C'est sur Parfum de livres, forum littéraire foisonnant et très convivial, que le nom de Philippe Forest m'est apparu pour la première fois. Les divers commentaires, élogieux en général, ont alors piqué ma curiosité aussi lorsque j'ai vu "Sarinagara" sur un présentoir à la médiathèque, je me laissée tenter.
"Sarinagara" n'est pas un roman, plutôt une oeuvre non romanesque. Philippe Forest, qui est allé plusieurs fois au Japon, écrit des impressions, des réflexions autour de la culture japonaise et de quelques une de ses grandes figures marquantes dans le monde des arts: Issa, Sôseki ou Yosuke.
Par une écriture, aux senteurs japonaises, Forest dresse un portrait sensible de ces trois grands auteurs: Issa, le maître de haïku, Sôseki, l'inventeur du roman moderne japonais, et Yosuke, premier photographe à immortaliser les horreurs de la bombe de Nagasaki. Quel est le fil conducteur de ces portraits? Quel est la raison de cet attachement, étrange, de Forest pour la ville de Kobe?
Le fil conducteur est le malheur vécu par ces trois auteurs,vécu directement ou indirectement. Ainsi Issa et Sôsuke ont-il en commun la perte d'un ou plusieurs enfants....échos de la peine incompressible de Forest face à la disparition prématurée de sa fille. Yosuke, quant à lui, a côtoyé l'horreur de la douleur en tant que photographe de l'armée japonaise pendant la Seconde Guerre mondiale: les massacres de Nankin, dont il ne rapporte aucune image, comme la catastrophe de Nagasaki où il est le premier témoin et dont il rapportera de nombreux clichés plus émouvants et éprouvants les uns que les autres. Yosuke qui à force de voir l'horrible en devient indifférent.
C'est un livre difficile à résumer car il n'est pas résumable: tout ce qui y est écrit est essentiel, est un voyage intérieur apaisant malgré la douleur muette qui coule sous l'épaisseur des mots. Les vies rêvées d'Issa, Sôseki et Yosuke ont les couleurs de la réalité: celle de Forest qui s'approprie ces vies, qui les écoute, les ressent et les relate avec brio, de son point de vue.....celui de la douleur d'un père qui a perdu une part de lui-même.
Un texte magnifique, d'une sensiblité et d'une grande poésie....l'impermanence des choses et des êtres est en filigrane et tisse une histoire éternelle.
Le poète, l'écrivain ou le photographe observent leur art, tentent d'en saisir la quintessence, la source première. Parfois cette recherche est vaine et conduit à la folie, parfois elle laisse entrevoir une lumière appraissant dans un petit mot "cependant" ou "et puis"....l'espoir est là, l'explication tant recherchée attend, tapie dans l'ombre, on ne fait que l'effleurer et c'est déjà énorme.
"Sarinagara" n'est pas un roman, plutôt une oeuvre non romanesque. Philippe Forest, qui est allé plusieurs fois au Japon, écrit des impressions, des réflexions autour de la culture japonaise et de quelques une de ses grandes figures marquantes dans le monde des arts: Issa, Sôseki ou Yosuke.
Par une écriture, aux senteurs japonaises, Forest dresse un portrait sensible de ces trois grands auteurs: Issa, le maître de haïku, Sôseki, l'inventeur du roman moderne japonais, et Yosuke, premier photographe à immortaliser les horreurs de la bombe de Nagasaki. Quel est le fil conducteur de ces portraits? Quel est la raison de cet attachement, étrange, de Forest pour la ville de Kobe?
Le fil conducteur est le malheur vécu par ces trois auteurs,vécu directement ou indirectement. Ainsi Issa et Sôsuke ont-il en commun la perte d'un ou plusieurs enfants....échos de la peine incompressible de Forest face à la disparition prématurée de sa fille. Yosuke, quant à lui, a côtoyé l'horreur de la douleur en tant que photographe de l'armée japonaise pendant la Seconde Guerre mondiale: les massacres de Nankin, dont il ne rapporte aucune image, comme la catastrophe de Nagasaki où il est le premier témoin et dont il rapportera de nombreux clichés plus émouvants et éprouvants les uns que les autres. Yosuke qui à force de voir l'horrible en devient indifférent.
C'est un livre difficile à résumer car il n'est pas résumable: tout ce qui y est écrit est essentiel, est un voyage intérieur apaisant malgré la douleur muette qui coule sous l'épaisseur des mots. Les vies rêvées d'Issa, Sôseki et Yosuke ont les couleurs de la réalité: celle de Forest qui s'approprie ces vies, qui les écoute, les ressent et les relate avec brio, de son point de vue.....celui de la douleur d'un père qui a perdu une part de lui-même.
Un texte magnifique, d'une sensiblité et d'une grande poésie....l'impermanence des choses et des êtres est en filigrane et tisse une histoire éternelle.
Le poète, l'écrivain ou le photographe observent leur art, tentent d'en saisir la quintessence, la source première. Parfois cette recherche est vaine et conduit à la folie, parfois elle laisse entrevoir une lumière appraissant dans un petit mot "cependant" ou "et puis"....l'espoir est là, l'explication tant recherchée attend, tapie dans l'ombre, on ne fait que l'effleurer et c'est déjà énorme.
