La Varienne est l'idiote du village et Luce est sa petite fille, fruit d'une triste rencontre du hasard. La Varienne est et c'est tout: elle ne montre aucune émotion, n'a aucun geste de tendresse, elle est tout simplement aux côtés des choses, des êtres et du monde.
Luce vit en osmose avec La Varienne un quotidien qui pourrait sembler d'une étouffante monotonie, une vie où les heures sont scandées par les gestes machinaux de cette dernière. La mère et la fille vivent une relation fusionnelle dans le silence et la lenteur des jours. Mais l'école vient bouleverser leur vie et perturber leurs repères avec la violence silencieuse d'une normalité qui n'a pas de sens.
L'institutrice embarque Luce dans l'univers scolaire, le monde de l'écriture et des mots, des images et de la confrontation avec l'autre, l'autrement et l'ailleurs. Autant de nouveautés que d'obstacles à contournés pour entrer dans ce nouveau monde proposé à Luce. Mademoiselle Solange souhaite "arracher Luce à l'ignorance car le savoir est obligatoire". Mais cela peut-il se faire sans heurt, sans blessure, sans pleurs et surtout sans peur? Comment peut-on mesurer la douleur de La Varienne devant le cahier et les crayons de Luce, face à Luce qui recopie maladroitement encore les lettres, les signes apris en classe? Comment peut-on mesurer le gouffre qui s'ouvre sous La Varienne qui voit la possible envolée, loin d'elle, loin de ses bras et de son coeur, sa petite Luce, son trésor qu'elle ne nomme jamais, qu'elle ne dit jamais, qu'elle garde enfoui dans son intériorité, indicible amour maternel parce qu'elle ne possède pas le langage des sentiments?
Très vite Luce prend la mesure de tout ce qui la sépare des autres et du monde qui commence au portillon du jardin, très vite elle choisit son chemin, celui qui la relie à sa mère, muette, frustre, sombre et qui l'aime éperdument. Le cartable reste fermé au retour de l'école puis le banc à l'école restera vide: la fièvre, celle du refus du monde, celle du refuge vers le giron protecteur, alite Luce.
Lorsqu'elle revient au monde, Luce ne retourne pas à l'école, Luce ne reprend plus le cahier ni les crayons....seulement une aiguille, qui fait mal au début, très mal au point de faire couler le sang. L'aiguille devient peu à peu crayon, pastel, grâce aux fils colorés qui y entrent et qui laissent de jolies traces sur le petit carré de lin blanc de Mademoiselle Solange. L'aiguille, le fil et le tissu, nouveaux cahier et crayons d'une fillette dont l'ignorance peu à peu s'estompe, nouveaux instruments d'un savoir qui se construit dans un imaginaire inattendu.
Le texte de Jeanne Benameur est une extraordinaire beauté, d'une force telle que l'on touche du doigt la violence faite à ces deux figures féminines, ces deux "demeurées" qui ont une relation muette au monde. L'écriture d'une grande sobriété est précise et fait ressentir au lecteur, avec intensité, que si l'on ne possède pas la parole pour dire le monde cela ne signifie pas qu'on ne puisse le vivre passionnément, intensement au plus profond de son intériorité. "Les demeurées" est un roman qui ne laisse pas indifférent et dont on ne sort pas sans avoir le coeur étreint et de longs frissons d'émotion.
C'est le premier roman de Jeanne Benameur que je lis, "Présent?" offert par Martine m'attend pour une très prochaine lecture, et je suis sous le charme absolu d'une très belle écriture tout en poésie et subtilité où la tendresse et l'émotion sont en filigrane.
Luce vit en osmose avec La Varienne un quotidien qui pourrait sembler d'une étouffante monotonie, une vie où les heures sont scandées par les gestes machinaux de cette dernière. La mère et la fille vivent une relation fusionnelle dans le silence et la lenteur des jours. Mais l'école vient bouleverser leur vie et perturber leurs repères avec la violence silencieuse d'une normalité qui n'a pas de sens.
