanche d'Hervé Bellec

Délit d'initié à Brest de Laurent Ségalen

Haïkus du chat de J.Poullaouec

Les Mange-Rêve: le grand dérèglement de J-L Le Pogam

Les Mange-Rêve: la route du nord de J-L Le Pogam

La peine du menuisier de Marie Le Gall

Les bois dormants de Fabienne Juhel

Mon vieux grenier en Bretagne de Louis Pouliquen

La cabane d'Hippolyte de Marie Le Drian (merci Sylire!!!)


Au rythme d'un par mois, ce défi est réalisable, non?

lundi 26 octobre 2009

Le voyageur immobile


Louis C. Lynch, dit "Lucy" depuis sa première rentrée scolaire, vit à Thomaston sans jamais avoir désiré quitter cette petite ville de l'Amérique profonde à une encablure de la trépidante et cosmopolite New-York. Il y est viscéralement attaché et ne peut envisager d'aller vivre ailleurs. Il y a ses amis, ses épiceries, son fils, ses souvenirs heureux et malheureux, il y croise des figures familières, celle dont l'histoire intime est inscrite dans l'atmosphère, dans les interstices du bitume ou du gazon, et qu'il peut lire, relire sans fin, par le prisme de son optimisme indéfectible et sans faille.
Il a entrepris d'écrire l'histoire de sa vie et, alors que son épouse Sarah, s'occupe des ultimes préparatifs de leur voyage à Venise, Lou achève de regarder derrière lui une vie qu'il a lentement déroulée. Il regarde et voit les menus faits de son enfance, coincée entre un père d'un tel optimisme qu'il semble être simplet et une mère au réalisme épuré de tout regrad amène sur l'être humain: son meilleur ami Bobby Marconi en compagnie duquel il "surfait" dans la camionnette de livreur de lait de son père, ses balades à vélo dans les quartiers de la ville, les soirées au bal du samedi soir où il regardait les filles sans espoir de conquête ou sa rencontre avec Mr Mock et à leur amitié construite au fil des grilles repeintes, à une époque où les Noirs américains étaient maintenus sur les bas-côtés de la société. Lou se rappelle aussi de sa terrible expérience due aux agissements d'une bande de mauvais garçons, expérience qui restera imprimée, malgré l'apparent oubli, au plus profond de son être: les moments passés dans un tonneau, la nuit, attendant, soumis à une immense frayeur, sa fin programmée, provoquant sa première "absence" et un étrange bien-être au "réveil".
Son ami Bobby s'est exilé de Thomaston pour partir en Europe et s'installer à Venise où il mène une brillante carrière de peintre et est devenu Robert Noonan. Il regarde, lui aussi, par-dessus son épaule et voit son passé revenir à lui: son enfance difficile, entre un père autoritaire et violent et une mère oscillant entre folie douce et perte de raison, son amitié incongrue avec Lou Lynch, ce garçon timoré, timide et en quête de copain.
Tous deux, séparés par un océan et une vision de la vie, sont les voix d'une histoire où perce la nostalgie d'une époque révolue, celle des petites villes américaines des années 50, engluées dans un ronron insipide, prémice d'une récession économique (l'épicerie Chez Ikey qui perdure malgré l'arrivée des grandes surfaces dévoreuses de petits commerces tisserands de liens sociaux, la tannerie qui pollue tout, la natur et les hommes, les livraisons des bouteilles de lait, les quartiers "ghetto" des différentes couches sociales...). Pourquoi ces deux garçons si différents, si éloignés l'un de l'autre, ont-ils tissé des liens d'amitié, que trouvaient-ils l'un chez l'autre? Chacun leur tour, ils s'interrogent sur la nature de ces liens et leurs regards croisés sur le monde actuel apportent un parfum de frustrations du couple, de désirs inavoués et inassouvis, de violences secrètes, et un lourd passif du poids des origines sous les hyprocrisies empoisonnées de la vie provinciale, cette vie souvent étriquée qui n'a de cesse de pourfendre, à coups de lames perfides, ce qui ose sortir du bon ordonnancement des choses. Chacun, à leur manière, ont construit une face du pan d'une vie: entre le danger de l'aventure et le confort d'une vie sans surprise, la présence d'un parfum légèrement délétère....celui de l'amour commun d'une femme.
Richard Russo dissèque, soigneusement, les âmes de ses personnages, allant jusqu'au bout de l'ambiance guimauve et provoquer l'écoeurement de son lecteur devant l'optimisme horripilant de Lou Lynch père, qu'il a envie de secouer pour lui faire quitter ce sourire à la limite de la niaiserie. Lou Lynch, parangon de la confiance en son pays qui ne peut que désirer le bien et le bonheur de ses citoyens, ce pays qui est l'exemple de la liberté (à partir du moment où on n'est ni noir, ni latino, ni indien!) et de la démocratie, alors que tout part à vau l'eau entre les cancers dus aux pollutions industrielles et le déclin économique. Le lecteur se dit que Lucy n'a aucune chance d'évoluer et commence à angoisser devant l'inamovible sourire dont il a hérité et son entêtement à ne pas vouloir bouger de Thomaston. Par de subtils petits coups de pinceau, Russo apporte profondeur et complexité à Lucy si bien que très rapidement, le lecteur ne peut s'empêcher de s'y attacher, de sourire avec lui, de regarder nostalgique le passé et les souvenirs, d'éprouver tendresse et compassion pour le monde qui va comme il peut. Derrière les apparences, se dissimule toujours une face invisible avec ses joies et ses blessures, c'est ce, grâce à une très belle écriture et un regard tendre, que Russo dessine délicatement, au gré des tons sépia de l'univers révolu des souvenirs et de l'enfance.
"Le pont des soupirs" est un roman intimiste qui déroule une galerie de personnages plus attachants les uns que les autres, malgré leurs défauts; ainsi le personnage de Berg, le professeur de lettres, père de Sarah, dont les cours subversifs sont un véritable régal...un orfèvre de la maïeutique! Ou encore le frère de Lou senior, irritant de grossièreté mais débordant d'amour indicible pour son frère comme pour sa belle-soeur. Au fil des chapitres et de leurs touches minimes mais essentielles, l'irritation, l'agacement ressenti devant la naïveté de Lou et les "absences" de Lucy (absences qui puisent leur origine dans le refus d'accepter la noirceur inexplicable du monde? Absences qui offrent une porte de sortie, une respiration salutaire, un monde de paix et de sérénité dont il a de plus en plus de difficulté à quitter?) , laissent la place à une vision positive du monde malgré ses imperfections et apportent, sans fausse note, le dénouement du récit: Lucy qui déplace son amour du voyage immobile pour la fraîcheur enthousiaste d'une enfant qui s'éveille à la vie.

