vendredi 29 mai 2009

Une pause

Demain, aux aurores, nous serons en partance pour la cité des Corsaires où se déroule ce week-end un célèbre festival:


Au programme, rencontres, dédicaces, conférences et....provisions de saines lectures!
A Lundi, je vous laisse aux bons soins de Raspoutine, le gardien de blog!

jeudi 28 mai 2009

La mort lente


Un jeune homme a décidé de quitter son village natal pour revêtir l'uniforme avant l'heure et partir affronter le désert et les chek-points. dans son sillage ses souvenirs et un ami.
Le rêve du combat, du jeu de guerre, devient rapidement une désillusion: la peur, l'étrange atmosphère d'une guerilla. Il a quitté un village de "morts-vivants" pour rencontrer des vivants qui lentement se meurent. Le narrateur fait la connaissance de Conti, un sergent, un soldat paradoxe vivant: ce dernier ne rêve pas de conquêtes victorieuses mais aspire à la gloire de la défaite; un sentiment mortifère qui complète la pulsion de mort du narrateur. La vie sous les drapeaux se passe sans possibilité de rempiler...notre narrateur regagne son village perdu, amputé de la présence de son ami, jeune victime offerte en sacrifice aux dieux de la guerre.
Les senteurs de la garrigue s'insinuent dans le récit, l'immobilité du chasseur en plein affût lorsque le soir tombe dans l'oliveraie, un fusil qui ne vise rien, la solitude d'un soldat que le néant des illusions perdues rend muet. Les fragances d'un été adolescent lui font regarder vers l'autrefois, le temps de l'innocence, de temps des douces et jeunes amours. Elle s'appelle Magali, ils sont assis au bord de la fontaine où chante un filet d'eau, fraîcheur des soirs après la plage. La ronde des baisers fait tourner la tête et le coeur, l'amour est éternel au rythme des vacances d'été. La vie ne déroule pas son fil comme on le souhaiterait: Magali suit le cours de ses études pour devenir une Diane chasseresse des temps modernes, celle qui flaire les têtes à débaucher pour garnir les entreprises qui louent ses services. Services également mortifères, services désenchantés d'un quotidien où l'esprit de camaraderie est de mise. Retrouvailles des corps, des sueurs, des rêves l'espace d'un instant, l'espace d'une trève, éphémère.
La mort d'un soldat qui se voulait guerrier et, en tant que guerrier ne pas partir seul au Walhalla....le destrier n'a pas de sabot, seulement une truffe humide, quatre pattes, une touffe de poils soyeux et un regard rempli d'amour pour celui qui le ramassa au bord du chemin.
La musique de ce roman dense, en images et en reminiscences d'un certain 11 septembre 2001 qui changea la donne sur l'échiquier géo-politique du monde, est d'une noirceur parfois glaçante, souvent désespérée et toujours dérangeante: elle accompagne la marche d'un monde que Dieu semble avoir déserté, lassé des excès des hommes. Les repères ne sont plus ceux qui jalonnaient les générations précédentes, le manichéisme de façade cache des blessures et des interrogations existentielles: l'homme est-il à l'origine du mal qui ronge le monde? Ou est-ce une interprétation religieuse?
Le mode du "Tu" interpelle le lecteur qui se laisse aller dans le sillage du narrateur ou qui choisit de rester en retrait, observateur d'un mal-être provoquant son malaise face à une intériorité d'une grande désespérance. Ce "Tu" participe à la noirceur du récit et génère une angoisse en filigrane....l'aliénation d'un quotidien frisant parfois le non-sens.
Le parti pris de l'auteur, passant d'un souvenir à l'autre sans transition dans la relation, m'a beaucoup déroutée, retardant mon entrée dans l'histoire de ce jeune homme étouffant sous le poids des illusions perdues. Cependant, la force de la narration est telle que l'on ne peut qu'aller jusqu'au bout de cette histoire, celle de jeunes gens perdus dans un monde qui s'emballe, celle d'un monde qui perd de plus en plus ses racines mais aussi son avenir. Une histoire qui interpelle et offre un autre regard sur le notre monde qui souvent ne tourne plus rond! Une histoire sombre, très sombre et extrêmement touchante.








mercredi 27 mai 2009

Leçon de choses


Les Editions de L'école des loisirs proposent toujours de jolis trésors à lire et à engranger au fil de ses collections et cela pour chaque tranche d'âge de l'enfance et de l'adolescence.
Dans le cadre du swap AfricaJeunes, ma binôme Lamia a glissé dans le colis une très belle histoire documentaire qui se déroule au coeur de la savane: "La querelle".
Une maman rhinocéros vaque à ses occupations aux côtés de son petit, ce dernier semble inquiet car une plaie sanglante se trouve sur un flanc de sa mère. Que s'est-il passé pour qu'elle recoive une telle blessure? Un affrontement avec un lion? Non, il est rarissime qu'un lion s'attaque à un rhinocéros surtout si c'est une femelle avec son petit! Une rencontre qui aurait mal tournée avec un rhinocéros mâle? Non plus car un mâle n'embête jamais une femelle rhinocéros avec son petit! Une escarmouche avec des oryx? Il y a fort peu de chance car les oryx, une espèce de gazelles, sont herbivores et donc ne s'en prendraient jamais à un rhinocéros! Alors, qui a bien pu blesser de la sorte Maman rhinocéros? Les seuls animaux de la savane pourvus de défenses acérées et dotés d'un caractère jaloux et ombrageux lorsqu'ils sont accompagnés de leurs petits sont les éléphants!
Peu à peu, le récit nous apprend pourquoi et comment la Maman rhinocéros a subi cette blessure qui peut s'avérer grave, c'est à dire mortelle, si elle ne guérit pas correctement...d'ailleurs, la nuit tombe sur la savane, la maman se couche, faible sous le regard apeuré de son petit. Que réservera demain à la famille rhinocéros?
"La querelle" est un album aux illustrations d'une douceur savoureuse, celle qu'offrent les pastels, et au texte avec lequel le lecteur puise une mine de renseignements sur les différents animaux vivant dans la savane, leurs relations de voisinage, leur mode de vie et leurs différentes caractéristiques. Sans compter le rôle important d'un oiseau au nom étrange, le pique-boeuf, personnage secondaire mais fondamental lié aux rhinocéros (en fin d'album, le rôle du pique-boeuf est très bien expliqué)!!!
De plus, l'intensité dramatique apporte une dimension littéraire au documentaire en menant le récit à la manière d'une enquête, avec un jeu intéressant entre le noir&blanc - marquant l'interrogation mais aussi le temps passé - et la couleur ,et en introduisant une composante essentielle des peurs enfantines: la perte de la mère, cette référence de tendresse, de protection et d'amour. Le drame qui peut se jouer met en lumière le fait que rien n'est éternel, que la mort est inhérente à toute vie. Peu à peu, l'enfant lecteur peut s'approprier, à son niveau bien entendu, ce difficile concept.
"La querelle" comme le titre l'indique, met en scène un quiproquo dû au fait (qui est très bien expliqué en exergue au dos de la couverture) que, dans la nature, comme chez les humains, les mères protègent farouchement leur petit, maillon fondamental à la perpétuation de l'espèce, à la continuation des générations.
Merci Lamia pour cette très belle histoires aux illustations agréables à regarder, grâce auxquelles le lecteur a la sensation d'être fondu dans la savane!

