1788, le jeune Pierre Castilhon, revient à Cete (Sète) après l'obtention de son diplôme en droit. Son rêve de devenir un ténor du barreau parisien titille son imagination et stimule son ambition, mais, en cette veille de grand chamboulement d'une société qui lentement se meurt, les honneurs et les places en vue ne sont guère pour les roturiers, fussent-ils issus de la riche bourgeoisie. Lorsque Pierre retrouve les siens, Cete est perturbée par les sabotages des salines et la découverte du corps d'un des édiles de la cité. Qui peut bien en vouloir à ce point au commerce du sel, essentiel à l'économie de la région? Par hasard, un soir, Pierre est témoin, invisible, d'un échange entre deux hommes, dont un jeune noble, au sujet d'une conspiration orléaniste afin de mettre à mal l'autorité, déjà bien vacillante, du roi. Grâce à l'entregent de son père, Pierre est introduit dans les allées du pouvoir languedocien et rejoint le cabinet d'un grand avocat de Montpellier, Bonnier d'Alco, place qui lui permet d'entrer en contact avec l'Intendant du roi et participer aux Etats Généraux du Languedoc.
Pierre Castilhon se trouve propulsé dans un rôle, bien éloigné de ses aspirations et décalé: il devient, sous l'autorité de l'Intendant, commissaire royal chargé d'enquêter sur les sabotages, les meurtres qui y semblent liés et pourquoi pas démasquer les comploteurs. A sa suite, le lecteur, regarde les derniers feux d'une société qui n'a que quelques mois à vivre: entre les nobles qui ne veulent pas céder une once de leurs privilèges, le haut-clergé arc-bouté sur ses prérogatives et un pouvoir outrancier, et un Tiers-Etat qui n'en peut plus de courber l'échine sous les impôts, le labeur, qui ne supporte plus de ne pas pouvoir accéder aux postes décisionnels; le climat dans cette région languedocienne est lourd de menaces, de rancoeurs et de violence qui ne demandent qu'à exploser.
J'avoue ne pas avoir été transportée par l'écriture de François Kuss qui, malgré un énorme travail de documentation, de qualité, n'a pas réussi à me faire voyager, réellement, au coeur d'une région et d'une époque qu'il aime (c'est évident dans ses descriptions). Il y a du potentiel, on le sent au fil de la lecture, lorsque, enfin!!!, il se lâche un peu et s'extirpe du didactisme historique....c'est à dire dans le dernier quart du roman. Dommage qu'il ait fallu tout ce temps pour que l'intrigue, l'action, s'emballent un peu, qu'il y ait un rythme de narration et que les personnages prennent un tantinet de consistance romanesque. Du coup, "Le complot des salines" rejoint, hélas, la cohorte des romans régionaux qui se lisent peut-être facilement mais ennuient un peu le lecteur. L'ambiance est en latence, la psychologie des personnages succinte; aussi, la lectrice que je suis, a-t-elle eu la désagréable impression d'une écriture de surface, de premières gammes longuettes, alors que son appétit était aiguisé par la quatrième de couverture faisant espérer une enquête ébouriffante dans le dédale iodé des salines. Il y a bien eu quelques coups tordus, un groupe de pirates patibulaires, une poignées de ribaudes sosies des grandes dames de la Cour, des officiers véreux, des bourgeois ambitieux et cupides, des nobles sans foi ni loi...mais pas vraiment assemblés en une intrigue jouant avec les ambiances, les senteurs d'un Languedoc maritime, ou en virevoltant sur les gammes du "Cape et d'épée" qui aurait eu toute sa place au coeur de l'enquête.
Une question me taraude: pourquoi ai-je toujours l'impression que certains auteurs pensent que le lecteur potentiel est vierge de toute connaissance historique? Pourquoi tomber dans une pédagogie lourdingue dont ne peut que pâtir l'intrigue? En un mot comme en mille, n'est pas Jean-François Parot, père de l'incomparable commissaire Nicolas Le Floc'h, qui veut.
Lecture dans le cadre de la chaîne de lecture proposée par Prise de Bec
Le blog de l'auteur ICI
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