Roman traduit de l'anglais (USA) par Jean-Luc Piningre






Roman lu dans le cadre des Lectures Communes de Parfums de Livre


On se fait des petits classiques cette année?


Non, ce n'est pas encore un caprice! Non, ce n'est pas une lubie! Oui, c'est le relai d'une info bien intéressante pour les amoureux de la littérature, de la belle écriture et d'une époque qui peut paraître dater de la Préhistoire!

En me baladant chez Bladelor, j'ai trouvé un nouveau défi lancé par Mariel: "J'aime les classiques"! Comme cette découverte était le prolongement d'une discussion avec Sylire à Carhaix, ni une ni deux, zou...j'ai foncé et je me suis inscrite.

Dans peu de temps, dans le cadre d'une lecture commune avec mes accolytes de Parfums de livre, je me ferai un plaisir de relire "Le lys dans la vallée" de Balzac....un bon début pour ce défi, non?

De Balzac, je continuerai bien mon itinéraire avec du Sophocle, de l'Aristophane, du Tourgueniev, du Tchekov, du Stendhal et du Cervantès...entre autres!

1 classique par mois, la mer à boire, à lire? Non, juste un pur plaisir!

dimanche 25 octobre 2009

Rendez-vous automnal


Dans une demi-heure nous serons sur la route de Carhaix, celle qui mène aux Vieilles Charrues en été et au Festival du Livre de Bretagne en automne!

Nous y retrouverons quelques blogueurs bretons: sylire, Yvon et mammig entre autres!

J'allais oublier: Le Festival fête ses 20 ans ce week-end!

samedi 24 octobre 2009

La malle de Pandore

J'ai lu ce roman il y a plusieurs mois (Février 2009) et malgré le temps qui passe, j'éprouve toujours autant de difficultés à en parler, à écrire ce que j'ai ressenti en suivant la famille Galay et l'héroïne de l'histoire, Gabrielle Demachy.
Comme ma lecture date un peu, je suis dans l'impossibilité d'en proposer un résumé exhaustif et j'espère que l'indulgence ne fera pas défaut. Gabrielle Demachy, après mûre réflexion, décide de quitter le cocon familial qu'elle partage avec sa tante Agota et la domestique de cette dernière. Elle n'en peut plus de vivre dans le souvenir du cher disparu qu'est devenu Endre, le fils unique d'Agota, ce cousin qu'elle admire encore et toujours, celui qui fut sans doute son premier amant. Endre n'est jamais revenu d'un de ses voyages aux confins du monde, en Birmanie, laissant le mystère et l'espoir d'un retour se tapir au coeur du petit appartement parisien. Gabrielle répond donc à une proposition d'emploi de préceptrice et est embauchée par Mme Bertin-Galay mère, matriarche de la famille et chef de l'entreprise délaissée par son époux, éternel explorateur féru de sciences et de connaissances nouvelles (comme en produisait, délicieusement, les familles bourgeoises d'un XIXè siècle en fin de course), afin de pourvoir à l'éducation de sa petite fille Millie (fille de son fils Pierre, professeur de médecine de son état).
Gabrielle s'installe dans sa nouvelle demeure campagnarde du Mesnil, sa nouvelle vie et se met à apprivoiser, petit à petit, la fillette dont elle a désormais la charge éducative: Millie s'épanouie et s'ouvre enfin au monde, elle que l'on croyait sans étincelle, elle qui ne connut pas sa mère, morte en lui donnant la vie. Le quotidien écoule joies, mélancolies, rencontres, promenades au fil des saisons et des visites.
Notre héroïne croisera la route d'un étrange soupirant en la personne de Michel Terrier, fonctionnaire au ministère des armées, soupirant qui s'intéresse de très près à ses relations avec Pierre Galay, et se laissera un tantinet embobinée par ses belles paroles jusqu'à ce que, découvrant peu à peu les liens d'un ami de Pierre avec Endre, son amour perdu, creusant derrière les apparences pour apprendre que Millie n'est pas la fille de Pierre (il épousa sa mère pour la protéger) mais celle d'une ombre recherchée par les services secrets français, elle ne cède au charme de Pierre et entrevoit une réalité bien sordide où les conflits d'intérêt et les mensonges remuent la tourbe, noire et gluante, des secrets d'état.
"Dans la main du diable" est un roman fleuve qui se lit sans qu'on puisse le lâcher: entre chronique familiale d'un siècle qui s'éveille à la plus grande des modernités et aux plus extraordinaires changements socio-politiques et roman à suspense, le lecteur suit avec délectation la jeune Gabrielle qui habitée par diverses passions, actrice involontaire de complots, côtoyant le crime, l'injustice et l'espionnage, se trouve prisonnière d'une mécanique sentimentale et historique qu'elle ne peut contrôler. Et lorsque l'on apprend qu'elle est en possession d'une malle et d'un cahier en hongrois, exhalant le soufre des pires poisons orchestrés par l'expérimentation secrète en terres coloniales lointaines, les ingrédients sont réunis pour que l'ambiance du récit virevolte de l'amour à la haine, de l'horreur à la tendresse, de la beauté ineffable d'une campagne tranquille aux catastrophes futures qui couvent sous la braise des secrets-défense, des idées révolutionnaires et de la misère d'un menu peuple toujours exangue.
Gabrielle, belle de sa jeunesse, de sa culture, de son appétit de la vie, de sa sensualité et de son humanité, expérimente malgré elle la beauté du diable ainsi que sa main veloutée à la force d'airain. Elle est d'une luminosité aussi fragile que rassurante et éclaire, ardente et fervente jeune femme moderne et revendicatrice de sa liberté et de son libre arbitre, "le roman de sa vie" qui commence à un moment particulier de l'histoire humaine dont la modernité et les inovations technologiques vont perturber, avant de les chambouler, les repères d'une société, héritière des Lumières, qui s'engage sur une voie dont elle ne discerne pas encore les balisages.
Anne-Marie Garat avec "Dans la main du diable" fait bruisser l'écho jubilatoire des grandes fresques romanesques telles de "Les Thibault" de Martin du Gard, ou "La comédie humaine" de Balzac, elle ouvre avec générosité les portes de l'imaginaire, celui qui s'est construit au fil des lectures d'enfance et d'adolescence, et offre un récit à la puissance romanesque emportant toute la réserve que l'on peut avoir devant les romans feuilleton ou les romans fleuve! Elle nous entraîne à la suite de Gabrielle dans la nostalgie de l'enfance, des histoires que l'on se raconte, qu'on se fabrique avec les bribes de secrets familiaux et de non-dits transpirants des murs feutrés des maisons bourgeoises. Le tout servi par une langue française d'une vraie richesse et d'une réelle beauté: l'auteur assemble avec maestria les mots pour leur donner une grande puissance poétique et évocatrice, et transporter son lecteur dans l'univers précieux et merveilleux d'une langue française que l'on souhaiterait lire plus souvent!