lundi 25 mai 2009

Huis-clos au soleil


Martial et Odette, retraités parisiens aisés, sans enfants et sans animal domestique, ont acheté une jolie petite maison dans une résidence idyllique au nom évocateur Les Conviviales, tout confort, dans le Sud de la France.
C'est avec empressement qu'ils déménagent là où ils vont pouvoir "vivre en vacances toute l'année": une résidence, réservée aux seniors seulement, sous haute surveillance, avec Mr Flesh, le gardien (peu locace et peu avenant) et caméras de surveillance, piscine, club-house (pour la convivialité) avec animateur, et surtout, assurance d'être en compagnie de gens convenables, à leur image!
Très vite, Martial et Odette se rendent compte qu'ils sont les seuls occupants: tout est bien calme, bien gris lorsque la belle saison est passée (il pleut même souvent!), bien isolé loin des commerces de proximité et de la convivialité de voisinage; c'est que Martial n'est plus reconnu par le boulanger, le boucher ou le marchand de journaux...il ne peut aller faire ses achats ni un petit tour en ville sans prendre la voiture! Pour un peu, il regretterait d'être evnu s'enterrer aux Conviviales. Parlons-en des Conviviales: elles ressemblent chaque jour un peu plus à un cimetière désert et leur jolie maisonnette à leur dernière demeure, sans compter que la piscine se résume à un trou carrelé sans eau et le club-house désespérement vide!
Odette s'obstine à vouloir enjoliver leur maison, à faire des confitures, à donner des bricoles à faire à Martial....histoire de tuer le Temps: il n'y a rien à faire lorsque la météo est moche et lorsque le voisinage est inexistant, même la télé est décevante....alors, on lit, beaucoup d'ailleurs, mais au bout d'un moment, ça lasse.
Enfin, de l'animation survient: un nouveau couple s'installe. Marlène et Maxime arrivent briser la monotonie d'Odette et Martial. Puis arrive une femme seule (est-elle veuve? Vieille fille? est-elle vieille ou plus trop jeune?), Léa qui va semer un peu le trouble chez Maxime, le matuvu de service au sourire éternel de vendeur de serres, celui qui a tout vu, tout entendu et tout réussi). Enfin, Nadine entre en scène: recrutée en urgence comme animatrice et un peu désemparée devant les personnages d'un huis-clos luxueux et un peu angoissant.
Un modus vivendi se met en place: sorties culturelles et pittoresques, soirées chez les uns et les autres, bronzage au bord de la piscine et papotages.
Peu à peu, les désagréments enrayent les rouages huilés de la belle mécanique immobilière: les caméras tombent en panne et ne sont pas réparées (d'ailleurs ont-elles jamais fonctionné?), le gardien a un comportement de plus en plus étrange (brrr, la manière dont il débarrasse Les Conviviales des chats fait frémir!) et cerise sur le gâteau, Mr Flesh réussi à provoquer la peur chez Marlène en la mettant en garde contre les Manouches installés non loin.
La situation est mûre pour que se produise le dérapage que le lecteur pressent depuis le début du récit!
Garnier décortique, comme à son habitude, de manière subtilement corrosive l'âme humaine et explore, grâce à ce huis-clos original, les peurs, les fantasmes, les rancoeurs et les haines enfouies chez ses personnages. La vieillesse et le délire sécuritaire est un cocktail explosif des plus sidérants: Garnier distille les indices au compte-goutte, au fil des remarques anodines qui prennent leur importance lors du bouquet final. Les différentes pilules du bonheur vantées auprès d'une génération vieillissante et jalouse de son bien-être, sont loin d'être une marchandise anodine: les dégâts collatéraux sur la fin de vie sont sordides et mortifères. Le miroir aux alouettes de la société de consommation est un redoutable piège, une cage dorée qui peut s'avérer devenir rapidement un véritable enfer.... "Une poussière dans l'oeil et le monde entier soudain se trouble", cette exergue empruntée à Alain Bashung est un fil conducteur au bout de l'angoisse. Ce qui rend les personnages,malgré l'agacement qu'ils peuvent susciter, attachants dans leur solitude et leur ridicule.
Garnier, au fil de ses romans noirs, très noirs, déroule un réalité crue, douloureuse et presque effrayante. A chaque fois, l'abysse devient plus profond qu'au précédent roman malgré les touches de poésie disposées parci-parlà, au gré de la peinture de l'auteur.
Bref, vous l'aurez compris, "Lune captive dans un oeil mort" est encore un bel opus offert par Pascal Garnier dont l'écriture est un vrai bonheur à lire!




dimanche 24 mai 2009

Faites vos jeux!


Un auteur doit trouver 20000 euros pour changer les fenêtres de sa maison. Mais où les trouver? Sa femme lui suggère d'écrire un roman, un roman qui rapporte des sous. Peu à peu, grâce à la conjonction de l'actualité politique franco-française et de sa passion des courses hippiques, une idée fait son chemin: pourquoi ne pas écrire quelque chose sur les luttes internes du PS à la veille du Congrès de Reims? D'autant que la Pasionaria socialiste, belle à en faire tourner les têtes, l'unique Ségolène Royal semble être la favorite....de là à faire un parallèle avec les starting boxes d'un départ pour l'Arc de Triomphe, le pas est très vite franchi.
Ni une ni deux, la fièvre du jeu, du pari, des sueurs et du suivi implacable de la carrière du favori, s'empare du narrateur, Henri Norden, qui se lance à corps perdu dans les méandres des courants et des motions, multiples séismes ébranlant chaque jour un peu plus l'appareil socialiste.
C'est avec délectation et sourire aux lèvres, que le lecteur suit la montée d'adrénaline précédant le Congrès de Reims, la description des videos de chaque hérault des motions en compétition, les coulisses des discussions des camarades, la haute voltige des ténors du parti à la tribune du Congrès et à la médiatisation outrancière d'une femme qu'on déteste autant qu'on admire. Les ingrédients d'une tragi-comédie sont présents, mesdames et messieurs faîtes vos jeux et lancez-vous dans la folie de l'incertitude de dernière minute!
Christophe Donner, écrivain et turfiste, s'amuse à mener son lecteur au coeur du monde des parieurs, ceux qui parient sur tout, voire n'importe quoi, du moment qu'il y ait du gain à réaliser et de l'adrénaline à gérer. Henri Norden a un ami bookmaker prêt à prendre son pari et si jamais il devine le nom du prochain premier secrétaire du PS il a des chances non seulement de gagner une belle cagnotte mais aussi de remplacer sans souci les fameuses fenêtres de sa maison pour le plus grand plaisir de son épouse. A l'ombre de des pas de Norden, héros un tantinet désabusé par le monde qui l'entoure, le lecteur entre dans le cercle, parfois glauque et déprimant, des réunions de section, des rencontres entre sections, des meetings et des petites phrases assassines distillées sous le manteau par la presse ou les militants eux-mêmes! Henri est certes désabusé, voire d'une mordante ironie, mais ressent de la tendresse pour les petites mains des sections, les petits rôles essentiels aux rouages de la grande machinerie qu'est le parti, ces petites gens qui croient en des lendemains qui chantent malgré la crise et le verbiage creux des politiques. Certes, la politique est un jeu, un éternel pari sur l'avenir pour l'animal politique qui se lance à corps (et coeur?) perdu(s) dans son océan, mais un jeu que la base prend au sérieux.
Cependant, au fil des rencontres, des échanges de points de vue, des lectures et des visionnages, notre héros demeure angoissé par l'issue de son pari: c'est que l'observation de ces prédateurs d'idées peut embrouiller les certitudes et les fragiliser les choix! Tenez, prenez le jeune Benoît Hamon, une valeur montante, à la gauche du parti: il a été à la tête des Jeunes Socialistes et a de bonnes chances d'être un outsider de poids dans la course au fauteuil de la rue Solférino! Son discours sur la crise mondiale peut ébranler les caciques et galvaniser les indécis! N'oubliez surtout pas la diva mystique du parti, d'autant plus adulée par ses fans qu'elle a échoué aux présidentielles et été abandonnée par "le père de ses enfants", celui-là même qui cèdera son fauteuil de premier secrétaire, et les rênes du parti, à l'issue du Congrès de Reims. Aahhh, Ségolène, icône sublime qui fait frémir d'amour notre Henri Norden à mesure qu'elle fait gaffe sur gaffe et qui renvoie au rancart le côté "mémé" de Martine Aubry!
"20000 euros sur Ségo" relate un bal infernal où les valses diaboliques des rancoeurs, des jalousies et des égos survitaminés des uns et des autres, font danser des vérités amères et difficiles à accepter tant elles peuvent glacer le plus fervent supporter. Christophe Donner fait vibrer son lecteur en l'entortillant, par un récit savoureusement ironique, dans la griserie du parieur et l'incertitude d'un sport de haut niveau qui n'est nulle part recensé: la politique!
Le roman de Christophe Donner a l'apparence d'un pamphlet et la saveur d'un exercice de style mêlant la métaphore filée des courses hippiques à l'actualité politique: on rit, parfois jaune si on a un faible pour la Gauche, on savoure les bons mots de l'auteur mais on n'apprend rien sur les hommes et les femmes candidats au poste de premier secrétaire du PS (sauf peut-être qu'ils ne sont guère réceptifs à la littérature mais est-ce vraiment une révélation?)...pour cela il y a la littérature politique!
Un roman satirique, frisant parfois la pure méchanceté, poil à gratter qui fera parler dans le Landerneau socialiste!

