vendredi 29 octobre 2010

L'ombre et la lumière

Monsieur de Sainte-Colombe pleure la disparition de son épouse en se réfugiant au fond du jardin, dans une cabane où il compose ses oeuvres. Il compose pour son épouse, pour leur amour toujours vivant, pour une peine toujours vive, pour une vie qui s'est arrêtée avec le départ de l'aimée, le Tombeau des Regrets. Sans cesse, il manie l'archet sur la viole, sans cesse, il est à la recherche du geste parfait qui fera sortir de l'instrument le son parfait, dans la plénitude d'une gestuelle créatrice. Sans cesse, il joue dans le souvenir de l'être aimé, dans la solitude qui lui fait oublier parfois ses filles. Il se retire tellement en lui-même qu'il en devient froid, austère et distant avec le monde, jouant pour un cercle très fermé de mélomanes, n'acceptant plus d'élève à former. Jusqu'au jour où un jeune homme, Marin Marais, vient frapper à sa porte pour devenir son élève, le poussant dans ses plus lointains retranchements, c'est à dire le chasser car même s'il maîtrise divinement la viole, il ne sera jamais un musicien. La jalousie n'est pas de mise chez Monsieur de Sainte-Colombe, seulement un amour exacerbé de l'art de la viole, n'acceptant que le don de l'âme du musicien à son instrument et à son inspiration. Marin Marais est aussi la vie, l'amour du monde, le désir de plaire à autrui, et surtout aux femmes, tandis que lui n'est que repli sur soi et méditation musicale, empruntant le chemin du mysticisme inhérent, à ses yeux, à la création artistique. Entre les deux hommes, entre les deux artistes, un duel danse au fil des notes, au fil des dialogues que l'un a avec la mort et l'autre avec la vie, chacun tendu comme une corde prête à céder. Deux mondes s'affrontent: la douleur sombre, illuminant le reste d'une vie, du janséniste Sainte-Colombe, et l'aspiration joyeuse aux lumières d'une carrière brillante à la cour du roi, moteur d'une éternelle ambition, du jeune Marais pour lequel les plaisirs du monde sont indissociables à la vie d'artiste.
Au crépuscule de sa carrière, Marin Marais se souvient de l'austérité de son maître mais aussi de sa colère, cette colère due à l'intime blessure de son amour disparu. Marais regarde en arrière et voit la barque du temps, passeur de sensations, s'approcher de lui et lui montrer la vaine vanité des désirs de gloire et d'honneurs. Il comprend alors, la portée ineffable, du dialogue avec l'invisible, l'invisible qui sussurre une inspiration sublimée, il en saisit la tension et regarde, empreint d'une sourde mélancolie, ce qu'il a sans doute oublié de voir, d'aimer et d'exprimer.
Avec la magie des mots, la force romanesque que Quignard sait insuffler dans ses oeuvres, le lecteur est emporté dans le monde de la création, entre douleur et mystique, entre faim de reconnaissance et besoin d'ombre, et plonge avec délectation dans une atmosphère où la passion peut créer la lumière comme l'austérité. Comme d'habitude, Quignard excelle à pousser son lecteur dans ses ultimes retranchements avant qu'il ne puisse accéder à la beauté subtile du texte....et cela, on aime ou on n'aime pas; moi, j'adore!





Les avis de Karine :-)  Pitou   biblioblog  lilly  sentinelle  aBeille   lili   BOB 
ICI un très bel article d'Anne-Sophie Jacouty
Une lecture à savourer après celle du roman ici 

jeudi 28 octobre 2010

Petite pause

(photo trouvée sur le Net)

Demain, départ pour Bruxelles, pour un week-end avec les Parfumés! Rencontre entre forumeurs avides de lectures et de bonne chair...rires, échanges et joie en perspective.
Entre les expos à voir, les librairies à écumer et la Vieille Ville à visiter et les brasseries à essayer, nous n'aurons pas le temps de nous ennuyer.