Livre lu dans le cadre du défi de Grominou

mercredi 21 octobre 2009

Comment faire pour taire sa faim?


Lors de la Semaine du Goût, j'ai lu dans ma classe une histoire bien sympathique et pleine d'enseignements: "La grosse faim de P'tit Bonhomme"!

P'tit Bonhomme se réveille et son ventre gargouille: il a faim. Il descend dans la cuisine, ouvre le placard: ce dernier est vide tout comme la huche à pain et l'armoire! Vite, il file chez le boulanger pour lui demander de lui donner du pain...parce qu'il a FAIM! mais c'est que cela ne fonctionne pas comme ça: le boulanger ne donne pas son pain, il le vend...."c'est comme ça que je gagne ma croûte". P'tit Bonhomme sort son porte-monnaie qui, hélas, s'avère être aussi vide que sa huche et son placard! Une solution se profile: s'il donne au boulanger un sac de farine, celui-ci lui donnera du pain.

Ni une ni deux, P'tit Bonhomme court au moulin où il sollicite le meunier qui, bien entendu ne donne pas mais vend sa farine "Je ne mouds pas pour rien". Comme le porte-monnaie est toujours vide, le meunier veut bien donner un sac de farine contre un sac de grains de blé. Du coup, P'tit Bonhomme va voir le paysan qui veut bien donner des grains de blé mais pour faire pousser le blé il faut du crottin....le cheval veut bien donner du crottin mais il n'a plus d'herbe verte à manger....la terre veut bien donner de l'herbe mais tout est sec car elle a soif....la rivière veut bien donner de l'eau mais en échange d'une séance de ménage ce que fait P'tit Bonhomme. Ce dernier fait à rebours le chemin pour terminer chez le boulanger et enfin "voir la fin de sa faim"!

Les illustrations sont vraiment très très belles, variées (les matériaux sont hétéroclites mais judicieusement organisés), le texte est parsemé de jeux de mots amusants, de rimes et de musicalité. J'ai adoré le qualificatif de "puant si bon" au sujet du crottin de cheval, la rivière "qui se la coulait douce". J'ai beaucoup aimé le passage du nettoyage de la rivière: l'eau est un bien précieux qu'il faut bien traiter.

Le cycle du pain est amené de manière originale: P'tit Bonhomme part du produit fini pour aller à la source (l'eau et l'engrais). Les clins d'oeil aux comptines et chansons traditionnelles sont présents, notamment au sujet du meunier qui est représenté allongé, la fleur aux lèvres. De plus, le goût de l'effort est mis en scène de façon ludique: pour manger et calmer ainsi sa faim, P'tit Bonhomme travaille tout au long de la journée...ce qui ne l'empêche pas de goûter, sans façon, au plaisir ineffable de ne pas se soucier du lendemain. Il y a de l'épicurien dans ce P'tit Bonhomme!

J'ai failli oublier un autre détail intéressant du récit: la scène d'ouverture "Dans la ville il y a une rue, dans la rue il y a une maison dans la maison il y a une chambre dans la chambre il y a un lit dans le lit il y a un P'tit Bonhomme, dans P'tit Bonhomme il y a un ventre vide."...c'est tout simplement une description balzacienne (rappelez-vous la description dans "Le Père Goriot": des abords de Paris, le lecteur suit le chemin descriptif de Balzac jusqu'à la mouche sur le papier peint d'une pièce de la maison.)!

Une jolie histoire à mettre entre toutes les mains!

Envie d'aventures?

