jeudi 18 février 2021

Belgravia, un univers impitoyable?

 


Nous sommes en juin 1815, à Bruxelles. Napoléon menace la coalition formée par les grandes puissances européennes, Angleterre, Prusse et Autriche.

Bruxelles vit au diapason des armées que l'intendance doit ravitailler sans cesse. Les plus grands noms de l'aristocratie anglaise y vivent et continue à organiser bals et soirées au cours desquels des romances entre jeunes et beaux officiers et jeunes filles de bonne famille éclosent.

Sophie Trenchard et le vicomte Edmund Bellasis, fisl unique des Comtes de Brokenhurst, vivent ce qui pourrait s'apparenter à une amourette au grand dam d'Anne, mère de la jeune fille. Elle sait combien la société peut devenir cruelle avec une jeune fille de la bourgeoisie.

Le 15 juin 1815, la Duchesse de Richmonds donne son bal devenu légendaire. Grâce à l'entregent d'Edmund, la famille de bourgeois Trenchard est invitée à la fête à la grande joie de Sophie et de son père. Au cours du souper, un messager provoque le départ des fringants officiers pour le front : Napoléon et ses armées arrivent.

Quelques jours plus tard, la plupart des jeunes officiers présents au bal périssent sur le champ de bataille de Waterloo.

Ces événements auront d'importantes conséquences deux décennies plus tard.

La vie de Sophie Trenchard, la délicieuse fille du responsable de l'intendance du duc de Wellington, James Trenchard, et de sa famille bascule quand elle comprend qu'elle est enceinte et qu'elle a été dupée par son amant qui organisa un faux mariage. Elle accouchera, sous un nom d'emprunt, loin de Londres et le bébé, prénommé Charles, sera confié à un pasteur, Mr Pope. Une chape de plomb recouvre le secret de Sophie, morte en couche.

Un quart de siècle passe, James Tranchard a participé à la construction du quartier londonien très huppé de Belgravia Square où réside le gratin aristocratique anglais et sa fortune est bien établie. Il aspire à rejoindre les cercles de la noblesse et s'y prend avec beaucoup de maladresse.

Quant à Oliver, son fils, son intérêt pour les affaires financières de son père est inexistant : seul lui importerait la gestion du domaine campagnard acquis par sa mère.


Tout bascule lorsqu'Anne est invitée à prendre le thé chez une dame de la noblesse et rencontre la Comtesse Caroline de Brokenhurst, la mère d'Edmund. Anne Trenchard comprend le désarroi de la Comtesse qui a perdu son unique enfant quand elle lui dit qu'après eux il ne restera personne. Anne sait que le vicomte a laissé une part de lui-même en ce monde : le fils de Sophie. Dès lors le dilemme naît: la Comtesse doit-elle ignorer qu'elle a un petit fils ? Rapidement Anne prend la décision de lui dire la vérité.

Commence alors le ballet des faux-semblants, trahisons, bassesses, mensonges, jalousie, colère, petites et grandes tromperies. D'autant plus que Charles Pope se retrouve propulsé sur le devant de la scène quand il reçoit l'appui financier de la Comtesse qui l'exhibe lors d'une soirée.


Vous avez aimé « Downton Abbey » ? Vous aimerez également « Belgravia ». Dans le premier roman, le monde des domestiques était mis en avant, alors que dans le second, il passe au second plan. L'intrigue de ce roman, qui est paru, de manière originale, en feuilleton dans la presse, renouant ainsi avec une tradition du XIXè, se déroule essentiellement dans les salons aristocratiques.

Cela nous vaut une belle galerie de personnages aussi bien attachants qu'exécrables. Entre l'héritier Bellasis qui ne recule devant rien pour parvenir à ses fins, les domestiques que l'on corrompt pour un peu d'argent, une noblesse imbue d'elle-même, et les petites jalousies provoquées par la maladresse d'un père, le lecteur est au cœur d'un récit, convenu certes, plaisant et bien rythmé. On sent la plume du scénariste.

« Belgravia » dresse le portrait d'une époque victorienne riche des débuts de la révolution industrielle et de la restructuration de Londres : aménagement de quartiers aisés, huppés pour la haute société et la grande bourgeoisie, celui des quais sur la Tamise et surtout la valorisation du quartier de la City.

« Belgravia » est également le roman des tensions entre la noblesse désargentée, refusant de réduire la voilure, et la bourgeoisie fortunée grâce à son esprit d'entreprise et d'audace... la première rechignant à ouvrir ses cercles à la seconde. Un point leur est commun : les secrets qu'il ne fait pas bon de déterrer et les amours contrariées.

Et le menu peuple dans tout cela ? On ne l'entrevoit que lors de l'escapade d'Oliver à Manchester quand il visite la filature de Charles Pope. Par contre, les domestiques, même s'ils n'ont pas la part belle, ont une influence dans les intrigues. Certains se compromettent car ne se sentent pas redevables envers leur employeurs, d'autres leur sont fidèles et ne diront rien qui puisse leur nuire.


« Belgravia » est une agréable lecture et un plaisant séjour à l'époque victorienne au cœur de Londres. Un joli voyage immobile.

Traduit l’anglais par Valérie Rosier et Carole Delporte

Quelques avis:

Babelio On a lu  Le livre d'après  My little big world  Les papiers de Mrs Turner  Un chocolat dans mon roman

Lu dans le cadre de: "Une année en Angleterre"




3 commentaires:

rachel a dit…

Effectivement cela doit etre bien plaisant...toute une saga...;)

Katell a dit…

Plaisant à lire et à regarder. La série est bien faite.

Lou a dit…

Je n'ai pas encore lu la série et je n'ai pas non plus lu Julian Fellowes alors que j'ai au moins un de ses livres dans ma PAL. Voilà un billet qui me rappelle à quel point cela devrait me plaire !