Je remercie M.L Auzias et les éditions Grasset pour cette lecture divertissante très acidulée.


Des points de vue plus politiques ici ou encore ici et

Swap AfricaJeunes


Comme j'attendais que ma binôme Lamia recoive le colis que j'avais envoyé samedi dernier, je peux me lâcher car le facteur suisse est enfin passé!


Lamia m'a honteusement gâtée et m'a profondément émue en m'offrant un album d'une grande humanité et d'une grande tendresse....grâce à ce dernier, je regarde d'un autre oeil une démarche qu'il me coûte, administrativement, d'enclencher.


Samedi matin dernier, driiiiinnggg, la sonnette tinte, mon cher et tendre mari ouvre à la factrice des colis et reçoit un joli colis venant de Suisse!!! C'est Lamia, ma binôme du swap Africajeunes qui entre, virtuellement, chez moi!


Une fois installée devant le colis, ni une ni deux, je file chercher mon APN: saperlipopette de saperlotte, catastrophe....il n'y a plus de batterie! Grrrr, mon appétit féroce de tout déballer doit être mis en veilleuse le temps que je recharge un minimum l'APN. C'est mon mari qui est hilare devant ma déconvenue et ma patience rudement mise à l'épreuve. Du coup, l'heure du déjeuner sonnant, nous nous attablons....moi lorgnant mon colis sagement placé sur le canapé. Oh et puis, zut, je n'y tiens plus... j'ouvre le colis pour découvrir de joyeux emballages ornés d'oursons dans des scènes de vie quotidienne (chouette!!!! Je les récupèrerai pour les exercices de découpage de précision pour les loupiots de Petite Section, lorsque je reviendrai de stage!). Hélas, ma curiosité n'en est que plus aiguisée et ma frustration que plus grande....vite, ne plus penser au plaisir premier mais savourer les futurs moments de découverte. D'ailleurs, la recharge prend tournure. Le repas s'achève tranquillement (si, si, si) et après avoir rangé puis savouré mes deux carrés de chocolat....


La folie du déballage peut commencer!!!!





Lamia m'a conseillée de commencer par la lecture des cartes, splendides et émouvantes (le petit train des enfants est un doux clin d'oeil à ce que je vis à l'école....merci Lamia), où elle me relate tous les "pourquoi" des "comment" du colis!



Puis j'ouvre délicatement les emballages pour découvrir de très jolies choses:






  • des gourmandises.....miammmmmm du chocolat (que je n'ai pas encore goûté: je retarde le moment de la dégustation) et des brins de menthe du balcon de Lamia (ils n'ont pas résister à la durée du voyage et ne pourront pas être replantés...par contre ils trouveront une théière marocaine pour y exhaler leur parfum lorsque je préparerai un thé à la menthe au parfum marocain!





  • des albums, dont " D'un monde à l'autre" qui m'a émue au plus haut point, "La querelle" et "Aïssata et Tahitou" qui aborde un douloureux sujet: celui de la guerre civile qui ravage tout.





  • un roman ado "Le chant de Be": je souhaitais me lancer dans ce domaine de la littérature jeunesse que je connais mal. Je confirme Lamia, la photo est vraiment très belle et donne envie de partir avec le roman sous le bras





  • une douceur pour ma peau: un savon au karité à la senteur subtile et douce, issue du commerce équitable, mettant en valeur le travail des femmes du Burkina.

Les post-its rose en forme de coeur portaient un petit mot explicatif de Lamia....un vrai bonheur à lire, à suivre, à ouvrir, à découvrir et lire!!!


Mille et un mercis chère Lamia.


Et encore bravo à Emmyne pour cette organisation très sympathique en binôme, riche en découvertes!!!