Le Livre de Poche lance son opération "Devenir jurés" de son prix des lecteurs 2010. C'est avec plaisir qu'une fois de plus j'ai posé ma candidature (on ne sait jamais, à force je serai peut-être un jour sélectionnée!).
Si vous aussi êtes tenté par cette aventure littéraire, n'hésitez pas à cliquer ICI ou LA !!!
J'ai opté pour le jury des lecteurs du Prix Littérature.

lundi 19 octobre 2009

La bibliothèque et la quête amoureuse


Constance n'aime lire qu'un seul et unique auteur: Romain Gary. Elle savoure lentement ses romans afin de faire durer ses lectures: les trente-et-un romans publiés sous divers pseudonymes ne se lisent pas à la suite!!! Seulement, si Constance ne souhaite pas épuiser trop vite le "stock" de lecture de son écrivain fétiche, il lui faut lire autre chose...lire oui mais quoi? Elle se rend alors à la bibliothèque de son quartier, s'y acquitte de sa cotisation et commence à farfouiller dans les rayons. Elle emprunte au hasard trois romans....qu'elle ne peut lire jusqu'au bout car Romain Gary est encore trop présent. En relisant quelques passages d'un des romans, Constance tombe sur une phrase soulignée au crayon à papier, phrase qui semble s'adresser à elle "Y’a mieux pour vous !" . Qui a pu tenter de lui laisser un tel message? Qui est cet homme qui souligne, au mépris de l'interdiction, dans les romans? Commence alors une partie de cache-cache, une enquête surprenante tissant au fil des romans de Dostoïevsky, Nimier ou Romain Gary, une histoire d'amour peu commune.
Au gré des emprunts suggérés par le mystérieux souligneur, Constance se construit une histoire sentimentale, se prend à rêver de l'homme qui lui laisse des messages et se lance à lui répondre en soulignant à son tour des phrases dans les livres. Elle imagine cet homme, son âge, son apparence, ses goûts, ses habitudes, en s'interrogeant sur sa véritable réalité: existe-t-il vraiment ou est-elle en train de lire des dialogues imaginaires d'antan? Constance passe par des phases alternant espoir et désespoir, se débat entre son ennui et son désir d'établir une liaison amoureuse, de briser sa solitude, alors, prise de frénésie de rangement, de ménage ou de frais de toilette, elle déambule de la bibliothèque à chez elle, perplexe et enthousiaste, triste ou heureuse.
"Le souligneur" est une histoire plaisante, reposante, même si l'héroïne est très centrée sur elle-même tout en embarquant son petit monde (la copine, l'ami de son père, la bibliothécaire ou l'étudiant en lettres) dans son histoire d'amour, même si l'issue du roman peut paraître attendue voire simpliste. On lit ce court roman sans se lasser car l'auteur plonge son lecteur, avec habilité, au coeur de la littérature et dans une des antres bien connue des lecteurs à l'appétit d'ogre....la bibliothèque, lieu magique des rencontres improbables, insolites ou toujours rassurantes avec les auteurs inconnus ou pas et leurs oeuvres.
J'ai aimé cette idée saugrenue au premier abord, d'une histoire de séduction amoureuse par phrases soulignées interposées....un romantisme feutré et troublant autour de la littérature. Et puis comment résister au personnage de Gisèle, la bibliothécaire aux allures de Cerbère, assenant le règlement, triomphalement, avec un zeste de regard noir, intimidant le béotien qui vient s'inscrire. Nous avons tous rencontré une Gisèle lors de nos fréquentations de bibliothèques municipales, une Gisèle qui guette la moindre infraction au code de bonne conduite du lecteur , une Gisèle qui rageusement gomme les phrases soulignées par un irrespectueux! Quant au souligneur....le lecteur restera dans l'expectative tout comme Constance...le souligneur restera ce personnage mystérieux, cette Arlésienne de la bibliothèque et sans doute est-ce mieux ainsi: le bonheur est souvent devant nos yeux sans que nous le sachions!




Les avis de chroniques lunaires (avec une interview de l'auteur) amandine

dimanche 18 octobre 2009

Ils sont enfin là!

(Photo prise le lendemain de la naissance...ils sont plus présentables)
Carotte et Némo, le couple de cochons d'Inde de la classe, ont fait "cage commune" à partir de fin Juillet afin que les futurs petits naissent au plus tard début Octobre.
Je commençais à désespérer (comme les enfants d'ailleurs) qu'il y ait naissance avant les vacances de Toussaint, lorsque vendredi soir, après un RDV avec une maman d'élève, je suis retournée en classe, histoire de garnir biberon et gamelle pour le week-end. Une belle surprise m'attendait: 5 adorables bébés, encore mouillés et ensanglantés, se pressaient contre les flancs de Carotte (sous le regard un peu dépassé de l'heureux papa Némo).
Mon petit doigt me dit que, demain, la classe ne se déroulera pas comme prévu ;-)