La citation du jeudi #8

Un clin d'oeil au Festival du livre breton de Carhaix, qui se tiendra les 30 et 31 octobre 2010: un extrait du merveilleux livre de Louis Pouliquen, "Mon vieux grenier en Bretagne". Des textes d'une grande poésie, d'une splendide sensibilité, regorgeant d'amour pour la terre bretonne, ses traditions et sa culture. Un vrai trésor!
J'ai choisi, saison oblige, un passage du chapitre "Les vents"...les mois noirs "miz du" arrivent à grands pas chez nous.
"Tu vois, les vents, je me les mets dans la poche"
C'était donc cela le secret d'Yves, le mevel braz* de François-Louis, et ce n'était pas le talus qui nous protégeait comme je le pensais du haut de mes sept ou huit ans. Notre grand domestique possédait ce pouvoir extraordinaire de dompter les vents, de les apprivoiser ou, comme il le disait si bien dans son langage imagé de sorcier, de les mettre dans sa poche. (...) Le vent, les vents! Un des noms les plus riches de la langue française. Au singulier ou au pluriel. Le vent, les vents? C'est le souffle, l'air qu'on respire, la caresse de la brise, l'oxygène à pleins poumons. La vie! Mais c'est aussi la tempête, le typhon, la tornade, la bourrasque, la destruction, le désastre, la mort! En un seul mot, à la fois, la vie et la mort. Comme toute plante, en tout être, comme en chacun de nous, le premier souffle jusqu'au dernier. Vie et mort.
Les vents aux noms multiples. De A à Z. Rares, les lettres de l'alphabet qui n'en possèdent pas un. D'autan à zéphyr en passant par bise, cyclone, foehn, galerne, harmattan, khasmin, mistral, noroît, pampéro, sirocco, tramontane. Beaucoup d'entre elles se félicitent d'en posséder un pour se donner de l'air.
Les vents! Un de mes noms préférés. J'aime sur moi la brise dans la chaleur des midis d'été, maintenant à la ville comme autrefois au pas de mes chevaux. Comme toujours, j'adore la tempête des mois noirs dans les branches en agonie. J'adore la vie mais je me pelotonne souvent en moi pour entendre leurs voix qui me parlent de la mort.
Car les vents aux noms multiples ont tous leur langage à eux. A Xavier Grall qui fut mon condisciple et est un poète parmi les plus garnds, ils parlaient et lui soufflaient des mots pour les plus beaux des poèmes car les vents, mes mignonnes, il faut savoir les écouter. Il faut les comprendre pour les apprivoiser pour qu'ils ne deviennent pas ces bêtes déchaînées qu'il devient impossible de dompter." (p 112, 113 et 114)

mevel braz = grand domestique, c'est à dire le plus élevé dans la hiérarchie des ouvriers agricoles, dans une ferme.

mercredi 27 octobre 2010

De cape et de crocs

Venise, à l'époque du Grand Siècle et des doges, deux gentilshommes déambulent dans les rues au gré de leurs pas, l'un est espagnol, un fier hidalgo aux allures de loup, don Lope de Villalobos Y Sangrin, l'autre est français, rusé et beau parleur, aux airs de goupil, Armand Raynal de Maupertuis. Ils sont désargentés, prêts à tous les sacrifices pour se refaire; ils croisent la route d'un pauvre homme, en pleurs, se lamentant du rapt de son fils par les Turcs. N'écoutant que leur coeur chevaleresque, ils partent, contre rétribution, récupérer ledit fils sur la galère, non la chébèque turque où un coffre, dans lequel se trouve une bouteille contenant la carte d'une île mystérieuse, les attend pour le commencement d'aventures rocambolesques et picaresques pour la gloire et l'honneur. La gloire de défendre de justes causes et de belles demoiselles, l'honneur de battre pour des ideaux élevés, contre un affreux Mendoza, chevalier de l'Ordre de Malte et commadant sans vergogne d'une galère vénitienne, et un cynique Jean Sans Lune (tiens, tiens, cela ne vous rappelle rien?) qui n'aiment qu'une seule et unique chose...le pouvoir!
Un récit épique, drôlatique (la présence presque incongrue d'Eusèbe le lapin blanc apporte la note humoristique à l'histoire. D'ailleurs, qui est-il vraiment? d'où vient-il, Qu'a-t-il commis comme crime pour atterir enchaîné à un banc de galérien?), haletant et prenant, emporte le lecteur aux côtés des deux compères échappés au Roman de Renart: comment ne pas faire le lien entre Isengrin et l'altier Hidalgo, qui se retrouve toujours dans des situations cocasses, ou entre Renart et le gentilhomme français charmeur, joutant du langage comme de l'épée.
Ils entraînent le lecteur dans une chasse au trésor endiablée dans laquelle les références au théâtre classique foisonnent (entre "L'avare", "Roméo et Juliette", "les fables de la Fontaine" ou encore "Cyrano de Bergerac", les délices des souvenirs de lecture sont multiples et succulents!) ainsi que les imaginaires récurrents sur la ville engloutie d'Ys, les habitants de la Lune, les sélènites, le vaisseau fantôme du Hollandais volant, le Kraken, le mythe de Jonas et de la baleine ou les terres inconnues.
Une histoire héroïque, protéiforme, mêlant la farce, le roman, le théâtre, la science-fiction, les récits fondateurs, l'uchronie et la fable. Le tout est servi par un scénario efficace, qui se tient de bout en bout, un style jubilatoire et des illustrations extrêmement soignées, des couleurs incitant à l'ivresse de l'action ou à l'ombre du mystère.
"De cape et de crocs" est une série qui se dévore et se déguste avec un infini plaisir et offre une odyssée audacieuse aux amateurs du genre! J'attends avec impatience de lire les deux derniers tomes.