vendredi 22 mai 2009

Le Chant de la Terre

Le Chant de la Terre est l'ouverture d'une épopée de science-fiction, l'ouverture d'un space-opéra au souffle immense, à la démesure géniale!
Nous sommes dans un avenir plus que lointain, inimaginable: les hommes ont exploré l'espace jusqu'à découvrir les aléapistes, c'est à dire les myriades de possibles de chaque vie humaine; un dédale infini dans lequel Starquin, le Cinq-en-Un, un être interstellaire, un quasi dieu, s'y est égaré et cherche à en sortir. Puis la technologie qui menaça d'extincion la Terre et ses hommes a été oubliée pour donner jour à la sculpture des êtres vivants, une sculpture de l'ADN, celle qui croise les gènes humains à quelques gènes animaux.
Ainsi, Karina, héroïne de ce premier volet, est-elle issu d'un croisement génétique entre un Vrai Humain et un chat faisant d'elle une felina, une Spécialiste: Karina allie la beauté féminine à la souplesse déliée d'un félin. Seulement, les Spécialistes ne sont pas bien perçus par les Vrais Humains qui font tout pour qu'il n'y ait pas entente entre les différents "peuples" et ainsi conserver une hégémonie dans la société. A son corps défendant, Karina se trouve embarquer au coeur d'un dessein qui la dépasse, sous la houlette inquiétante d'une étrange prophétesse, la Suivante, au visage défiguré: celui d'aider Starquin à se libérer des limbes de l'infini en réécrivant l'histoire! Sans pouvoir y faire grand-chose, Karina va suivre le chemin qui la mènera à rencontrer Raoul, le fils d'un capitaine de char à voiles au caractère pugnace, Tonio. De leur rencontre doit naître une aléapiste essentielle pour le retour de Starquin.
Dans une langue où la poésie n'est jamais bien loin, Michael Coney, fait vivre à son lecteur de multiples fausses apartés, des rebours et des sauts dans le futur, en une danse complexe mais délicieuse. On se perd avec inquiétude parfois dans les méandres d'une narration heurtée, mystérieuse, aux apparences incohérentes, et on se retrouve joyeusement au coeur du récit fantastique, riche des renseignements glanés dans les chemins de traverses narratifs, petits cailloux permettant de garder la trame, dense, en tête. On glisse sur les eaux calmes et tumultueuses de l'Humanité, que dis-je des Humanités aussi diverses qu'éphémères (à l'échelle du Temps) qui façonnèrent et construiront la Terre, on suit le roulis des rancoeurs, des mensonges, des croyances, des tabous, on vogue sur le clapotis à la trompeuse tranquillité d'un sillage plein d'une promesse d'émotions et d'aventures qu'est ce Chant de la Terre, premier acte d'un récit grandiose.
"La grande course de chars à voiles" est un enchaînement de contrastes (qui ne sont que saveurs du récit) tels les felinas, ce peuple fougueux, fulgurant de violence lorsque la colère ou la révolte l'aveugle, mais pouvant aussi faire preuve de douceur et de tendre attachement. Ainsi Karina qui ne peut se résoudre à abandonner le cornac Haleka dans le suicide de son baleinier au coeur des flots ou El Tigre, le père de Karina, qui n'aima qu'une seule femme, celle qui donna naissance au grupo de Karina.
Tous les éléments nécessaires, et essentiels, à l'écriture d'une belle épopée de SF sont réunis dans ce prologue, cette mise en bouche d'une saveur subtile et entêtante avec un goût de "revenez-y" tenace: des êtres humains sculptés aux gènes d'animaux, des humains désirant rester aux commandes du monde, un Seigneur des cantons aussi mystérieux et invisible qu'omnipotent, une course de char où les tensions entre Spécialistes et Vrai Humains sont exacerbées et où les pulsions les plus extravagantes sont autorisées, un rail unique de communication, des baleiniers, mastodontes dont la vie se compte en milliers d'années mais qui lentement disparaissent, une forêt vierge où rôde des créatures inquiétantes, un trouvère, une prophétesse et des univers parallèles à l'infini...le tout sur les virevoltes d'un dessein ultime.
"La grande course de chars à voiles" est une lecture passionnante qu'on ne lâche qu'une fois la dernière phrase lue....et encore, le lecteur reste-t-il quelques temps habité par l'atmopshère poétique et épique du récit.
Une très belle découverte grâce à BOB et aux éditions Robert Laffont (collection ailleurs & demain)!!!!


Roman traduit de l'anglais (GB) par Isabelle Delord-Philippe






Un billet intéressant du Cafard Cosmique ICI pour en savoir plus sur l'auteur.




jeudi 21 mai 2009

Ces grands malades qui nous gouvernent


Le corps d'un homme est retrouvé sur le parking d'une grande surface de mobilier, en banlieue parisienne. Tout semblerait conclure à un suicide mais très vite, l'équipe du commissaire Coralie Le Gall se lance sur la piste du meurtre: en effet, l'homme retrouvé sur le parking n'est pas un simple pékin...il n'est rien de moins qu'un proche conseiller du Premier ministre. Ce cadavre devient rapidement un "cadavre d'état" et l'enquête s'annonce longue et difficile pour le commissaire et son équipe....les chausse-trappes et écueils en tout genre, plus pernicieux les uns que les autres vont agrémenter le chemin, ardu, menant à la vérité. Et surtout....qui manipule qui dans cet imbroglio?
Les personnages sont bien travaillés, même si on n'échappe pas aux stéréotypes du genre (sinon, ce ne serait pas vraiment du polar): les lieutenants du commissaire sont aussi inattendus qu'efficaces (le Lama - le pauvre a un patronyme basque impossible à retenir en entier - et Zacharie, le boudhiste à la grande culture, calme et serein, et le fondu d'informatique, juif marié à une beurette) flanqués d'une stagiaire, venue des îles, à la perspicacité fulgurante. Le divisionnaire, pleutre (il y avait deux solutions: l'intègre et solidaire ou le pleutre incapable), incompétent mais sachant jouer de l'entregent pour tracer sa carrière, le duo de juges accros au règlement, le jeune et bel énarque dansant sur la corde raide, la dircab du ministre froide, impassible, impeccable dans son tailleur qui ne froisse jamais, le planton fidèle, aveugle et sourd au besoin, un ministre de l'Intérieur cauteleux à souhait, des hommes de main, des tueurs, des trahisons, des comptes en Suisse....bref, les ingrédients d'un bon polar sont réunis. Surtout, ne pas oublier, le personnage de la victime: Hubert de Vaslin, un aristocrate brillant, spécialiste de Leibniz, à la grande fortune mais s'en fichant comme d'une guigne, venant d'achever une thèse sur ce grand philosophe-mathématicien-moraliste, spécimen, rarissime de nos jours, de l'honnête homme (au sens du XVIIIès).
Quant à Coralie Le Gall, elle dissimule une grande douleur sous un langage d'une verdeur et une énergie de Don Quichotte: fille d'une grande musicienne et d'un énarque de l'Inspection des Finances (grand corps d'Etat s'il en est) ayant plus que flirté avec les "affaires" d'état, elle n'a de cesse de vouloir mettre fin aux magouilles et ignominies de la caste dirigeante depuis qu'elle a appris les accointances paternelles et que le chauffard qui a tué son petit garçon n'a pas été inquiété en raison de sa notabilité locale! A la lecture du "pitch" du roman, la description de Coralie, en tant que personnage central, était rébarbative et donnait à penser à la venue d'une héroïne de plus à la plastique parfaite toujours mise en valeur. Ouf, il n'en a rien été! Certes, la commissaire est belle mais le récit ne s'y attarde pas lourdement et préfère mettre en scène son côté énergique (l'énergie du désespoir?) frisant l'outrancier parfois mais en adéquation, du moins à mon sens, avec l'inextinguible souffrance qu'elle porte en elle. Sa rébellion vient de ses tripes, son langage gouailleur, une carapace pour ne pas craquer.
Le lecteur ne peut que se laisser prendre dans les rêts d'une intrigue bien menée, bien ficelée, avec ce qu'il faut de manichéisme pour ne pas faire pencher la balance du mauvais côté (le dénouement est très surprenant). Dès les premières lignes, le souffle de l'intrigue appelle à la continuation du voyage en eaux troubles au coeur d'une mécanique froide, sans état d'âme qui glace les sangs: des engrenages bien huilés au fil des ascensions politiques, au fil des hameçonnages dans les grandes écoles de la République, petites mains qui planifieront des batailles rangées dans l'ombre des urnes ou dans le secret de cabinets qui parfois n'existent pas...officiellement. Arrangements entre amis, arrangements entre consciences dévastées par la griserie du pouvoir. Certes, on aurait tendance, comme Coralie Le Gall, à mettre tout ce joli monde ,et son cortège de héraults plus veules et serviles les uns que les autres, dans le même paquet de linge sale, très sale même: le décorticage d'un système qui paraît être arrivé au bout de sa folie fait un peu peur...si le système s'emballe, la folie peut-elle être arrêtée à temps? Quels gardes-fous une société peut-elle mettre en place lorsque le miroir aux alouettes lui envoie l'image d'une police ombre d'un Don Quichotte luttant désespérement contre ses moulins à vent, lorsque tout est fait pour que l'on ne regarde pas attentivement ce qui se déroule devant soi (entre le sport, combats de gladiateurs modernes, les jeux insipides et décérébrants et une info tellement dans l'instant qu'elle ne devient plus lisible car sans recul possible)?
"Cadavre d'état" est un thriller d'un réalisme étonnant, subjugant, écrit par un auteur qui connaît bien les arcanes de la politique menée au plus haut sommet de l'état. Claude Marker, pseudonyme de l'auteur(e), démontre et démonte avec adresse un système mortifère où les dangers les plus grands broient les plus faibles, offrent une survie aux plus forts, c'est à dire à ceux qui ont réussi à devenir plus requins que les autres et à tisser une toile aux mailles si serrées qu'elles en deviennent léthales, au sens propre comme au sens figuré!
A vos cerveaux citoyens!!!


