mardi 23 février 2010

La femme dans le miroir

Adrien Gascoing est veuf depuis plusieurs mois et se remet lentement de cette douleur lancinante qui l'étouffe, tente d'oublier le vide qui le ronge. Lentement, il reprend ses habitudes de travail: les traductions des poèmes d'Hafez l'entraîne dans les méandres silencieux de la recherche et de la rêverie.
Comme il a décidé de revivre, Adrien ouvre sa porte à une amie du couple, Léna, restauratrice de tableaux, qui l'entraîne au restaurant puis dans une promenade digestive au cours de laquelle il ne se sent pas bien (le grand air après ces mois de réclusion lui fait tourner la tête). C'est ainsi que nos deux protagonistes se retrouvent dans l'atelier de Zéphyrin, galiériste spécialisé dans la peinture des XVIè et XVIIè siècles, où Adrien se requinque avec un thé au citron. Remis de ses émotions, il déambule dans l'atelier et s'arrête devant deux vanités hollandaises dont le portrait d'une femme, dont le visage se reflète dans un miroir, réalisé par Pieter Haussen, cette femme, d'une grande beauté, est Cornélia, l'épouse du peintre. Quelques temps plus tard, Adrien aperçoit une publicité conviant à une exposition d'antiquités dans une galerie d'art, la Galerie du Palais; sans trop savoir pourquoi, il s'y rend et, ô surprise, tombe en arrêt devant un tableau qui le laisse sans voix: un nu féminin peint par un obscur artiste suisse, Arnold Burckhardt, daté de 1925. Le détail qui interpelle Adrien est le modèle dont la ressemblance avec la Cornélia de la vanité de Pieter Haussen le trouble au plus haut point. Adrien l'achète, impulsivement, comme s'il pressentait que cette rencontre allait bouleverser son quotidien: comment se peut-il qu'une telle ressemblance, à trois siècles d'intervalle, puisse être fortuite? Adrien se persuade qu'il y a un mystère à découvrir et aidé, avec un rien de moquerie, par son amie Léna, il se lance dans une enquête peu banale. C'est ainsi qu'il rencontrera le fantôme d'un lettré autodidacte et thanatopracteur, Edouard Hérembourg, mari défunt de sa voisine de palier, lecteur assidu du Livre des morts et passionné de toutes les techniques d'embaumement (de l'Egypte ancienne à la Chine), puis fera la connaissance de Jean-Félicien Virouleau, auteur d'une thèse inattendue "Pieter Haussen: Memento Mori dans un monde où il y a tant à découvrir." Et si ces femmes n'en faisait qu'une? Si Cornélia était réapparue d'entre les morts pour devenir éternelle? Et si Pieter Haussen avait réussi là où Orphée avait échoué, c'est à dire faire revenir du Royaume des Ombres, sa Cornélia tant aimée?

Que dire de ce roman sinon qu'il est plaisant à lire, voire prenant à partir du moment où l'histoire se met vraiment en route. L'écriture est agréable, parfois poétique mais manque de conviction: les personnages sont un peu convenus, leur évolution attendue et j'ai éprouvé des difficultés à avoir de l'empathie pour eux. La balade est belle, entre explications sur les vanités qui firent florès au XVIIè, siècle des grandes aventures maritimes dans le sillage de la mythique Compagnie hollandaise des Indes orientales, et la course au déchiffrage des pigments utilisés par les artistes peintres selon leur époque. On apprécie les escapades au coeur de la poésie persane, le raffinement de cette langue fleurie et délicate....mais cela ne suffit pas à faire une lecture enthousiaste de ce roman. Pourtant il possède des ingrédients qui ont tout pour me plaire: l'évocation de la peinture flamande, la poésie persane et arabe, l'Egypte ancienne et les mythes tel que celui d'Orphée et Eurydice, hélas, la mayonnaise n'a pas pris.




Je remercie pour cette évasion Livr@ddict et les éditions Robert Laffont.

Les avis de pauline  belledenuit   krapette   poet24   caro   hécate  
Interview de l'auteur ici 


Femme à sa toilette 1633 (Jan Miense 1610-1668)

NB: le tableau de la couverture du roman est "Allégorie de la mort ou Vanité" de Trophine Bigot, XVIIè siècle

5 commentaires:

L'or des chambres a dit…

Les déceptions font partie de notre quotidien de lectrices... Mais ce n'est pas grave puisqu'il y a aussi les perles... Le tableau sur la couverture est magnifique en tout cas ! Bonne soirée !

Anne Sophie a dit…

dommage que tu n'ais pas aimé...

esmeraldae a dit…

un mauvais souvenir de lecture!

soukee a dit…

Mince ! Moi qui zieutais vos avis pour éventuellement me l'acheter... Je vais réfléchir dans ce cas...

Katell a dit…

@l'or des chambres: certes, mais là ça fait deux déceptions à se suivre ;-)
Hélas, la superbe couverture, qui m'avait attirée, ne rattrape rien du tout :-(
@anne-sophie: oui, dommage. Tu l'as apprécié toi?
@esmeraldae: Tiens, ton ressenti semble être pire que le mien!
@soukee: Si tu ne parviens pas à le trouver en bibliothèque, je epux te le prêter sans problème ;-)