Les avis de epondyle  bladelor  doriane  bdsnew  mathieu 
le site  ici 

dimanche 24 octobre 2010

Dimanche en photo 15

(photographe: moi)

L'automne est là, avec des frimas matinaux et vespéraux, les jours diminuent, la nuit s'attarde, mes chats font leur toison hivernale, tandis que mes poules commencent leur mue et nous offrent, avec moins de prodigalité, le temps de se parer pour les jours sombres, leurs oeufs.
Hier, rien dans le nid....aujourd'hui deux trésors m'attendaient.
Les balades photographiques sont aussi chez Liyah .

La cuisine a une âme

Je sais que les mangas explorent tous les sujets mais je suis toujours étonnée lorsque je tombe sur des titres auxquels je ne m'attends pas du tout. Cette fois, j'ai été attirée par "Aya, conseillère culinaire" et embarquée la série sous le bras. Je m'attendais à tout, même (et surtout) au pire...et ce fut la déception: j'ai adoré l'argument narratif!!! Tout de suite, j'ai plongé dans l'univers, sans pitié, du monde de l'entreprise japonais; très vite, j'ai adhéré au concept de "conseiller culinaire": un restaurant qui ne tourne pas bien, hop! on fait appel au conseiller culinaire; un restaurant qui fait de l'ombre et qui est pris pour cible, hop! on klaxonne le conseiller culinaire...c'est un peu délirant mais pas du tout surréaliste (dans le quotidien des grandes administrations, on passe bien par un cabinet d'études pour déterminer les orientations à prendre...qui a dit que je persiflais??).
Diantre, va-t-elle nous expliquer, à la fin, en quoi consiste cet étrange métier de "conseiller culinaire": à redresser les restaurants proches de la faillite en mettant au service du client ses talents de cuisinier tout autant que ceux d'organisateur et d'architecte d'intérieur, sans omettre la pièce maîtresse du dispositif, l'arme absolue, le sens du goût, du mariage des saveurs et des couleurs.
C'est ainsi que le lecteur fait connaissance avec Aya, sévère et implacable executive women, flanquée de son apprenti Ippei Komaï passé expert en gaffes multiples et variées. Le tandem tient la route, fait rire, émeut et devient très vite des plus attachants. Grâce à lui, on découvre le monde extraordinaire du goût japonais, ses traditions culinaires, son art subtil du mariage des saveurs, son culte du raffinement au coeur de chaque plat, mais aussi le sens de l'honneur qui est loin d'être un vain mot.
Aya est une jeune femme déterminée, souvent implacable, parfois attendrie et surtout cachant une blessure derrière sa carapace de fille qui n'a jamais peur de l'affrontement et encore moins des tempêtes. Quelle peut être cette blessure qu'elle traîne avec elle, comme un carton bien encombrant malgré son invisibilité? Au fil des épisodes, l'auteur distille des éléments de la vie d'Aya, éléments qui éclairent sa personnalité et son caractère bien trempé...du coup, on lui pardonne beaucoup, surtout son talent indéniable pour pousser son apprenti dans ses ultimes retranchements, et on souhaite qu'elle trouve enfin la paix avec elle-même.