"D'abord, je les ai jugés tocards, ringards, nullards. J'avais un exemple sous les yeux; l'un d'eux était mon proche.
Puis je les ai constatés parasites, voleurs goinfres, tricheurs.
Ensuite, m'est apparu le système. Non plus seulement la caste, mais ses soutènements financiers, idéologiques, criminels, ses réseaux d'échanges de bénéfices, le dépouillement entrepris sur tout un peuple, jusqu'à l'épuisement de ce peuple, jusqu'à sa mort. J'ai dû me faire à l'idée que les marchands de drogue, les marchands de femmes, d'enfants, les tueurs....sont dans le système, à leur place, utiles, nécessaires, indispensables; que profiteurs politiques et grands criminels sont une même bande qui se nourit d'immoralité, qui berne les citoyens, les vampirise, leur verse des tranquillisants....
Et maintenant, je les découvre...fous. Inconscients du mal. Inconscients du mal qu'ils causent, des souffrances qu'ils provoquent. Inconscients que le vol est mal, que le meurtre est mal...
Ils sont le mal. Et ils ne le savent pas.
Et dans leur folie, ils croient même qu'ils sont...le bien.
Le Lama m'avait parlé un soir, tard, au bureau, de Leibniz.
"Les disciples, du grand savant et théologien, m'avait-il expliqué, ont prolongé ses idées géniales en prenant appui sur les découvertes biologiques de notre siècle. Selon eux, selon Vaslin en particulier, l'homme, comme tous les êtres vivants, naît avec un programme de développement, qui va se déployer au long de son existence terrestre - et au-delà si on a foi en la survie. Il a un capital génétique pour son corps, sa pensée, son coeur et son âme - si on y croit. Une double hélice spirituelle, en plus de l'autre, en quelque sorte. Celui qui ne respecte pas son programme de vie devient malade, se détraque, se déstructure. Le programme de vie de tout homme, c'est l'amour, et à la base de l'amour, il y a la considération à porter aux autres, et à la base de la base, il y a la simple morale. La morale est notre nourriture de base, comme êtres dotés de raison et ouverts à la spiritualité, de la même manière que l'herbe est la nourriture des ruminants. Si nous ne nous nourrissons plus de morale, nous devenons fous. Comme la vache qui ne respecte pas son programme de vie à elle, qui boulotte de la bidoche au lieu de manger de l'herbe."
(p 377 et 378)





Merci à Suzanne de Chez les filles et aux éditions carnetsnord pour cette lecture prenante au plus haut point!







Une interview de l'auteur ici

dimanche 17 mai 2009

Jardin public


En ce dimanche mi-figue mi-raisin, une photo du kiosque du jardin public de Guingamp: un kiosque que je ne me lasse jamais de regarder au fil des saisons.

Je n'ai pas choisi de poème pour illustrer cette photo (prise fin avril) mais une petite histoire du kiosque dans les jardins publics: ces kiosques, parfois anodins, font partie intégrante du patrimoine de nos villes; d'ailleurs, ne font-ils pas partie du patrimoine administratif et public de France!


"De l’italien chiosco, mot lui-même emprunté au turc kiösk, un kiosque désigne à l’origine un pavillon de jardin surmonté d’un dôme porté par de légers supports.
La construction de kiosques à musique se diffuse principalement aux XIXe et XXe siècle, accueillant des festivités musicales diverses (avant 1848, ils étaient réservés à la fanfare militaire) à condition que les forces de l’ordre puissent intervenir rapidement en cas de problème. La scène est formée d’un socle maçonné recouvert d’un plancher surélevé pour faciliter la vue et y ranger des sièges en dessous. Le toit, à faible pente, protège des intempéries et sert de pavillon acoustique.
Dans un parc ou sur une place publique, le kiosque est souvent de forme polygonale ; il peut aussi servir d’abri pour des marchands."

