lundi 22 juin 2009

Et si c'était demain?


Nous sommes en 2080, c'est à dire demain: la planète est devenue inhospitalière, son environnement pollué par toutes les diverses erreurs et la faiblesse de l'humanité; les zones habitables ne se trouvent que sous des dômes, plus ou moins importants, et un seul moteur existe pour faire avancer le monde...l'indice de consommation. Le niveau de vie et le niveau d'habitation, de travail,de chaque citoyen est tributaire de son niveau de consommation: plus il achète plus il a accès à divers avantages, au confort ou aux facilités de déplacement. La reconnaissance sociale s'effectue par le prisme de la consommation, la réussite sociale se calque sur cette échelle aussi diabolique que désespérante car il ne suffit pas d'être riche en ce bas-monde, il faut aussi dépenser pour vivre...le tout sous la houlette, inquiétante et paternaliste, du Konsomat, consortium nébuleux de technocrates aux pleins pouvoirs. Bienvenue dans le monde merveilleux de l'anticipation: un voyage étonnant attend le lecteur au détour des mots, des images et des personnages.
Maximilien Krell est un citoyen d'un des dômes, il vit à Paris, son métier n'est pas vraiment apprécié: il est régulateur! Maximilien est un des bras armés du Konsomat: il exécute des contrats, il est tueur à gages en quelque sorte. Il porte une arme, il peut entrer chez n'importe qui avec son ordre de mission, il est l'ombre d'un pouvoir opaque, il est l'angoisse de tout citoyen qui ne donne pas satisfaction au système et cet homme a pourtant un côté fleur bleue: il est amoureux, désespérement amoureux, de la belle Wendy Carlson, superbe plante, aux yeux bleus ravageurs, aux jambes interminables, à la longue chevelure blonde (forcément), ange issu d'une caste supérieure! Comment parvenir à la séduire sans changer de caste? En augmentant sa consommation...mais difficile de choisir quand on possède quasiment tout!
La vie de Maximilien connaît une autre dimension lorsqu'un jour, après avoir réalisé un contrat, deux hommes l'attendent chez lui, envoyés du puissant Konsomat où un contrat, qui ne peut être refusé, lui est proposé avec instance par Gregory Elb: l'assassinat de trois figures terroristes, membres du réseau Ikar, fer de lance de la contestation du système Konsomat.
Commence alors un autre récit, un thriller haletant qui mène Maximilien, et le lecteur à sa suite, dans les méandres des castes, des cercles sociaux, des cloaques, des groupuscules sur lesquels règnent des gourous proches de la folie. Plus Maximilien s'éloigne des niveaux supérieurs, plus il s'approche des portes de l'enfer, celui qui reçoit les expulsés du système et les offre en pâture aux multiples avatars bactériologiques plus mortifères les uns que les autres. On se retrouve dans une ambiance digne de Blade Runer, une atmosphère où le sombre des ruelles se mêle à l'humidité constante d'une pluie nocive. On tremble, on suit avec une exitation mêlée d'angoisse les déambulations de Maximilien, ce héros proche de la vraie vie, un héros qui pourrait être tout un chacun car ses défauts sont une partie de ses qualités.
Au fil de l'enquête, Maximilien se trouve assailli par des images récurrentes lors de ses sommeils agités: une femme brune, très belle, semble lui parler, l'appeler. Peu à peu, l'emprise de cette vision l'amène à s'interroger un peu plus sérieusement sur le Konsomat, sur l'apparence de Wendy, plus factice que sincère, et à se pencher sur les fondements de la contestation terroriste....et si l'Ikar n'avait pas totalement tort? Et si le toujours plus prôné par le Konsomat n'était qu'un miroir aux alouettes, un lacis de désirs instillés pour que les icares qui sommeillent en tout homme n'entendent pas l'appel de la liberté? Et si Maximilien n'était pas réellement Maximilien? Et si la liberté ne résidait pas dans le fait de raccrocher son arme pour se bâtir une autre vie en accord avec ses aspirations?
Ex nihilo est un roman d'anticipation palpitant, qu'on lit quasiment d'une traite tant est criante de justesse la vision socio-politique de l'auteur qui n'a pas eu à forcer le trait de notre actuelle société. D'ailleurs, cette anticipation apparaît effrayante dans le sens où elle semble terriblement de l'ordre du possible: on sait que l'on nous tend un piège et malgré tout on ne parvient pas à l'éviter!
Ex nihilo est aussi le récit d'un complot terrifiant par sa froideur extrême: l'humanité semble ne plus être de mise pour les hommes aux commandes d'un monde perdu dans un engrenage infernal. Une vision de la vie glaciale où seul le profit rentre en ligne de compte, simple donnée mathématique dénuée de tout sentiment.
Un roman à découvrir pour les amateurs du genre!




Un aperçu ICI

7 commentaires:

Michel a dit…

cela semble très interessant (quel taux?) tout ça.

rachel a dit…

oh oui didonc je note....sympa ce livre...

emmyne a dit…

C'est noté aussi !

Flo a dit…

Ce livre me rappelle le roman de Jean-Marc Ligny "Aqua". Roman également d'anticipation, dont le thème principal est la lutte pour l'eau.

Gambadou a dit…

c'est pas gai tout ça !

Katell a dit…

@michel: le roman est confondant de réalisme. On se croirait presque dans l'actualité!
@rachel: ce roman mérité d'être plus connu!
@emmyne: bien!!
@flo: je note ta référence. Je suis très sensible à tout ce qui touche de près ou de loin à l'eau ;-)
@gambadou: je suis bien d'accord avec toi mais il serait inutile de se voiler la face...hélas, c'est ce qui nous guette si on laisse d'autres décider pour nous!
L'auteur fait une projection à partir des réalités d'aujourd'hui et parvient à dresser un portrait d'une future société sans vraiment avoir besoin de forcer le trait.

Catherine a dit…

Dommage que tu ne participes pas au défi 'Littératures de l'imaginaire sur les 5 continents'...