dimanche 14 janvier 2007

Les sirènes du désert


A l'instar de Mizukami, le roman de Khadra est comme une parenthèse: il s'ouvre et se ferme à Beyrouth, au Liban.
Entre les deux, le roman nous emmène aux portes du désert puis à Bagdad.
Comment la guerre peut transformer un jeune homme cultivé et tranquille en graine de kamikaze, tel est le fil conducteur du roman de Khadra.
Le lecteur navigue, chavire dans la houle déchaînée des passions et des horreurs. Il assiste à la mise en pièces d'une culture millénaire, une culture qui participa à l'éveil du monde, à la grandeur de l'humanité. On ne peut qu'être mal à l'aise, en tant qu'occidental, devant le spectacle pitoyable des GI hurlant leur haine, masque de leur peur indicible ressentie devant un monde qu'ils ne comprennent pas.
On suit le narrateur dans sa volonté de laver l'affront subi par sa famille et son père. Il est Bédouin et pour lui, le code de l'honneur exige d'effacer un affront par le sang.
A travers le parcours initiatique de ce dernier, le lecteur est ballotté sur les routes désertiques et désertées, de barrage en barrage, puis déambule, sonné, dans un Bagdad à feu et à sang, une ville devenue l'ombre d'elle-même. Son architecture est aveugle, comme ses habitants qui ne voient plus le sordide ni l'absurde car obsédés par la nécessité de survivre.
Ce roman peut sembler sombre, pessimiste tels les paysages désolés, délaissés par les hommes. Cependant, une étincelle de vie redonne l'espoir en un avenir serein et éclairé...étincelle fugace, fragile mais qui irradie sa chaleur et sa joie de vivre: non, l'horreur, l'obscurantisme ne peuvent avoir raison de l'Homme.
Un livre qui nous emporte au gré de ses accents simples ou lyriques, tels les dunes du désert et les beautés d'une Babylone perdue de vue.
Un hymne à l'espérance et à la croyance en une humanité qui ne jetera pas aux orties ses cultures certes différentes mais ô combien complémentaires.

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