samedi 16 mai 2009

Les méandres roux du renard


Arsène Le Rigoleur est un homme solitaire, taciturne, vivant seul, depuis que sa mère est au logement foyer, dans sa ferme fleurant bon l'ancien temps et le fumier. Arsène Le Rigoleur (diantre, qu'il n'aime pas son patronyme parce que "Le Rigoleur, c'est mon nom de famille. Le Rigoleur avec la particule, petite noblesse bretonne oblige. Le Rigoleur, oui, mais pas rigoleur pour deux sous. Qu'est-ce qui me ferait rire, hein? Est-ce que j'ai une tête à rigoler? Tiens, ça se saurait si l'habit faisait le moine." p 46) est un agriculteur breton, attaché viscéralement à sa terre, à son mode de vie rythmé par la course du jour, les gémissements des bêtes et le glapissement des renards à la tombée de la nuit. Arsène aurait préféré porter le patronyme de sa mère, Le Luern, le renard en français, nettement plus imposant que Le Rigoleur, cible facile des blagues éculées dispensées tant par l'instituteur que les filles dont Arsène se méfie tout en étant fasciné. "Le Luern,ça veut dire Renard en breton. (...) Une carte de visite dans les cours de récréation, et à la caserne plus tard. Auprès des filles aussi. (...) Arsène Le Renard, le malin dans l'histoire. Plus malin que le loup même. (...) Avec un tel patronyme, le Père m'aurait laissé tranquille. Un renard ne se dompte pas. Une bête sauvage reste une bête sauvage. Ni Dieu, ni maître." (p 49)
Un jour, la ferme du Père Morvan est vendue à des gens de la ville, un couple avec deux enfants, une fillette, Juliette, et un garçon, Louis. Louis, autant taciturne que Juliette est volubile, Louis à la chevelure rousse et au caractère sauvage du renard.
Très vite, Arsène et Juliette deviennent amis ce qui ne plaît pas à tout le monde: pensez donc, un célibataire tout le temps fourré avec une gamine, par les temps qui courent, ce n'est guère catholique mes braves dames! Avec Juliette à ses côtés, et Louis à l'épier sans cesse, Arsène retrouve avec un plaisir, teinté d'amertume, ses souvenirs d'enfance, laisse peu à peu remonter à la surface des blessures intimes et des secrets douloureux.
Arsène, en déroulant le fil roux du pelage des renards, se dépouille lentement, comme on peut le faire des pelures de l'oignon qu'on épluche, des couches sombres de sa mémoire et dévoile les coins les plus obscurs de son âme. Arsène Le Rigoleur est tout sauf un rigolo, il devient même inquiétant au fil de son récit.
Fabienne Juhel avec "A l'angle du renard" orchestre une extraordinaire histoire à l'atmosphère oscillant entre légèreté et oppression, met en scène une Bretagne que l'on a l'impression venir d'un autre siècle, alors qu'elle est contemporaine, celle des villages ou bourgs dormant à l'écart de la RN 12, la campagne idyllique qui cache une face âpre et dure où la sueur du front, la solitude et l'isolement sont le prix à payer pour rester sur ses terres.
Arsène Le Rigoleur est du genre taiseux mais c'est lui le narrateur, c'est lui qui se raconte, qui raconte les siens, qui raconte le pays; et ce qu'il raconte est loin d'être joyeux: dans un crescendo lugubre, Arsène en se racontant fait monter l'angoisse chez le lecteur, une chasse au renard troublante, image de cette vie qui file et se perd. Une histoire de terroir, sans en être vraiment une, où les paysages de campagne sont superbement décrits (on est sur la route de campagne empruntée seulement par les tracteurs du coin et les rares riverains, on sent l'odeur du lait à l'apporche de la traite, on est dans le potager à cueillir les petits pois, à croquer les radis, on entre, un peu inquiet, dans le poulailler épié par le coq, ramasser les oeufs),où les effluves doucement âcres du fumier se perdent dans le labyrinthe des secrets d'Arsène. Une histoire d'un homme ordinaire que l'on se met à craindre à mesure qu'il révèle ce qu'il a fait, il y a longtemps, pour échapper à ses démons et faire taire ceux de sa mère, la Mère qu'il aime à sa manière et à qui il offrira une rédemption.
Avec son personnage, Arsène Le Rigoleur, haut en couleurs blalançant entre bonhommie et conduite inquiétante, Fabienne Juhel explore les relations binaires des hommes, contradictoires, diamétralement opposées ou tout simplement confuses et indicibles. Ainsi, le lecteur est-il ballotté entre la croyance (celle de la Mère, de Louise, la sage-femme et faiseuse d'anges) et la non croyance (celle d'Arsène, qui est particulière, celle des voisins venus de la ville); entre la ruralité et le citadin, la justice et le crime (Arsène est glaçant et en même temps attachant), l'honneur et le deshonneur (Yvan qui laisse tomber sa ferme alors qu'Arsène est viscéralement attaché à la sienne); tous les ingrédients sont présents pour fabriquer un roman populaire que l'écriture, volontairement familière, parlée, enjolivée d'expressions locales, de l'auteur transcende par ses moments de poésies intenses, ses superbes descriptions de la campagne, des talus et des bois, et ses moments de douleur et de solitude, celles qui bercent, lancinantes, les hameaux ou les villages endormis au coeur de la modernité.
"A l'angle du renard" est un roman qui, l'air de rien, commence comme un roman du terroir aux accents populaires, se développe comme un roman policier pour s'achever en une succulente histoire où l'âme humaine est décortiquée, sans concession, et mise à nue avec tendresse derrière la réalité crue.






mercredi 13 mai 2009

Monstres, dents longues et aventure


Max est un petit garçon comme il en existe beaucoup: il a du caractère et lorsqu'il n'accepte pas une remontrance, il enfile son costume de loup. Et une fois ce costume de loup enfilé, les bêtises ne tardent pas à se succéder jusqu'à ce qui doit arriver arrive: la punition!

Souvent, les punitions aident à réfléchir et parfois la réflexion entraîne bien loin les pensées du puni.

Max embarque donc sur un bateau, navigue des jours et des jours, une année entière, pour accostersur l'île des Maximonstres. Qu'ils sont terriblement affreux et dentus ces Maximontres, ils ne font même pas peur et Max les domptent en clin d'oeil. Une monstrueuse maxi fête est organisée au cours de laquelle Max devient le roi des Maximonstres. Seulement voilà, Max commence à se languir du giron maternel et prend le chemin du retour, abandonnant les Maximonstres bien tristes de perdre un roi si formidablement monstrueux! Mais que trouvera Max à son retour?

"Max et les Maximonstres" est un album dont on ne se lasse pas et qui est un incontournable de la littérature jeunesse.

Il faut dire que la construction est bien menée: la relation d'ordre (les bêtises, la punition, le rêve, le retour à la réalité) permet de plonger, tête baissée, dans le rythme du récit, permet à l'enfant de s'identifier au jeune héros rebelle. Max revêt son costume de loup pour agacer sa mère, il va jusqu'au bout de son mécontentement, il provoque en faisant ses bêtises une par une, crescendo pour bien malmener la patience maternelle. La symétrie est parfaite entre le rêve et la réalité (Max reproduit le discours maternel "Vous irez au lit sans souper!" devant les Maximonstres qui abusent de sa patience), Max est à la recherche de l'amour maternel, peut-être perdu en raison de son altercation avec sa mère; quant à la chute "tout chaud" elle est délicieusement double: abrupte (elle rappelle la chute de la comptine "la souris verte") ou plus profonde, plus intime: la réalisation du voeu le plus cher de notre rebelle Max, la quête de l'amour maternel mais aussi l'expression de la relation mère-enfant au coeur de laquelle le conflit permanent entre amour étouffant et amour révolté scande la vie de tout enfant. On veut être libre mais en même temps on n'a besoin que d'une seule chose: le creux chaud des bras maternels! Ces merveilleux bras qui seront toujours là, même après de bien longs voyages, même après bien de longues années. Maurice Sendak a bien perçu et retranscrit, tant par l'illustration que par le texte, l'inconscient enfantin pour le plus grand bonheur des lecteurs, jeunes et moins jeunes (Ici, on en parle vraiment bien)!

Un album à mettre dans toutes les bonnes bibliothèques et entre toutes les mains!

L'avis de antigone malice

La bande annonce du film inspiré de ce merveilleux album ici . Il sort en France en octobre prochain (le 14 pour être précise)....à vos agendas!

Juste pour le plaisir des yeux

(clic sur la photo pour admirer la Coupe)
....et je n'en parlerai plus!


J'ai eu le privilège de faire partie du comité d'accueil des héros et de pouvoir photographier la Coupe de France (elle est vraiment superbe!!) en compagnie du Capitaine de l'équipe.

mardi 12 mai 2009

Qu'il est bon de lire!

Masse Critique orchestrée de main de maître par Babelio revient! Pour adopter des livres c'est ici !




Je rempile avec joie pour la seconde édition du Prix Landerneau: 6 romans à lire, une belle sélection qui semble réserver de beaux moments de lecture.