samedi 17 octobre 2009

American comedy


Ignatius Reilly vit avec sa mère dans une vieille bicoque d'un quartier pauvre de La Nouvelle Orléans. Il passe son temps cloîtré dans sa chambre entre ses livres et ses cahiers Big Chief dans lesquels il alterne maximes, pensées et journal! Ignatius a étudié longtemps à l'université où il s'est rendu célèbre par ses attitudes subversives et grotesques, c'est un jeune trentenaire érudit, intelligent à la sensibilité exacerbée par une tendance aiguë à être hyponcondriaque (Aaahhh, l'anneau pylorique qui se bloque dès qu'il y a contrariété!!!) ce qui le rend très tyrannique et un tantinet réactionnaire. Son train-train quotidien est perturbé par le rencontre, grotesque et hilarante, d'un vieil homme, un peu gauchiste et contestataire, et d'un policier, aux allures d'abruti et stigmatisé par ses collègues et son supérieur. Leurs chemins vont se croiser régulièrement grâce à Mme Reilly mère, alcoolique solitaire qui sympathise avec ces deux hommes...et grâce à l'accident de voiture qui met à mal les finances familiales. Notre Ignatius se voit dans l'obligation de quitter sa tour d'ivoire pour se mettre à la recherche d'un emploi...ce qui s'avère provoquer une réaction en chaîne des plus hilarantes!
Une galerie de personnages hauts en couleur s'égrenne au fil du roman: Mancuso, le policier affligé d'une kyrielle de déguisements plus ridicules les uns que les autres, Mr Gonzales, le comptable des Pantalons Levy, Miss Trixie, la secrétaire d'âge canonique qui devrait être en retraite mais qui est maintenue sur son poste en vertu d'une expérience psychologique menée par Mme Levy, Jones le balayeur d'un bar louche tenu par une patronne sculpturale et dictatoriale, Mr Levy qui ne pense qu'à une chose, se débarrasser des Pantalons Levy créés par son père, la copine de Mme Reilly, avocat du diable luttant pour l'émancipation ombilicale d'Ignatius, ou Myrna, l'ancienne copine de fac qui s'est juré de faire sortir Ignatius de sa gangue d'inertie.
Dès le premier chapitre, on est happé par le côté délirant des situations et des descriptions des personnages: rien que la casquette de chasse verte est un bonheur à imaginer sans compter le reste de l'individu qu'est Ignatius."Une casquette de chasse verte enserrait le sommet du ballon charnu d'une tête. Les oreillettes vertes, pleines de grandes oreilles, de cheveux rebelles au ciseau et de fines soies qui croissaient à l'intérieur mêmes desdites oreilles, saillaient de part et d'autre comme deux flèches indiquant simultanément deux directions opposées. Des lèvres pleines, boudeuses, s'avançaient sous la moustache noire et broussailleuse et, à leur commissure, s'enfonçaient en petits plis pleins de désapprobation et de miettes de pommes de terre chips. A l'ombre de la visière verte, les yeux dédaigneux d'Ignatius J.Reilly dardaient leur regard bleu et jaune sur les gens qui attendaient comme lui sous la pendule du grand magasin D.H.Holmes, scrutant la foule à la recherche des signes de mauvais goût vestimentaire. Plusieurs tenues, remarqua Ignatius, étaient assez neuves et assez coûteuses pour être légitimement considérées comme des atteintes au bon goût et à la décence. La possession de tout objet neuf ou coûteux dénotait l'absence de théologie et de géométrie du possesseur, quand elle ne jetait pas tout simplement des doutes sur l'existence de son âme." (p 13) En quelques lignes, le lecteur est plongé dans le monde de l'absurde où la cohérence apparaît au moment où il s'y attend le moins. Le départ dans les rouages de l'esprit décalé du héros est guidé par ces mots où le burlesque tient une grande part....d'autant qu'il a l'art de semer, l'air de rien, la zizanie et de retourner à son avantage des situations déplaisantes (Ignatius est tout sauf un simple d'esprit: il possède l'art de la rhétorique) ce qui fait de lui un parangon de vertu et de bonté! D'ailleurs, cette attitude déstabilise complètement sa mère qui ne cesse de balancer entre l'envie de ne plus le voir et son amour maternel.
Le personnage de la mère est intéressant: elle bataille sans relâche contre des sentiments contradictoires (maternage et remontrances), elle a envie d'être enfin libre et en même temps elle n'ose lâcher son rejeton dans la jungle du quotidien. Tous deux forment un couple où l'amour/haine scande chaque seconde vécue. Ils sont aussi attachants l'un que l'autre (Ignatius peut être vraiment répugnant mais on ne peut s'empêcher de l'apprécier malgré tout) tant par leur décalage perpétuel par rapport à la réalité que par l'osmose qui les unit: il y a des passage où l'émotion est intense derrière la dérision, l'ironie et l'absurde. En creusant un peu, on s'aperçoit que plusieurs personnages sont pathétiques: Ignatius, qui se languit de solitude et de misanthopie absurde; Mme Reilly, qui ne peut couper le cordon ombilical; l'agent Mancuso, qui arpente les rues de La Nouvelle Orléans sous les déguisements les plus ridicules; Mr Levy et son application puérile à défaire ce qu'a construit son père. Cependant, le comique est toujours présent, dissimulant habilement le pitoyable et le pathétique sous des aspects plus faciles à accepter: le rire est une défense et une manière, parfois, d'occulter la noirceur.
John Kennedy Toole utilise à merveille le décalage entre la préciosité de la langue utilisée par Ignatius, ovni dans le roman, et la langue populaire des personnages qui gravitent autour du héros. Il est facile d'imaginer que la lecture en VO du roman est hautement jubilatoire par ces virevoltes linguistiques, aussi peut-on rendre hommage au traducteur pour avoir réussi à faire entendre, au fil de la lecture, la langue et l'accent populaires des vieux quartiers de La Nouvelle Orléans! Il est à noté également que la mise en scène du contraste entre Myrna et Ignatius est une manière subtile de mettre le doigt sur les différentes "Amériques" coexistant dans les années soixante: celle qui n'en peut plus des rigidités obsolètes et incohérentes et qui ne souhaite que le progrès et l'ouverture d'esprit (notamment dans la défense des Droits Civiques pour les Noirs), représentée par Myrna, révolutionnaire en diable, feu follet adepte du "secouage" des consciences politiques; celle qui souhaite, par étroitesse d'esprit et peur de la nouveauté, que rien de change, que l'univers reste stable histoire de ne pas s'y perdre, représentée par un Ignatius qui cherche des arguments contraires par tous les moyens (cependant, il sera à la pointe de l'idéalisme en inventant un système pour instaurer la paix définitive dans le monde...un système mettant en pratique, pour les militaires, le slogan "Faites l'amour pas la guerre").
Au final "La conjuration des imbéciles" est un roman hautement comique, un roman qui pointe les contradictions du monde par la dérision la plus totale et la plus jubilatoire. "La conjuration des imbéciles" et sa galerie de personnages inénarrables restent longtemps à l'esprit après lecture: le roman est d'ailleurs construit comme du théâtre de boulevard, on entendrait presque les portes claquées à chaque entrée et sortie des personnages, on imagine leurs gesticulations burlesques et bruyantes et on se délecte des multiples rebondissements.