"La poésie est le sentiment du temps, son chiffre ébloui et impuissant. Il n'y a pas de vérité plus forte et plus désespérée.
Au Japon, le pessimisme de Bouddha épouse la forme vide des mêmes paysages sans cesse coloriés de couleurs différentes par le changement des saisons. La langue japonaise connaît toutes sortes de mots dont la philosophie peut choisir de faire de fragiles et douteux concepts afin d'exprimer cette perception doucement désolée de la vie. L'un de ces mots est sabi, qui signifie "navré", "déclinant", "ancien" et désigne toute extase mélancolique devant le spectacle minuscule de la grande impermanence des choses.
L'arbre qui fleurit un instant et que blanchit la clarté provisoire de la lune pleine pour un soir, la fleur qui se fane à peine dans son vase, la pierre qui se couvre de mousse et de rouille verte et rousse, l'herbe jaune qui grandit sur la terre et sous laquelle reposent des guerriers er des princesses: toutes ces choses disent le passage imperceptible du temps qui ravage, efface et oublie. L'Europe tient pour beau tout ce qui se dresse majestueusement dans l'espace et dans le temps, ce que la raison érige pour durer et inscrire son signe dans le néant. Mais au Japon, on trouve beau ce qui se soumet à la loi vide de l'être et qui se défait délicieusement afin d'offrir au coeur de l'homme un moment pur de jouissance trsite.
C'est en tout cas ce que nous apprennent les livres de philosophie et de littérature." (p 52 et 53)
"....chacun sait que le haïku n'existe qu'en raison même de son attachement à la fibre triviale et modeste du monde. Car avec lui, renonçant au symbole, le poème se déshabille de toute sa rhétorique pour pointer du doigt, en u ngeste bref et libre de toute implication métaphysique, la silhouette seule des choses sous le regard d'un oeil absent: la fleur, l'insecte, la neige, le poudroiement microscopique des phénomènes et tout cela qui est encore et ne prétend à rien d'autre qu'à la gratuité de l'inutile d'être." (p 58)
Un entretien avec Philippe Forest ICI
16 commentaires:
Je suis plutôt dans une période où j'ai envie des choses légères en ce moment mais ça a l'air si beau et si fort que je vais le noter tout de suite!
Un livre qui parle du cher Issa ? Vite, sur la `LAL !! Et sur la PAl dans des délais rapides, je pense ! Marci Katell ! Bon dimanche, à bientôt !
C'est encore moi ! Passe voir le haïku ce soir chez moi... Exceptionnellemnt je le mettrai en ligne pas trop tard, vers 19h probablement. (Si tu en as envie, évidemment ! Il n'y a pas d'obligation !)
Une très belle couverture et un article qui donnent envie d'aller y voir de plus près.
Bon dimanche !
Comment veux-tu que je résiste avec une telle critique et un tel enthousiasme! Ce sont en plus des auteurs ou artistes que j'apprécie pour le peu que le les connais!
Le style est admirable , ça plus le japon , plus ta critique, je note !!!
@emeraude: un très beau texte...à lire :-)
@turquoise: eh oui, Issa est à l'honneur et ce qu'en dit Forest est d'une beauté époustouflante...certains haïkus en deviennent plus denses et plus beaux!
Je viendrai te rendre visite tout à l'heure :-)
@moustafette: un très beau texte qui donne envie de se plonger dans la lecture d'Issa et Sôsuke!
Bon dimanche Mous!
@chiffonnette: justement, il ne faut pas résister sinon on passe à côté d'une oeuvre subtile et admirable ;-)
@cathulu: et tu le fais bien :-D
Je suis comme Emeraude en ce moment ! Je me traine ... alors je note mais pour plus tard !
Oh cela doit être une lecture fort constructive spirituellement. Potock est en vol, veux-tu patienter avec "Je suis un chat" de Soseki?
@joelle: et tu ne seras pas déçue!
@vanessa: elle te plairait énormément, j'en suis sûre.
Je veux bien patienter avec "Je suis un chat"...merci vanessa :-)
quel beau message ! bravo ! je suis touchée ! je pense sincèrement que je lirai ce livre !
Bon, alors je ne résiste pas!
J'ai entendu parler de ce livre il y a quelques semaines par une amie, et j'ai eue envie de le lire. Ta critique me donne encore plus envie, donc comme samedi je dois aller faire un tour à la bibliothèque, je verai si il y est...
Que voilà un livre qui me tente énormément... je le note derechef :-)
Une très belle critique pour une très beau livre que j'avais lu avec beaucoup d'émotions il y a quelques mois.
@sylvie: j'espère que tu auras l'occasiond e le lire car il est très beau!
@chiffonnette: il ne le faut pas
;-)
@malorie: il se lit facilement en plus!
@yueyin: oui oui note, note-le :-)
@kalistina: je dois avouer que ton billet d'alors, publié aussi sur Parfum a été pour beaucoup dans l'emprunt de ce livre :-D Et diantre, j'ai drôlement bien fait de le lire!!!
Enregistrer un commentaire