samedi 17 janvier 2009

L'odeur sucrée de l'enfance


"Uruguay" est plus qu'un roman, c'est un chant d'amour à l'Uruguay de son enfance écrit par un Jules Supervielle qui, au fond de lui-même, ne l'a jamais quitté.
Un peu plus de cent pages pour faire sentir au lecteur les parfums d'une enfance insouciante, sur laquelle le temps n'a pas de prise. Une déambulation dans le passé reconstruit par les souvenirs et les bouts de lui-même que l'auteur a laissé là-bas, en Uruguay, ce paradis presque perdu.
Chaque page est un voyage, chaque page est un récit odorant, envoûtant d'où émanent lumière, ombre, cris enfantins, galops des chevaux, crissement des hautes herbes ou chaleur d'un soleil implacable ou hivernal.
La nuée de sauterelles dévoratrices laisse derrière elle un paysage lunaire et une musique craquelée, crépidante...le bruit des pas sur ces ogres minuscules. Les maisons coloniales dorment sous les palmiers languissants, au rythme des déplacements feutrés des femmes, la pampa appelle à la liberté des courses à cheval sous un ciel d'un bleu que l'on ne voit que là-bas...en Uruguay, les gauchos machos se promènent en chaloupant des hanches, héros d'une aventure au coeur de l'infini d'un paysage maritime de hautes herbes, hommes aimant "bien à passer aperçu. Eperons d'argent, applications d'argent sur la selle et les brides. Et un air de dire qu'il n'a besoin de rien ni de personne. Il ne daignera pas voir un seul passant et s'avance dans une rue très fréquentée comme s'il était en rase campagne." (p 51)...scènes dansant sous la plume nostlagique et amoureuse d'un Supervielle qui se souvient. Comme on aimerait sentir cette brise qui tourne autour des chevilles des jeunes filles, comme on aimerait regarder cet arbre étrange qui n'est qu'une variation sur la gamme des herbes, comme on aimerait être dans cet Uruguay du début du XXème siècle, bercé par la douceur de vivre ou partant pour rassembler le troupeau éparpillé dans la pampa!
Un court roman, un délice à lire et à savourer....le temps s'arrête parfois lorsqu'on lit de tels petits bijoux, sertis dans un écrin de mots et d'images dont on ne se lasse pas!



Livre lu dans le cadre du Cercle des Parfumés

7 commentaires:

Anonyme a dit…

Je me souviens avoir étudié Supervielle au Lycée. je ne l'ai pas relu depuis. Mais c'est tentant.

Anonyme a dit…

Ton billet me réconcilie avec Supervielle...la dernière fois que je l'ai rencontré c'était à saint-Cloud,épreuve orale de CAPES de lettres modernes et j'avais sous les yeux un de ses poèmes complètement hermétique...Ce serait bien que je me réconcilie complètement avec cet auteur !

Anonyme a dit…

Je n'ai encore rien lu de lui. Je note ce titre.

Anonyme a dit…

Moi non plus, je ne l'ai jamais lu, je note, celui-ci a l'air très bien.

Katell a dit…

@sylire: je ne connaissais aussi que ses poèmes, parfois difficiles d'accès. Ce court roman/récit est une petite merveille à savourer!
@mirontaine: il y a des auteurs qui ont tellement fait souffrir que l'on s'en souvient à jamais mais négativement...moi j'ai toujours eu un problème avec Cicéron :-s
Normalement, "Uruguay" devrait pouvoir te réconciler avec Supervielle ;-)
@flo: je pense que c'est la bonne porte pour découvrir Supervielle.
@aifelle: je suis certaine que si tu en as l'occasion tu passeras un très beau moment avec "Uruguay"!

Anonyme a dit…

J'ai très envie de lire Supervielle depuis ma rencontre avec quelques uns de ses vers. Il a une plume qui m'attire, je ne l'explique pas!

Anonyme a dit…

Je me souviens d'avoir lu des contes de Supervielle ("L'enfant de la haute mer", recueil de contes/nouvelles) étant gamine. Je ne savais pas du tout qu'il était né en Uruguay. Je n'ai pas relu cet auteur depuis longtemps, je ne savais pas qu'il écrivait des poèmes hermétiques ! Ce que tu écris sur ce roman me rappelle quelques pages de Georges Flipo sur l'Amérique latine (dans "Qui comme Ulysse")...