Roman traduit de l'anglais (USA) par Jean-Pierre Carasso









Roman lu dans le cadre des Lectures communes de Parfum de Livres

dimanche 11 octobre 2009

Pour clore la semaine


Et en débuter une autre.... Une photo prise place de la Bastille, juste avant de prendre place à l'Opéra pour Wozzeck d'Alban Berg. C'était il y a quinze jours....Paris sous le soleil est toujours splendide!

samedi 10 octobre 2009

La fin du monde tombe un jeudi



Nous sommes dans un futur qui pourrait être plus proche de nous que nous ne le pensons: une société où le jeu a remplacé les religions, les idées, où les ministères du Hasard et de l'Energie mènent la danse, où les ghettos sont le lieu de toutes les chutes, où la corpulence au-delà de la norme entraîne solitude, résultas scolaires pas terribles, où tout peut être propice à l'exclusion, au renvoi et à la déchéance...et surtout une société dans laquelle les hommes se font "empucés" dès l'âge de 13 ans, procédé par lequel plus rien ne peut être gardé secret! Un monde où la capacité à gagner aux jeux de hasard permet l'ascension sociale, ouvre les portes à la gloire et à la notoriété mais aussi aux pires dépressions nerveuses, maladies que le ministère du Bien-Etre balaye d'un coup de séjour dans une structure adaptée...une espèce de camp de rétention.
C'est dans ce monde merveilleux où la baisse de moral n'existe pas, où le bonheur est scandé à chaque seconde, que vit notre jeune héros, Thomas Drimm, rejeton préobèse d'une famille déchue: son père, ancien membre du comité de censure, est devenu alcoolique (pour oublier la négation de la culture d'autrefois, pour oublier que la nouvelle société a fait table rase de tout et a coupé l'Humanité de son âme, que la médiocrité absolue est devenue la norme) et minable prof de lettres dans un collège aussi minable où un enseignement minable est dispensé à des ados minables qui végètent en attendant d'entrer dans leur vie de minables; tandis que sa mère est psychologue dans un casino, chargée d'accompagner les gagnants du jackpot, éternelle insatisfaite, ne pardonnant pas à son époux leur déchéance...mais comme, à partir du moment où un couple a un enfant il ne peut divorcer, elle est contrainte d'accepter son triste sort d'épouse d'alcoolique et de mère d'obèse.
Un après-midi de tempête, Thomas joue au cerf-volant sur la plage quand soudain s'avance vers lui un vieux monsieur, Léonard Pictone, qui s'écroule subitement après avoir reçu le bout du cerf-volant sur la tête: le début des ennuis et le début d'une folle aventure commencent pour cet adolescent de "treize ans moins le quart" qui se retrouvera sur une route cahoteuse, cachant moult chausse-trapes, la route d'un jeune super héros sur les épaules duquel repose l'avenir du monde. Il sera aidé en chemin par une belle voisine, Brenda, au passé tumultueux et au quotidien morose, et son ours en peluche où se réincarne le vieil homme, tué par le cerf-volant...en effet ce dernier n'est pas un citoyen comme les autres, il fut l'inventeur du Bouclier protecteur du monde actuel, les Etats-Uniques, et en est un de ses plus grands scientifiques!
Entre rêves issus d'absences étranges et quotidien insipide, Thomas parcourt la première étape de son initiation, de son passage à la vie adulte, alternant désir de rester tranquille et de se faire remarquer le moins possible et l'envie de brûler les étapes, pour laisser s'épanouir une force intérieure méconnue, une volonté d'émancipation étonnante, une sagacité et une prédisposition que la chappe de plomb familiale avait étouffées (pour son bien, le père de Thomas a trafiqué les résultats de son rejeton....histoire qu'il ne soit pas handicapé par son potentiel intellectuel et sa capacité de raisonnement).
Didier Van Cauwelaert met en scène un jeune héros que le lecteur suit avec plaisir, pour lequel le lecteur est plein d'espoir et de compassion, envers lequel le lecteur éprouve une immense tendresse: comment ne pas craquer pour ce môme mal dans sa peau, aux rêves plus grands que lui, au regard doux promené sur un monde qu'il trouve injuste, cruel, pesant, mais dont on doit supporter la marche insipide et intolérante. Son intériorité lui donne un espace de liberté entretenu par un père qui ne s'avoue pas vaincu et refuse de courber l'échine, un père qui lui distille des morceaux choisis de la civilisation d'hier que celle du présent a décidé d'éradiquer au nom d'un bonheur qui n'en est pas vraiment un. Il installe, également, un échéquier que l'on connaît bien et sans lequel le frisson ne serait pas vraiment garanti: l'incessante lutte menée entre le Bien et le Mal, ces deux points antagonistes essentiels et intimement liés, éternels frères siamois que l'on ne peut dissocier. L'auteur égare un peu son héros en le confrontant à deux images du Mal, deux images imbriquées l'une dans l'autre, soufflant le chaud et le froid, alternant l'espoir et le désespoir au cours d'une immense et intense partie d'échecs dans laquelle, fou, roi, reine,tour et simples pions dansent une valse doucereuse.
Avec discrétion, l'auteur interpelle le lecteur sur ce futur, pas si lointain, avec lequel notre actualité a quelques points communs: la norme dictatoriale de l'apparence, l'uniformisation des goûts et des saveurs, l'indigence de certains programme, le gavage médiatique, la scénarisation de la vie pour faire oublier ce qui ne tourne pas rond. Il souffle doucement l'image d'une spiritualité en perte de vitesse qui lentement éloigne l'Humanité de son essence même: celle du partage des ses connaissances et de son histoire, du don de soi, de l'altruisme et du tissage du lien social. Le passé apporte toujours un plus au présent, les Anciens sont toujours les passeurs essentiels pour ceux qui continuent l'histoire humaine.
Le jeune Thomas est un personnage attachant malgré la vision caricaturale de la femme qu'il véhicule....mais sans doute est-ce un aspect inhérent à la psychologie de l'adolescent en plein trouble hormonal! Ses émois sont touchants de sincérité et de maladresse aussi lui pardonne-t-on certains écarts.
"Thomas Drimm" est le premier tome d'une série de cinq romans et il ne donne qu'une seule envie: celle de connaître la suite des aventures initiatiques de Thomas.