Plaisirs épucuriens et assiettes ensoleillées


J'avais repéré ce petit livre lors de mes promenades bloguesques et c'est Mirontaine qui me donne l'occasion de satisfaire ma curiosité!
Il s'agit d'un recueil de nouvelles dont le thème est la nourriture italienne: Alain Absire déroule pour son lecteur les plats d'un menu italien des antipasti aux douceurs sucrées réservées au dessert. Aussi l'invite-t-il à s'installer confortablement à la terrasse d'un restaurant, sous le soleil d'une fin de printemps, dans la douceur d'une Toscane ou la torpeur d'une Rome, pour lire avec attention les propositions alléchantes d'une jolie carte jouant avec le temps et l'histoire! D'un dîner en duo à un échange épistolaire entre époux romains (d'une saveur délicieusement sensuelle), en passant par un concours culinaire où les pasta sont reines, par l'atelier sombre d'un Botticelli anémié par la nostalgie ou lors de la veillée du corps de St-François d'Assise par un moine oenologue, Alain Absire parfume ses pages de délicieux fumets, de subtiles senteurs d'arômates, de tapis de couleurs vives, de fumée s'échappant d'un bol de soupe, de robes dorées d'un crû charnu et rond, roulant dans le gosier comme une ode à la beauté du monde, de saveurs miellées titillant le palais. Le tout servi par le savoir-faire d'une famille italienne, les Castruccio dont on découvre les multiples talents au fil des siècles. Chaque description de plat est un plaisir partagé, un raffinement et une multitude d'images et de flaveurs où la poésie et le subtil érotisme sont de mise. La force d'évocation du langage prend une dimension épicurienne au sens noble du terme: les douceurs culinaires sont autant de douceurs de la vie.
"Saga italienne" est un recueil à savourer lentement, à déguster comme une belle gourmandise. C'est avec ravissement que l'on tourne les pages où les mets succulents ne demandent qu'à être réalisés!

"Carpaccio con rucola. Dix tranches fines de gîte à la noix, une marinade de jus de citron d'Amalfi, de l'olio d'oliva des collines de Brindisi avec des parfums d'herbacées, et quelques lamelles de parmesan frais, le tout reposant sur un lit de rucola. (...) En vérité cette rucola est un délice, avec ses feuilles qui craquent sous la dent et, à peine souligné par le goût piquant de la gousse d'ail, ce qu'il faut d'amertume sous le palais...." (p 13 et 14)

"Pour vous, j'ai mis dedans les viandes les plus tendres, celles qui, jeunes et gorgées de sève, ruissellent de bon jus gras quand, toutes bouillies, elles fondent sous la langue. Mélangés au bouillon, j'ai mis aussi des oeufs de la basse-cour aussitôt pondus aussitôt battus; j'ai mis le safran dont l'essence rare vous embaume la bouche, j'ai mis la menthe fraîche dont le parfum imprègne jusqu'aux doigts du maître-queux. Mêmé d'épices, de marjolaine et de persil, j'ai mis, moitié vieux, moitié de cette année, le verjus acide tiré des raisins verts de Toscane, et, pour colorer l'ensemble, j'ai versé par là-dessus une grande quantité de parmesan râpé." (p 53)

"Le bouchon de la bouteille a sauté en moins de deux. De la poire, du miel de nos soeurs les abeilles....Flatté, le nez de Martirio Castruccio s'ouvre aux exhalaisons de la création.
La première goulée de vin d'Ombrie est un baume qui tapisse les parois de son gosier désséché. Comme c'est doux! Comme c'est sucré! Il lui en faut encore pour confirmer. Cette fois dominent des saveurs de petits fruits rôtis. (...) Quel éclat! Quel arôme! On dirait de l'or qui s'écoule des plaies de Jésus. (...) Et ce goût de noisette, qui lui reste au fond du palais! C'est ravissant. S'arrêtant à peine pour rependre haleine, il s'empli jusqu'à la dernière goutte de cette fraîcheur aérienne. Il a comme des graines d'épices, un peu mordicantes, qui lui roulent sous la langue. Exalté par une pointe d'amertume, un bouquet de safran et de champignon lui fleurit dans la bouche. (....) Que d'arômes subtils, avec de la prune confite et tout un panier de fruits de saison! Un arc-en-ciel de délicatesse, qu'il engloutit entièrement."
(p 67, 68 et 69)

Merci Mirontaine de me faire partager les senteurs italiennes qui te tiennent à coeur!

L'avis de Flo sur paperblog

dimanche 10 mai 2009

Enfance lumineuse


Tomoko part passer un an chez son oncle: après le décès de son père, sa mère part à Tokyo parfaire sa formation professionnelle. Tomoko a douze ans et va découvrir un monde qu'elle était loin de douter qu'il puisse exister. Elle rencontre son oncle, dont la mère, Grand-Mère Rosa, est allemande, souvent absent, sa tante qui oublie sa solitude entre l'alcool et la recherche des coquilles d'impression, et sa cousine, la tendre et rêveuse Mina, souffrant d'asthme et grande collectionneuse de boites d'allumettes à partir desquelles elle invente d'incroyables histoires. Elle fait al connaissance aussi de Pochiko, l'hippopotame naine, ultime animal du zoo de l'entreprise dirigée par son oncle.
Alors que Mina est une grande lectrice et est attirée par la culture européenne, Tomoko regarde ces choses de loin, étonnée par les particularité de ce qui vient de l'étranger.
"La marche de Mina" est à inscrire dans la continuité de "La formule préférée du professeur": un roman initiatique dont les racines appartiennent à l'enfance qui lentement s'enfuit, qui doucement apporte les éléments pour accéder au monde adulte. L'admiration amoureuse pour le cousin vivant en Suisse, la tendresse éprouvée envers Pochiko, original animal de compagnie, la douceur des moments passés aux côtés de Grand-Mère Rosa et de Mme Yoneda, l'enquête secrète sur le livreur de Fressy amenant à découvrir le pourquoi des absences prolongées de l'oncle, le Noël aux parfums européens orchestré par Rosa et ses souvenirs, la complicité avec Mina dans la salle de bain de lumière mais aussi l'apprentissage de la mort. L'enfance, moments merveilleux de l'éphémère, de ce fragile éphémère que l'on regarde avec tendresse par-dessus son épaule une fois adulte. La sérénité d'un temps qui sera vite révolu, l'époque d'une génération unique: la sienne.
Ogawa nous promène dans les années 70 au Japon avec comme point d'orgue les Jeux Olympiques de Munich en 1972: "La marche de Mina" tire un fil de cette pelote, le fil de l'équipe japonaise de volley-ball, celle qui remportera le titre olympique, celle qui scande les heures de Mina et Tomoko, fervente supportrices des volleyeurs. Une pelote des souvenirs de Grand-Mère Rosa dont on déroule, subrepticement, quelques mailles: son mariage l'emmenant vivre au Japon et la sauvant de la déferlante nazie, sa capacité à ne pas oublier d'où elle vient, son attachement aux Noëls allemands, son regard chargé de tristesse devant la prise d'otages israëliens par un groupuscule palestinien, miroir lui renvoyant la disparition des siens.
Lentement, le tricot d'enfance de Tomoko s'achève, rang par rang: le monde des adultes est rempli de secrets qu'il ne fait pas bon de découvrir, l'attachement enfantin envers le cousin qui a la beauté du métissage, la découverte d'un ailleurs non japonais, une comète traversant le ciel, instant unique dans une vie, le partage virtuel de lectures avec le bibliothécaire, ouverture sur un monde inconnu mais fascinant.
"La marche de Mina" se lit comme on sirote un diabolo grenadine et se déguste comme une pâtisserie que l'on mangeait enfant: on retourne aux sources de nos souvenirs couleurs sépia et des instantanés aux couleurs devenues pâles avec le temps, sur un doux air accompagnant cette tendre plongée dans les derniers feux de l'enfance.
...Les plus beaux souvenirs sont ceux que le temps et ses transformations n'effacent pas.


