Je continue le partage d'extraits de "La fraternité du Panca: frère Ewen" de P.Bordage.
"Il [Ewen] n'était plus que l'ombre de l'homme qu'il avait été, il s'estompait. Alors il avait décidé d'ignorer les tiraillements, les doutes, les pulsions, de consacrer toutes ses forces à l'élimination d'Elbéore, de se maintenir dans la meilleure condition possible afin de transmettre au quatrième frère une amnâ digne et forte. Il acceptait de ne plus être un individu mais un maillon. Maître Ebezener avait coutume de dire qu'un véritable frère n'avait pas de volonté propre, qu'il n'existait pas hors l'oeuvre du Panca. Les évènements lui donnaient raison: Ewen n'avait rien choisi, les courants, les circonstances l'avaient poussé à se dépouiller peu à peu de ses oripeaux individuels. Un nouvel Ewen émergeait de ses propres ruines, un Ewen détaché de ses souvenirs, de ses conditionnements, de ses souffrances, un Ewen insouciant, libre, aussi léger qu'un nuage. Il lui arrivait de rechuter, le manque de sa femme et de sa fille le torturait tout à coup, le vide devenait douloureux, insupportable, il roulait, en larmes, sur son lit ou sur le sol de la cabine où il restait prostré un long moment, mais les crises s'espaçaient et s'amenuisaient." (p 397 et 398)