Ah! j'allais oublier: j'ai beaucoup apprécié les clins d'oeil "écolos" du roman ainsi que sa chute d'une verdoyante ouverture.

Je remercie Paola et les éditions Albin Michel de m'avoir fait découvrir ce premier opus et de me permettre d'entrer dans le monde, encore méconnu pour moi, de la littérature adolescente.






(4/7)

Le site du roman ICI

samedi 3 octobre 2009

Le bibliobus québécois

Le Chauffeur conduit un bibliobus pas comme les autres sur les routes québécoises reliant les contrées isolées à l'antre de l'évasion par la lecture. Il sillonne, trois fois dans l'année, l'alsphate pour déposer dans ses réseaux, au creux des bras des chefs de ces derniers, le sac de livres qui les fera tenir jusqu'au prochain passage. Les réseaux, une image qui rappelle la clandestinité, le mystère, le secret jalousement gardé et l'aventure fleurant bon le danger...une image qu'aime Le Chauffeur, ce bibliothécaire ambulant, porteur de mots, d'ensoleillement et de compagnie. Alors qu'il pense entamer son ultime tournée, il croise la route de saltimbanques français dont fait partie Marie. Très vite, Le Chauffeur ressent une attirance irrésistible pour Marie en qui il pense trouver son double, son reflet, sa complémentarité; très vite leurs chemins se croisent et recroisent au gré des représentations pour finalement se suivre afin de permettre aux artistes français de réaliser un de leurs désirs: visiter le Québec. Marie, étoile frêle, fée lumineuse au crayon donnant vie aux oiseaux, petit grain de sable brillant qui rend incongrue la présence, au début inquiétante, du tuyau destiné à aider Le Chauffeur à stopper une vie dont il ne veut plus, dont il a perdu le goût. Au gré des virages, au gré des arrêts dans les villages perdus, au gré des conversations parmi les livres, une tasse de tisane à la main, Le Chauffeur réapprend à regarder la vie d'un autre oeil, celui de l'espoir, de la couleur chaude des paysages, du rythme cardiaque qui s'accélère parce qu'un doux sentiment affleure au moment où il s'attendait le moins. Il est parfois des romans dont on a du mal à expliquer pourquoi on est entré immédiatement dans l'atmosphère qui s'en dégage: "La tournée d'automne" en fait partie. Dès la première phrase, la magie a opéré, le voyage en compagnie du Chauffeur a commencé avec l'envie qu'il ne finisse jamais. Un ancien camion laitier transformé en bibliobus....un breuvage laiteux, nourrissant, remplacé par les mots, les images, l'imaginaire, autres nourritures fondamentales, le lait, source de vie de l'enfance des Hommes, devient flot immatériel d'une source alimentant la curiosité de ces derniers. Un camion qui attire autant les villageois que les chats québécois....les chats amateurs invétérés de lait mais aussi immuables compagnons du stylo qui glisse sur le papier. J'ai aimé me faire toute petite, près des rayonnages, aux côtés des badauds écoutant la musique des artistes, derrière la fenêtre du bibliobus, regardant défiler des paysages inconnus et pourtant familiers. J'ai aimé les moments de contemplation du fleuve si grand, si majestueux qu'il ressemble à l'océan, si magique que l'on distingue le souffle jaillissant des baleines en balade. Une beauté sauvage et immémoriale en filigrane du chemin de vie d'un homme arrivé à l'âge de la retraite qui ouvre les yeux sur les joliesses du monde, un personnage qui m'a émue au plus haut point et que j'ai accompagné, subjuguée, d'un bout à l'autre de sa tournée. Le Chauffeur tisserand de liens invisibles entre les lecteurs, ses grands lecteurs, et ses livres que certaines disparitions n'attriste pas bien au contraire, heureux que leur voyage continue sur d'autres routes. "La tournée d'automne" par ses côtés sucrés m'a embarquée dans un monde où le bruit est en sourdine (même la fanfare n'est pas tonitruante), où les sons feutrés divaguent, où la brume des larmes voile un regard sans le noyer; un monde qui peut paraître irréel, voire artificiel, mais qui dégage une douce chaleur humaine, une dentelle à la fragile apparence et à la force réelle, offrant un havre de paix dans un environnement qui ne semble pas se lasser d'être bruyant. Ce fut comme un arrêt du temps, une fenêtre s'ouvrant sur un jardin paisible dans la lumière dorée d'un été indien...sensations d'étirement temporel, flaveurs d'une guimauve élastique que l'on déguste avec une lente gourmandise pour faire durer la magie de l'éphémère.
"C'était un petit camion Ford de deux tonnes. Il avait beaucoup roulé, il était vieux, mais on ne lui aurait pas donné son âge. De couleur gris ardoise, il avait fière allure avec ses formes arrondies, ses rideaux aux fenêtres et le mot Bibliobus peint en blanc sur le côté. Il ouvrit une des portes arrière, abaissa le marchepied et monta à l'intérieur...Après toutes ces années, le charme opérait toujours: sitôt la porte fermée, on se trouvait dans un autre monde, un monde silencieux et réconfortant où régnaient la chaleur des livres, leur parfum secret et leurs couleurs multiples, parfois vives, parfois douces comme le miel." (p 13)
Roman lu dans le cadre du Blogoclub de lecture

