Comme j'ai attendu de l'avoir entre les mains ce roman dont on parle tant sur les blogs! Comme j'ai piaffé d'impatience lorsque je l'ai réservé à la médiathèque! Comme j'ai été ravie lorsque, enfin, il est arrivé! Comme j'ai été heureuse de l'ouvrir et de le commencer.....et comme j'ai été comblée par sa lecture!
En effet, lorsque je l'ai eu devant moi, j'ai eu une inquiétude fugace mais poignante: et si jamais il ne me plaisait pas ce roman au sujet duquel on ne tarit pas d'éloges?
Cette inquiétude a vite disparu pour laisser place au ravissement le plus total.
Cette histoire à deux voix, est celle de l'art du camouflage pour vivre tanquillement ses passions. Une concierge érudite, une fillette surdouée et juge sans concession d'un monde adulte qui ne prend pas ses responsabilités. Que les préjugés peuvent être tenaces et ridicules, que les gens peuvent êtres mesquins et vils, que la culture est parfois donnée, telles des perles à un cochon, à des personnes qui gaspillent ces trésors de l'humanité!
Deux mondes qui ne devraient pas se rencontrer vont faire connaissance et s'apprécier : Renée et Paloma se sont démasquées car elles savent regarder le monde, elles savent utiliser leurs sens pour connaître leur monde. Elles sont démasquées par un petit grain de sable dans les rouages de la routine des apparences: un nouveau voisin japonais s'installe dans l'immeuble. Un étranger qui a le recul pour observer ce qui est enfoui, un jardinier de l'âme, Kakuro Ozu, qui comprend tout de suite que si le chat de Renée s'appelle Léon c'est en hommage à Tolstoï. Et le lecteur assiste aux échanges de citations extraites d' « Anna Karenine » et c'est absolument jubilatoire.
Que dire sur ce roman d'une richesse incroyable sans en déflorer l'essence? Que raconter à son sujet sans ternir la joie de sa découverte par un nouveau lecteur?
Rien, sinon que les références philosophiques, littéraires et artistiques sont multiples et qu'un parfum oriental venu du Japon embaume le texte, l'enrichit, l'embellit au fil des phrases empreintes d'une poésie simple et lumineuse comme un haïku.
Rien, sinon que la lutte des classes est une lutte sans fin: la classe dirigeante est sourde aux envies d'être des « petites gens ».
Aussi, pour donner encore plus envie de plonger dans cette lecture délectable, voici quelques extraits:
au sujet de l'essence même du Beau: « Et pourtant...pourtant, elle est là, sous nos yeux: chaque tableau de maître hollandais en est une incarnation, une apparition fulgurante que nous ne pouvons contempler qu'au travers du singulier mais qui nous donne accès à l'éternité, à l'atemporalité d'une forme sublime.
L'éternité, cet invisible que nous regardons. » (p 272)
Plus loin, devant une scène dans un salon de thé chic parisien: « Il (le petit garçon adopté) aura peut-être envie de brûler une voiture, plus tard. Parce que c'est un geste de colère et de frustration, et peut-être que la plus grande colère et la plus grande frustration, ce n'est pas le chômage, ce n'est pas la misère, ce n'est pas l 'absence de futur: c'est le sentiment de ne pas avoir de culture parce qu'on est écartelé entre des cultures, des symboliques incompatibles. Comment exister si on ne sait pas où on est? Comment peut-on assumer en même temps une culture de pêcheurs thaïlandais et de grands bourgeois parisiens? De fils d'immigrés et de membres d'une vieille nation conservatrice? Alors on brûle des voitures parce que quand on n'a pas de culture, on n'est plus un animal civilisé: on est une bête sauvage. Et une bête sauvage, ça brûle, ça tue, ça pille. » (p 280)
Un roman tendre et dur à la fois. Un roman qui provoque autant le rire (le passage sur les chats et leur finalité esthétique est à mourir de rire) que les larmes. Un roman à lire et à relire.
Un roman qui est à l'image de son titre: élégant comme peut l'être un hérisson qui trottine et traverse un jardin éclairé par la lune....
14 commentaires:
Et voilà ! Servi sur un plateau ! C'est chouette !
Ce livre fait vraiment envie !
Non mais, suis-je folle ? Je l'ai, en plus ! Il attend, il attend. Faut être cinglée pour le laisser gamberger de la sorte ...
Honte à moi !
Tiens, je ne suis pas la seule ! il est sur ma table de nuit ! du n'importe quoi... je ne lis pas toute ta critique, je reviendrai !
Je ne connaissais pas, mais la j'ai carremment envie de le lire! Si en plus il y a du Tolstoi dedans.... et des chats... et de l'actualite... Allez, hop, dans mon panier Amazon. Un de plus...
Depuis le temps que j'en entends parler (et tous les extraits que tu mets sur ton blog), il me fait VRAIMENT envie!
Une nouvelle dans le "fan club"! J'ai beaucoup aimé moi aussi, avec malgré tout une réticence sur le personnage de René et ses digressions philosophiques. (aie, aie, aie, je vais me fair huer!)
Mais je répéte : j'ai aimé !
Tu me donnes envie de laisser une seconde chance à cet auteur. Comme il était indisponible à la biblio, j'avais emprunté son précédent "Une gourmandise" et j'avais détesté le style dès le départ. Du coup, je n'avais plus cherché à lire son dernier. Peut-être que je devrais changer d'avis ;) Merci Katell !
(tiens l'anti-spam me dit : "zotclhf", peut-être un nouveau juron spécial maternelles à ajouter ! ;)
@toutes: Je suis ravie de susciter chez vous toutes l'envie de lire ce beau roman. J'espère pouvoir lire vos avis très bientôt sur vos blogs respectifs ;-)
@flo: l'anti-spam est parfois hilarant et peut vraiment inspirer de nouveaux jurons, je te l'accorde bien volontiers!
Il faut absolument que je me le procure!! Vite vite!!!
aie, j'aurais du craquer, mercredi dernier à la librairie mais j'ai résisté...quelle idiote je fais, bon je file à la libairie ...
Vous ne regretterez pas cette lecture :-D
Un livre que je recommande à tous et à toutes, vous ne le regretterez pas !
Toujours une envie irresistible de lecture me prend après tes messages...ce livre me séduit de plus en plus et je l'attend en format poche avec impatience. Ton passage sur le manque de culture ou tout au moins son caractère quelquefois inconciliable me fait écho en ce moment d'une manière très personnelle..la vie est déroutante quelquefois: décevante 3 secondes avant et tellement réactive et belle 3 secondes après.
Que ceux qui abhorrent la branchitude post-moderne des intellectuels parisiens poussent leur souris plus loin sur la toile !
Mais que les autres prennent la peine de dépasser l'agacement qui nait à la lecture des petites phrases assassines et des effets de style de Muriel Barbery pour découvrir derrière l'élégance du hérisson quelques moments de pure poésie.
Après avoir beaucoup appris sur la phénoménologie de Husserl ou la pensée théologique de Guillaume d'Ockham.
Car dans ce petit roman qui met en scène une ado surdouée et suicidaire et une concierge amoureuse de la grammaire, il faudra attendre à mi-parcours l'arrivée d'un étrange japonais et la rencontre des deux héroïnes pour vraiment goûter à l'élégance du hérisson.
La patience sera finalement récompensée : une auteure qui, au chapitre 8, déclare aimer Mankell et Connelly, ne peut pas être foncièrement mauvaise !
On en parle ici.
Un petit bonjour en passant
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