Quant à Ippei, il est attendrissant à souhait avec sa maladresse et surtout son grand coeur: il est prêt à aider, à écouter autrui et n'hésite pas à penser que sa chef est un vrai monstre....jusqu'à ce qu'elle débarque chez lui pour s'y installer, lui prenant son futon et le contraignant à déménager son matelas dans le placard. C'est qu'Aya dégage une aura certaine et exerce un magnétisme sur les représentants du sexe dit fort: ils l'aiment ou la haïssent, sentiments très proches et très ambivalents. Ippei n'échappe pas au béguin et se prend à éprouver de doux sentiments pour elle, sans oser se déclarer. Cependant, il est loin d'être l'insipide benêt de service: sa gentillesse, à la limite de la naïveté, apporte une bouffée d'oxygène au personnage, froid et altier, d'Aya qui s'ouvre aux autres et accepte sa sensibilité et son humanisme.
Sous des aspects qui pourraient paraître "gentillets", la série "Aya, conseillère culinaire" aborde des sujets de société intéressants: le combat, parfois inégal, contre les grandes multinationales prêtes à tout pour augmenter leurs pouvoirs, l'aide apportée à un jeune restaurateur pour qu'il devienne un grand spécialiste du udon (les méthodes d'Aya sont dignes de celles d'un sergent chef des Marines!), ou celle apportée à une starlette du petit écran afin qu'elle maîtrise l'art de la cuisine (le monde des média est tellement cruel que le moindre faux-pas entraîne la fin de la célébrité). Le lecteur a un aperçu de la tradition agricole (l'opposition des cultures maraîchères au naturel, goûteuse, avec celles de la production de masse, insipide) ou familiale (les mariages arrangés), mais aussi de la tradition culinaire (les multiples préparations de udon selon les régions) et la capacité étonnante des chefs japonais à intégrer la cuisine occidentale dans leur culture millénaire.
Le must de la série, à ne pas oublier: chaque épisode se conclue avec une recette dite "pour les nuls"....et cela donne vraiment envie de se lancer dans la cuisine japonaise!
"Aya, conseillère culinaire" est manga haut en couleur, foisonnant de saveurs, de flaveurs et d'odeurs...la sensualité de l'acte culinaire affleure à chaque page, le don de soi pour le plaisir de l'autre, la petite part de son âme que l'on offre pour un empire des sens jouant sur la gamme des couleurs et du goût. Une très belle découverte qui vaut toutes les émissions de cuisine!

Traduit et adapté du japonais par Julien Pouly




Les avis de krinein  bdgest



(3/6)

jeudi 21 octobre 2010

La citation du jeudi #7

Passage poétique qui ouvre et ferme le très joli roman jeunesse de Lesley Beake "Le chant de Bé" :

"La fumée dans les flammes
des feux du Bushmanland.
Le miel doré de l'herbe
parcourue par le chant du vent.
Le parfum sucré qui rôde dans l'air
et la douce et grise poussière
- avant que nos pas
aient été effacés."