jeudi 1 octobre 2009

Le Chant de la Terre II


Le premier volet du Chant de la Terre commençait avec La grande course de chars à voile, volet au cours duquel on découvrait des être hybrides à foison, d'étranges mastodondes paisibles et insensibles à la douleur qui lentement s'éteignaient sans que l'on comprenne pourquoi, des quêtes croisant la route sans fin des possibles du Grand Loin et des espoirs pour l'Humanité.
Des millions et des millions d'années sont passées, Starquin est toujours emprisonné dans sa cage cosmique de Dix Mille Ans, et les êtres de cette Terre aux mille visages sont toujours les acteurs inconnus de la Quête. L'Arc-en-Ciel régit le monde où vivent les Humains Sauvages, où d'étranges gardiens gèrent un dôme bizarre où déambulent des Spécialistes qui auront leur part d'action, ténue mais ô combien essentielle....les gouttes d'eau font les grandes rivières et les actes les plus minimes peuvent avoir des conséquences primordiales.
Ce second épisode, ce chant de la Terre qui se déroule au coeur du 143è millénaire d'une ère que l'on ne peut imaginer, est celui de la naissance d'une triade, la Triade voulue par Starquin, le prisonnier du temps, celle qui détient une des clés de sa libération. Ainsi, les fils du destin invisible des uns et des autres tissent-ils la route qui fera se croiser La Fille, Néoténite aux allures incongrues de gros bébé, le Vieil Homme, le Cuitador Zozuba, gardien du Dôme, et Manuel, l'Artiste, l'Humain Sauvage. Ils s'engagent dans une aventure initiatique au cours de laquelle ils iront de surprise en surprise en rencontrant un monde où les apparences sont plus importantes que l'être, où la vie rêvée est celle que l'on aimerait vivre, une vie virtuelle qui lentement érode l'être que l'on est. La locomotive à vapeur est le dernier endroit où l'on peut enfin connaître de vrai frisson d'une vie qui peut s'arrêter abruptement, le lieu où la mort peut survenir sans crier gare, la route sur laquelle tout peut finir...un délice mortifère qui offre l'envie de continuer aux blasés téméraires d'une réalité virtuelle, fausse et mensongère: cette machine, infernale?, sillonne à un train d'enfer, le Pays des Rêves Perdus, celui qui engrangent les désirs inavoués, les chimères les plus folles, que peuvent receler les subconcients, les inconscients des êtres humains.
Michael Coney happe son lecteur par le truchement d'un style oscillant entre poésie et imaginaire débridé où les limites entre la fantasy et la SF sont parfois très floues, au point de se confondre. Il est parfois difficile de raccorder les faits de la Triade à ceux du premier volet qui évoquait la naissance de l'homme qui rassemblerait tous les humains: cet éventuel désagrément ne gâche en rien la saveur de cette épopée futuriste où les références à Huxley et "Le meilleur des mondes" et à Stevenson et ses aventures, sont autant de pépites à déguster.
La place de plus en plus importante de l'ordinateur dans le quotidien du monde contemporain et les craintes que cela inspire, transparaît dans le personnage inanimé et intemporel, froid gérant au caractère imprévisible, de l'Arc-en-Ciel, ce maître invisible qui dirige la vie et le destin de cette Terre assujettie à un progrès dont l'Humanité a perdu les clés. Coney utilise les espoirs et les peurs de notre époque contemporaine vis à vis des progrès technologiques pour alimenter son oeuvre (en excellent auteur de SF!) et les décortique au fil des pérégrinations de notre Triade...et c'est délectable! Les avantages du progrès ont abouti à la création de monstres, les Néoténites et leurs avatars de l'île du delta qui sous leur apparente immobilité cachent une vie spirituelle des plus fines et des plus abouties, à la perte des jalons de la vraie vie et au refus d'accepter la dictature d'un ordinateur permettant alors une émancipation pour devenir des Humains Sauvages (ceux qui vivent, enfantent et meurent en harmonie avec la nature même si elle est hostile!). La course effrénée après les chimères dévoreuses de temps et de psyché qui s'achève dans les wagons emballés de la Locomotive est un peu celle dans laquelle sont entraînés les Hommes cédant aux chants factices des sirènes du faux-semblant clinquant et dérisoire. Mais la rédemption est toujours possible, allégeant ainsi le fardeau des Hommes: la volonté de l'esprit, son désir de liberté ouvrent les portes des cages qu'ils se sont construites...la Triade est le petit grain de sable qui enrayera la machine éructante et écumante, l'oeil qui s'ouvre pour réaliser combien les chimères sont délétères.
"La locomotive à va peur céleste" est un roman passionnant, foisonnant et protéiforme: j'ai aimé me perdre dans les lacis du récit, les apartés et les contes pour mieux retrouver le sel du roman.
Merci à BOB pour cette très belle lecture!

Traduit de l'anglais (GB) par Isabelle Delord-Philippe

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