lundi 5 janvier 2009

Entrelacs

Elisa Robledo est une brillante physicienne enseignant dans une université madrilène dotée d'une plastique que plus d'un mannequin lui envierait! Aussi Elisa a-t-elle tout pour être heureuse: l'intelligence, la beauté, un travail à la hauteur de ses capacités et de ses ambitions. Seulement, une ombre pèse lourdement sur sa vie, une ombre dont l'origine remonte dix ans plus tôt, lors d'un séminaire d'été réservé à la fine fleur de la jeunesse scientifique. Que s'est-il donc passé sur le campus? Une simple rencontre qui bouleversera la vie d'Elisa et d'une poignée de scientifiques: la rencontre avec une théorie folle avancée par David Blanes, physicien espagnol de renommée mondiale, celle de la théorie des cordes! Elisa sera retenue pour faire partie d'un groupuscule trié sur le volet selon les compétences de chacun et travailler, dans le plus grand secret sur une île isolée du monde, sur un projet autant fabuleux que fou: le projet Zigzag ou la possible remontée dans le temps à partir de la capture de particules de lumière.
Seulement, un couac viendra enrayer la belle machine, un couac terrifiant et insaisissable, jetant hors de l'île les rescapés de l'horreur. Depuis cette nuit cauchemardesque, Elisa et ses compagnons, débriefés et réinserés dans la vie quotidienne, sont la proie d'étranges délires, d'angoissantes hallucinations, phénomènes qui les plongent dans la solitude et parfois la dépression. Que s'est-il donc passé, cette fameuse nuit? Pourquoi ces visions, ces yeux blancs dictant leur muette volonté, gâchent jour après jour la vie de ces scientifiques? Ont-ils touché du doigt une zone interdite? Ont-ils joué au jeu dangereux d'apprentis sorciers?
Toujours est-il qu'un soir, une voix connue prononce au bout du fil, dans l'oreille d'Elisa le nom de code fatidique de Zigzag. Commence alors une course poursuite à travers l'Europe où se mêlent scientifiques, décidés à vendre chèrement leur peau et à en finir avec leur invention maudite, et services secrets plus retors que nature.
Somoza se plaît à jouer avec les nerfs de son lecteur, avec ses peurs et ses angoisses en distillant de grandes pincées de psychanalyse (que d'aucun peut trouver pénible et long), une dose de sexe et de fantasme, de beaux filets d'hémoglobine (brrr, j'en tremble encore rien que d'y penser) apportant un vent de terreur panique bienvenu pour maintenir la pression sur le pauvre lecteur au bord de l'évanouissement. Ah! J'allais oublier un saupoudrage conséquent d'équations, de jeunes et vieux physiciens aux prises avec les pires tentations pour obtenir un polar proche de l'horreur, c'est à dire un polar qui fait vraiment très très peur, un polar où la folie des hommes peut provoquer d'insupportables dégâts.
Somoza explore avec jubilation les conséquences d'une théorie scientifique, la théorie des cordes (article Wikipédia pour les curieux) qui consisterait à se saisir des particules de lumière d'un lieu donné à une heure donnée et de les interpréter. En les ouvrant, il serait alors possible de lire ce qui a été enregistré et regarder de monde tel qu'il était avant, il y a une heure, deux heures, deux mille ans voire des millions d'années. Comment absorber alors la révélation d'un film défiant le temps? Comment sortir de l'extraordinaire instant de plaisir du au visionnage de dinosaures ou de la crucifiction du Christ? C'est ce que décortique joyeusement Somoza en jonglant avec les concepts les plus ardus de la science et les diverses psychologies des personnages.
Les allers-retours entre le présent d'Elisa et son passé donnent un rythme passionnant au récit, provoquent des rebondissements plus fous et imprévisibles les uns que les autres....jusqu'à la chute qui est une pure petite merveille à laquelle le lecteur est loin de s'attendre tant les fausses pistes et vrais indices ont été éparpillés au fil de l'histoire.
Avec "La théorie des cordes" Somoza présente, en plus d'un thriller trépidant, une réflexion sur l'utilisation des découvertes scientifiques: à vouloir toucher au Temps, les conséquences les plus dangereusement perverses ne sont jamais éloignées et le couperet proche de tomber sur la tête des apprentis sorciers.
Une lecture tourbillonnante, étourdissante, haletante et jubilatoire même si les frissons sont au détour de chaque page et que l'horreur tapie dans l'ombre des rebondissements.


Roman traduit de l'espagnol par Marianne Millon


12 commentaires:

Anonyme a dit…

Ah, non, je ne suis pas encore remise de La dame n°13 !
Ce sera donc pour (beaucoup) plus tard !

Anonyme a dit…

Il faut définitivement que je lise cet auteur! Il a l'air totalement weird et normalement, ça me plait!

Anonyme a dit…

Somoza est un grand qui transforme les iédes qu'il a (et il en a de sacrément étranges) en vraie bonne littérature.

Philosophie, art et marchadisation du corps, physique théorique, poésie, tout passe à sa moulinette !

Anonyme a dit…

bon, moi aussi il faut que je me lance dans cet auteur

Anonyme a dit…

en effet, voilà qui donne envie... Même si j'ai l'impression que ce n'est pas à lire le soir avant de se coucher!!

Anonyme a dit…

Dans ma PAL depuis plus d'un an ! J'espère le commencer dans les semaines qui viennent et l'appécier autant que toi...

Anonyme a dit…

Ah ben bravo ! J'étais parvenue à rester éloignée de ce bouquin malgré un titre accrocheur et voilà que ta chronique (que je n'aurais jamais dû lire) me fait changer d'avis. c'est donc bien malgré moi que je note ce livre. Pfff ! et bravo pour ce billet très vendeur.

Katell a dit…

@kathel: il faut dire que le suspense de ce roman fut de la haute voltige dans la gamme de l'angoisse!
Celui-ci est plus léger...quoique ;-)
@karine :) : Je ne peux que t'inciter à plonger dans la découverte de son univers!
@JLM: Si après cela il n'y a pas une ruée sur les romans de Somoza...;-) Un grand auteur contemporain, croqueur de son époque.
@gambadou: Hé oui, il le faut absolument!
@loula: "La dame numéro 13" donnait des frissons...celui-ci n'empêche pas de dormir...euh si car on ne leâche plus uen fois commencé :-D
@sentinelle: j'espère aussi ;-) Bonne future lecture.
@la liseuse: héhéhé, tu m'en vois ravie ;-p

Anonyme a dit…

Celui-ci, il me le faut, car je sens que cette lecture va me transporter !! ;-)
Bon mercredi Katell

Anonyme a dit…

J'ai adoré "La dame n°13", j'ai "Clara et la pénombre" et celui-ci viendra après en toute logique :-) .

Très mimi ton ours blanc !

Katell a dit…

@florinette: pour l'instant, aucun roman de Somoza ne m'a déçue!
@manu: forcément ;-) Je n'ai pas encore lu "Clara et la pénombre"!
La peluche est plus pratique à caser que la vraie ;-)

Anonyme a dit…

j'ai décidément très envie de découvrir cet auteur et ce titre :-) bonne année katell :-)