dimanche 17 octobre 2010

Le temps des contes retrouvé

Il a quatorze ans, il s'est enfui de sa famille d'accueil où il avait trouvé refuge après la mort de ses parents, il est vagabond, déguisé en roi mage avec deux autres compagnons d'infortune. Il parcourt les routes de Saxe, pauvre comme Job, libre comme le vent et avide d'aventure. Il s'appelle Krabat et il entend une nuit, au cours d'un rêve à la lisière du cauchemar, un appel étrange lui demandant de venir au moulin de Koselbruch. Après un moment d'angoisse devant la vision de onze corbeaux, Krabat reprend le cours de son errance. Seulement, l'appel revient, toujours plus insistant, toujours plus déroutant, et distille l'envie d'en savoir plus dans le coeur de Krabat. Après tout, il n'est pas une mauviette et que risque-t-il, lui qui ne possède rien?
Aussi, prenant son courage et sa curiosité à deux mains, se rend-t-il au fameux moulin de Koselbruch, traversant une forêt sombre, un marais mélancolique et inquiétant pour arriver dans une clairière écrasée par l'imposant moulin.
Krabat est confronté à l'accueil déroutant du maître, répond à ses questions et se retrouve seul dans un dortoir, des vêtements au pied du lit, vêtements qui semblent faits pour lui, ce qui ne provoque en lui que de plus grandes interrogations. Le comble de la peur lui est offert, dans la nuit, par onze visages blancs de farine, le jaugeant puis l'acceptant comme des leurs. Les onze apprentis l'accueillent, alors commence pour Krabat un apprentissage oscillant entre lumière et ombre, entre pratique d'un métier et approche de la magie. Un engrenage embarque, alors, Krabat entre l'aide précieuse et amicale de Tonda, la malignité et la méchanceté de Lyschko, la gentillesse et la malice de Juro, le benêt qui cache son jeu, et l'amour d'une jolie jeune fille du village voisin, dans un duel avec le maître, un duel pour la liberté et le libre-arbitre.
Otfried Preussler raconte les affres de Krabat, ses expériences et ses combats, dans la langue des contes traditionnels, immergeant son lecteur dans l'atmosphère sombre, angoissante et pourtant lumineuse des récit dans lesquels légendes et initiation se mêlent pour sublimer les peurs enfantines et adolescentes. Les ingrédients utilisés rappellent les sombres et mystérieuses forêts des Frères Grimm: on y entre encore enfant et on en sort grandi d'avoir vaincu des créatures effrayantes et réussi les épreuves. Otfried Preussler souffle à la perfection le chaud et le froid sur le lecteur qui suit, avec émotion, les tribulations de Krabat, son évolution et sa marche vers l'âge adulte: l'apprentissage difficile sous les coups et la douleur des fardeaux à porter, les leçons dispensées par le Maître meunier, à la frontière de la magie et des rites initiatiques des corporations du Moyen-Age, les épreuves initiatiques de la nuit de Pâques ou du marché annuel, la chappe de plomb de la nuit du Nouvel An, qui voit les rivalités entre garçons-meunier poussées à leur paroxysme, paroxysme du à la frayeur d'un tribut à payer, tribut de sang et de mort, ou encore les tentatives désespérées pour échapper à l'enchantement du moulin.
"Krabat" est un conte, aux accents modernes, qui se déroule au coeur d'une Saxe déchirée par la Guerre de Trente ans, sombre et parfois cruel qui met en valeur la résistance à l'oppression et au mal, à l'appât tellement factice des honneurs, de la gloire et du pouvoir, car obtenus par la magie noire. Il est aussi le chemin initiatique d'un jeune garçon qui découvre le sens de l'honneur, de l'amitié et surtout la force et la beauté pures du sentiment amoureux, ce sentiment si doux, si précieux qu'il permet de vaincre un Maître cruel et redonner la liberté à ceux qui en ont été privés.
Je me suis régalée à lire "Krabat" qui m'a replongée dans les délices des contes, des rites et rituels issus des croyances enfouies au plus profond d'un patrimoine culturel qui lentement se perd dans les limbes d'une modernité où la superficialité engendre la perte de la mémoire collective. Lire "Krabat" avec des yeux d'adultes permet un retour sur soi, sur ses rêves et ses angoisses d'antan qui jamais ne meurent, qui seulement sont juste un peu oubliés.
A souligner le fait, non négligeable, que ce roman jeunesse allemand, longtemps attendu en langue française, a été traduit par Jean-Claude Mourlevat, autre grand nom de la littérature jeunesse.

Roman traduit de l'allemand par Jean-Claude Mourlevat

les avis de bibliobloguons  marylène
 

dimanche 10 octobre 2010

Dimanche en photo 14

L'automne est là! Une fenêtre de mon quartier en fait la preuve!

Les déambulations photographiques sont à voir chez Liyah !