L'institutrice embarque Luce dans l'univers scolaire, le monde de l'écriture et des mots, des images et de la confrontation avec l'autre, l'autrement et l'ailleurs. Autant de nouveautés que d'obstacles à contournés pour entrer dans ce nouveau monde proposé à Luce. Mademoiselle Solange souhaite "arracher Luce à l'ignorance car le savoir est obligatoire". Mais cela peut-il se faire sans heurt, sans blessure, sans pleurs et surtout sans peur? Comment peut-on mesurer la douleur de La Varienne devant le cahier et les crayons de Luce, face à Luce qui recopie maladroitement encore les lettres, les signes apris en classe? Comment peut-on mesurer le gouffre qui s'ouvre sous La Varienne qui voit la possible envolée, loin d'elle, loin de ses bras et de son coeur, sa petite Luce, son trésor qu'elle ne nomme jamais, qu'elle ne dit jamais, qu'elle garde enfoui dans son intériorité, indicible amour maternel parce qu'elle ne possède pas le langage des sentiments?
Très vite Luce prend la mesure de tout ce qui la sépare des autres et du monde qui commence au portillon du jardin, très vite elle choisit son chemin, celui qui la relie à sa mère, muette, frustre, sombre et qui l'aime éperdument. Le cartable reste fermé au retour de l'école puis le banc à l'école restera vide: la fièvre, celle du refus du monde, celle du refuge vers le giron protecteur, alite Luce.
Lorsqu'elle revient au monde, Luce ne retourne pas à l'école, Luce ne reprend plus le cahier ni les crayons....seulement une aiguille, qui fait mal au début, très mal au point de faire couler le sang. L'aiguille devient peu à peu crayon, pastel, grâce aux fils colorés qui y entrent et qui laissent de jolies traces sur le petit carré de lin blanc de Mademoiselle Solange. L'aiguille, le fil et le tissu, nouveaux cahier et crayons d'une fillette dont l'ignorance peu à peu s'estompe, nouveaux instruments d'un savoir qui se construit dans un imaginaire inattendu.
Le texte de Jeanne Benameur est une extraordinaire beauté, d'une force telle que l'on touche du doigt la violence faite à ces deux figures féminines, ces deux "demeurées" qui ont une relation muette au monde. L'écriture d'une grande sobriété est précise et fait ressentir au lecteur, avec intensité, que si l'on ne possède pas la parole pour dire le monde cela ne signifie pas qu'on ne puisse le vivre passionnément, intensement au plus profond de son intériorité. "Les demeurées" est un roman qui ne laisse pas indifférent et dont on ne sort pas sans avoir le coeur étreint et de longs frissons d'émotion.
C'est le premier roman de Jeanne Benameur que je lis, "Présent?" offert par Martine m'attend pour une très prochaine lecture, et je suis sous le charme absolu d'une très belle écriture tout en poésie et subtilité où la tendresse et l'émotion sont en filigrane.
13 commentaires:
Pas réussi du tout à entrer dans ce texte!:(
Tout comme toi j'ai été très emballée par ce livre, l'histoire, l'écriture, çà m'a beaucoup touchée.
hum!!! je ne sais pas encore si je le note pourtant ta dernière phrase me plaît énormément!
@cathulu: les sensibilités sont aussi différentes que les blogueurs...ma rencontre avec Thorarinsson n'a pas été concluante ;-)
@aifelle:effectivement, l'écriture de Jeanne Benameur est tout en sensibilité aussi l'émotion touche-t-elle vite le lecteur.
@lael: céder à la tentation n'est guère dangereux ici...folio à 2€, prix ridicule pour un si beau texte :-D
Il attend sagement dans la PAL. Ton billet enthousiaste devrait lui faire remonter quelques niveaux ;)
Si tu es tombée sous le charme des "demeurées", il faut que tu lises également "laver les ombres", sorti en 2008. Il s'agit aussi d'une relation mère-fille magnifique...
Bon dimanche Katell !
Moi aussi j'ai découvert cet auteur avec ce roman et j'avais adoré!
Je n'ose pas lire ce roman... j'ai peur de voir certains trucs idéalisés alors que quand tu en vois "en vrai" des situations dans le genre, c'est beaucoup moins drôle dans la réalité... Bref, je parle à travers mon chapeau vu que je ne l'ai pas lu... mais bon... un jour, peut-être, vu que tout le monde aime...
Une très belle lecture en effet :)
Un petit bijoux ! J'ai aimé aussi, une belle lecture, une belle surprise je m'attendais vraiment pas à une telle histoire.
J'ai beaucoup aimé la lecture de ce roman qui m'a émut aux larmes parfois... Bises
Voilà un petit livre qui regorge d'émotion, je l'ai beaucoup aimé comme "Présent ?" que tu t'apprêtes à lire ! ;-)
Je te conseille également d'en parler à Ameleia, qui tient son blog ici : http://ameleia.over-blog.com
Je crois qu'elle a aussi écrit un article sur Laver les ombres... du même auteur.
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