Dimanche poétique # 27

J'ai entendu, cet après-midi, une chorale chanter "La chanson de Prévert" de Gainsbourg, et je ne peux résister à l'envie de partager les paroles de cette très belle chanson avec vous.

La chanson de Prévert

Oh! je voudrais tant que tu te souviennes
Cette chanson était la tienne
C'était ta préférée je crois
Qu'elle est de Prévert et Kosma
Et chaque fois "Les feuilles mortes"
Te rappelle à mon souvenir
Jour après jour les amours mortes
N'en finissent pas de mourir.

Avec d'autres bien sur je m'abandonne
Mais leur chanson est monotone
Et peu à peu je m'indiffère
A cela il n'est rien à faire
Car chaque fois "Les feuilles mortes"
Te rappelle à mon souvenir
Jour après jour les amours mortes
N'en finissent pas de mourir.

Peut-on jamais savoir par où commence
Et quand finit l'indifférence
Passe l'automne vienne l'hiver
Et que la chanson de Prévert
Cette chanson "Les feuilles mortes"
S'efface de mon souvenir
Et ce jour là mes amours mortes
En auront fini de mourir
Et ce jour là mes amours mortes
En auront fini de mourir

 Pour le plaisir d'entendre cette voix qui remue toujours les tripes!

Colis de l'automne

Le thème de ce troisième envoi était la découverte de nos régions respectives dans un esprit écologique. Après quelques péripéties, les colis ont été envoyés et reçus pour la joie du binôme que je forme avec Mirontaine.
Le colis étant arrivé lors de mon court séjour parisien, en semaine, et ayant eu une fin de semaine riche en réunions (hé oui, je n'arrête pas en ce moment) ce qui m'a fait oublier l'APN à l'école, ce n'est que le vendredi soir que j'ai pu, enfin, découvrir les trésors qu'il recelait.
Dès l'ouverture, les couleurs de l'automne des paquets (papier recyclé!) me disent qu'une deuxième vie s'offrira très vite pour les emballages (d'ailleurs, ils ont servi à un joli collage pour les MS!). Puis, c'est l'ouverture et la joie enfantine de découvrir ce que cachent les paquets! Que du bonheur: pour les yeux, les papilles, l'odorat (ahhh cette odeur chaleureuse du café!), et l'imaginaire! Le Nord révèle ses richesses dans la joie et la bonne humeur!

Mirontaine a expliqué le contenu des papquets

Après le déballage en douceur (il faut que le papier cadeau soit intact pour sa deuxième vie!)


les nourritures spirituelles



les nourritures terrestres



Le cadeau douceur: une très belle écharpe, à l'infinie douceur, qui accompagnera mon automne, lors de mes déplacements à vélo.

Un grand merci à la délicatesse de Mirontaine et à l'organisatrice de talent qu'est Bladelor!

Vive le RAT!!!

(Tableau de Lempika)

Pour moi, ce fut une première fois et, comme pour toutes les premières fois, l'émotion et l'approche de l'inconnu étaient intimidantes. 12 heures de lecture, cela semble facile et insurmontable en même temps! La veille, j'avais préparé mon petit tas de bouquins, dit à mon cher et tendre qu'il serait tout seul mais qu'il pouvait m'apporter de quoi me désaltérer pendant la journée.
10h du matin, le top départ est donné: je suis en pyjama, après un solide petit déjeuner et la lecture du journal (je n'ai pas eu le temps de faire mon sudoku), et je file au lit (ben oui, j'adoooore lire dans mon lit et j'adoooooore mon lit) au pied duquel m'attendent me lectures.
Je commence par "Le chant de Bé" (merci Lamia pour ce très beau roman!!!), un roman jeunesse reçu lors du swap Africalire jeunesse. Les pages défilent, les ambiances et le déroulé de l'imaginaire est en route. J'enchaîne par les 3 premiers tomes de la série BD "De cape et de crocs", hilarant et diablement bien léchée et bien écrite.
Première pause: il est 12h57. Un passage sur FB pour voir où en sont les copines et pour dire où j'en suis. 309 pages lues...je suis toujours en pyjama. Mon homme a préparé la bilig et les galettes: moment de détente autour d'une bolée de lait ribot et d'une galette oeuf/fromage. Il est 13h30, je reprends ma lecture.
J'ouvre "Krabat" d'Otfried Preussler et dès les premières lignes, l'enchantement du conte happe mon imaginaire et facilite ma lecture. J'avoue un micro sommeil de quelques minutes en attendant que mon mari vienne m'apporter mon thé à la cannelle: être allongée après manger, par un après-midi d'automne aux températures tropicales, est dangereux pour l'éveil!
Deuxième pause: 16h21. C'est là que l'on s'aperçoit qu'un RAT, même mini, est tout sauf une promenade de santé. Les cervicales commencent à me faire mal, je change souvent de position....et je suis toujours en pyjama. D'ailleurs, je renonce à m'habiller. Je descends dans le bureau où je fonce sur FB pour aller aux nouvelles. Les pages lues s'accumulent, l'ambiance est au beau fixe, les marathonienne de la lecture sont soutenues et se requinquent en papotant un peu. J'en suis à 632 pages lues.
Il est 17h17, je reprends le RAT avec "Tous les matins du monde" de Quignard. Huuummmm, un vrai régal ce roman! Puis je change d'ambiance et de style en reprenant le cours de la série "De cape et de crocs": l'intégrale, T 4/5/6 se dévore entre rires et bons mots accompagnent la tombée du jour. Les poules sont rentrées par l'homme de la maison qui est en mode "heureusement que je suis là!". Je me détends un peu: étirements, grignotage de pétales de maïs; ensuite les T 7 et 8 mettent une note joyeuse dans la nuit qui vient. Je regarde le réveil, il ne reste plus qu'une petite heure. Je bois un peu d'eau, je m'étire à nouveau, avant d'ouvrir "La reine des lumières", un roman jeunesse, encore, et une très sympathique uchronie. La fatigue est là et bien là, il devient difficile de se concentrer et malgré les changements de positions, mon petit popotin commence à me faire un peu mal. Allez, un petit verre d'eau ne peut pas faire de mal, hop, je me désaltère histoire de récupérer une concentration qui file en quenouille à mesure que l'échéance approche.
Il est 20h, je suis allée au bout de mon défi, je suis endolorie, un peu sonnée, ma tête est cotonneuse mais la joie est grande! 1043 pages lues et de très beaux voyages au coeur d'un imaginaire protéiforme.
Le mot de la fin? C'est mon mari qui le décroche, avec humour: "Le R.A.T c'est comme si tu étais malade (j'ai passé la journée au lit, en pyjama!) sauf que tu n'es pas malade."
Merci encore à Chresto pour cette organisation joyeuse et pleine de ressources. Merci aux supporters qui ont applaudi à chacune de nos lectures. Merci aux participants qui ont mis l'ambiance et le grain de folie plein d'humour, essentiel à ce genre d'évènement!
En un mot comme en mille: à l'année prochaine pour un nouveau R.A.T.

vendredi 8 octobre 2010

Demain, je n'y suis pour personne

Cette année, je participe au R.A.T, ou plus exactement au mini R.A.T (10h-22h). C'est avec un immense plaisir que j'ai empilé mes provisions choisies dans mes bibliothèques. Aussi, demain serai-je aux abonnées absentes...l'homme de la maison a pour consigne de refouler les visiteurs, de répondre au téléphone et de dire que je ne suis pas là. Pour faire simple, demain il est célibataire!


jeudi 7 octobre 2010

La citation du jeudi #6

Dans mes souliers, le Père Noël avait déposé le deuxième roman traduit en français de l'écrivain écossais Dominic Cooper. J'avais été subjuguée par la force romanesque et évocatrice de son écriture avec "Le coeur de l'hiver", la deuxième rencontre fut aussi belle et aussi forte. "Vers l'aube", roman d'une quête à corps perdu, de l'errance et de l'hymne à une nature d'une beauté à couper le souffle. La Nature accompagne la longue marche du héros, Murdo Munro, scandant ses émotions et ses tourments intimes. Je partage, ce soir, avec vous, le premier paragraphe du "road movie" pédestre d'un homme perdu dans ses conflits intérieurs.
"-Et maintenant prions.
La brise légère qui tourbillonnait et balayait en douces rafales les petites hauteurs du Beinn an Eoin était venue d'au-delà du grand large. Ses mouvements semblaient fortuits et sans pertinence en comparaison des vies ordonnées que les habitants de l'île menaient dans les vallées en contrebas. Ses origines et ses intentions étaient obscures; car elle était poussée par une force qui ne devait rien aux créations des hommes. Et c'était seulement la terre, avec ses joues balafrées de roche et de bruyères, de mousses charnues et d'herbes flexibles, seulement cette masse meurtrie et l'attention muette mais indéfectible du lointain soleil qui s'étendaient sous l'avancée du vent à travers les collines de l'île. Car les gens eux-mêmes, éloignés de leurs anciennes intuitions et de leurs passions inavouées par un monde nouveau et plus rationnel, avaient depuis longtemps détourné le regard et étaient maintenant absorbés par des choses plus proches de leurs vies." (p 13)

mercredi 6 octobre 2010

Petites pensées philosophiques

Il n'y a pas que les grandes personnes à posséder la sagesse: les caribous aussi font preuve d'observation, d'interrogation profonde et de sages réponses.
Dans la vie, on rencontre beaucoup de gens différents: des timides, des extravertis, des bizarres, des extravagants, des "dans la lune", des pragmatiques. On croise aussi des couleurs de peaux différentes, des gens venus de pays inconnus, voire des extra-terrestres!
Dans la vie, on croise aussi des copains qui veulent toujours gagner et ne jamais perdre, des copains égoïstes qui ne se préoccupent que de leur nombril.
Dans la vie, il y a ceux qui courent vite et évitent les ennuis jusqu'à un certain point (si on ne regarde pas où on va, on se cogne contre un arbre), et ceux qui vont à leur rythme.
Dans la vie, on croise parfois des bagarreurs qui n'aiment qu'une chose: commander et taper pendant que les autres suivent sans rien dire....mais la guerre n'a jamais rien résolu.
Dans la vie, il y a ceux pour qui une taupinière devient très vite une montagne infranchissable (parfois, la vie est trèèèès compliquée) et ceux qui aiment rêver, prendre leur temps, ou encore ceux qui aiment le désordre (ou qui n'ont pas le sens du rangement) sans pour autant s'y perdre.
Dans la vie, la variété des rencontres fait que la conclusion à laquelle on arrive est "On est tous pareils" derrière les masques qui cachent ce que l'on souhaite cacher.
"Tous pareils" est un album exquis tant par le contenu intense de son propos que par l'illustration faite de collages en tissu et de dessins découpés. Les expressions des caribous sont parlantes et empreintes de tendresse si bien que les enfants s'identifient très vite aux petits héros. Grâce à cet album, on peut aborder, en classe ou dans le cercle familial, les questions existentielles que se posent nos tout-petits, en leur apportant des réponses à leur hauteur: des réponses au sujet des rapports entretenus avec les autres ou encore des réponses au sujet du ressenti, indicible, qu'ils peuvent avoir vis à vis de notre société. Le tout sur le mode drôlatique de l'humour et de la dérision! Un vrai petit bijou (pour lequel mon coeur penchait pour le Prix des Incorruptibles)

(Merci Gawou!!!)

Les avis de papier de soie   Gawou 



(15/24)

dimanche 3 octobre 2010

Dimanche en photo 13

Cet après-midi, je suis allée à la Foire aux Courges de Pédernec. De jolis étals colorés par les rondeurs multicolores des courges exposées. J'ai fait une partie de mon stock d'hiver.

Dimanche poétique # 26

Aujourd'hui, le temps pluvieux de ce début d'automne breton, me donne envie de partager avec vous ce poème de Guillaume Apollinaire:



Automne



Dans le brouillard s’en vont un paysan cagneux
Et son bœuf lentement dans le brouillard d’automne
Qui cache les hameaux pauvres et vergogneux
Et s’en allant là-bas le paysan chantonne
Une chanson d’amour et d’infidélité
Qui parle d’une bague et d’un cœur que l’on brise
Oh ! l’automne l’automne a fait mourir l’été
Dans le brouillard s’en vont deux silhouettes grises.

(in "Alcools")