Roman traduit du japonais par Marie Makino-Fayolle




samedi 9 mai 2009

Une fois n'est pas coutume



Ce samedi 9 mai 2009 est une journée en rouge et noir....


La Bretagne est à l'honneur au Stade de France....il est certain que les joueurs "ne marcheront jamais seuls" pendant la durée de cette finale historique.




WAR -RAOK !


(en avant!)


Edit de 23h25:


Elle sera à Guingamp demain!

vendredi 8 mai 2009

Parfum d'Histoire


Il y a 64 ans s'achevait, enfin, la Deuxième Guerre mondiale, les armées nazies capitulaient, la France redevenait libre et l'Europe n'était plus un concept utopiste mais devenait un futur très proche.

Ce matin, j'ai assisté à la cérémonie du 8 mai, sous la grisaille puis sous la pluie. Les anciens combattants, qui en avaient vu bien d'autres, étaient hilares sous leur casquette ou tête nue, les parapluies fleurissaient tandis que les musiciens de l'Harmonie Municipale jouaient, stoïques, trempés jusqu'aux os. Un envol de pigeons a accompagné la commémoration, puis l'hymne européen s'est envolé à leur suite. Un beau symabole, d'autant plus fort que le texte des Anciens Combattants vibrait de paix, de tolérance et de partage. C'est ce texte qui m'a émue et cet hymne qui j'espère un jour deviendra unique pour chaque pays européen....oui, je fais ce rêve.

La cérémonie s'est achevée par la remise, officielle, du livret du jeune citoyen et de la carte d'électeur, aux jeunes de la commune qui vont pouvoir le 7 juin prochain acter leur nouvelle appartenance à la vie de la cité et exercer leurs droits et devoirs de citoyens. Un moment émouvant: les jeunes qui avaient répondu à l'invitation de Madame la Maire saisissaient la particularité de cette remise officielle. Mon seul regret, partagé et exprimé publiquement par la Maire, fut la criante absence des jeunes filles....il y a 64 ans, seulement, que les femmes ont le droit de vote et cet acquis doit être chèrement préservé même s'il semble être perenne! Le 29 août 1945, les élections municipales donnaient l'occasion aux femmes de mettre en pratique l'ordonnance du 21 avril 1944, du gouvernement provisoire du Général de Gaulle à Alger....ne pas oublier la longue lutte féminine pour obtenir le droit de s'exprimer et de s'émanciper

mercredi 6 mai 2009

Cadeau d'anniversaire empoisonné?


Louis a un oncle formidable, l'oncle McAllister, qui comme son nom l'indique vit en Ecosse. Au fait, il ne vit pas n'importe où en Ecosse, il habite près du Loch Ness!

Chaque année, l'oncle McAllister envoie un cadeau, glané au fil de ses promenade autour du loch, à Louis afin d'alimenter sa collection de curiosités. Louis est un petit garçon passionné de sciences et curieux de tout.

Cette année, Louis reçoit un drôle d'animal dans un bocal: c'est un têtard dit la maîtresse lorsqu'il l'apporte en classe.

Louis observe le développement d'Alphonse le têtard qui devient très vite un mystérieux têtard: très vite, Alphonse a besoin d'espace, de plus en plus d'espace....rempli d'eau! Par ailleurs, l'appétit d'Alphonse est loin de se satisfaire de quelques petites mouches ou vermisseaux: Alphonse dévore les hamburgers.

Louis est heureux avec son drôle de têtard et trouve qu'Alphonse apprend beaucoup de choses très rapidement: jouer au rugby et chahuter avec les copains et les copines. Bref, le bonheur serait parfait si Alphonse arrêtait de grandir: bientôt l'évier de la cuisine, puis la baignoire ne lui suffisent plus. Que faire?

Heureusement, l'été arrive et la piscine du lycée peut être utilisée...en cachette! Bien entendu, tout ne se déroule pas comme prévu et Alphonse devient vite un sujet inconfortable. Parfois, une aide inattendue arrive pour trouver une solution: la bibliothécaire trouvera le remède, historique, aux déboires d'Alphonse et de Louis!

Quant à l'oncle McAllister, il trouve une autre curiosité lors d'une excursion autour du loch; curiosité très vite envoyée à l'occasion de l'anniversaire de Louis: un bel oeuf qui se fendille et laisse apparaître un drôle de poussin!

"Le têtard mystérieux" est un album au graphisme très BD, aux couleurs pastels charmantes et drôles. Une histoire qui ravira les petits curieux de nature, les amateurs de mystères préhistoriques, aux rêveurs d'une amitié extraordinaire avec un animal extraordinaire!

C'est une belle occasion d'aborder l'histoire du fameux Nessie, le monstre du Loch Ness, qui défraya souvent la chronique, depuis sa première apparition en 1934: reptile marin ou canular?

Outre l'humour du texte, on peut jouer à retrouver des petits détails dans les illustrations (à la page 30 - dans la piscine - combien d'enfants y a-t-il?), dans le texte (quel est l'âge de Louis au début, à la fin de l'histoire?).

De plus, l'histoire commence bien avant la première phrase et ne s'achève pas à la dernière: un vrai régal à faire découvrir la magie de la structure ouverte du récit!

Un album indémodable qu'on ne se lasse pas de regarder et de lire.

lundi 4 mai 2009

Fleurs de cerisier


Le printemps qui s'éloigne

hésite

parmi les derniers cerisiers.

Buson (1716-1783)
(Photo du merisier de mon jardin...pour débuter joliment la semaine )

dimanche 3 mai 2009

Y aurait-il une vie en dehors des livres?

Voici une lecture d'une grande fraîcheur! Une histoire où les pistes envoient une libraire par monts et par vaux, à la rencontre de gens improbables et inattendus et où la vie réelle se mêle avec bonheur à la vie rêvée.
Un homme et une femme se rencontrent quotidiennement , dans un café, autour d'un whisky et d'une cigarette. Ils ne se connaissent pas mais échangent avec passion leurs lectures et leur amour des livres. Puis, chacun retourne chez lui, solitaire, sans se retourner. Passent-ils à côté d'une belle rencontre? Ne voient-ils pas la possibilité de vivre un amour? A priori non, Corinne s'est séparé de son mari et vit de petites aventures sans incidence ni encombrement dans sa vie, Paul, quant à lui reste divinement mystérieux.
Un soir, Corinne attend vainement Paul. L'attente se reproduit chaque soir jusqu'à ce que Corinne décide de savoir ce qui a pu arriver à Paul pour qu'il disparaisse sans laisser de trace.
C'est ainsi qu'elle rencontre un improbable oncle qui n'a de russe que l'accent durement travaillé, un photographe de cadavres, incompris de ses contemporains et cruellement nombriliste, un pianiste de jazz au coeur de New York, Paul Auster et sa femme, une retraitée anglaise à l'excentrisme délicieux et un barman très discret. Pour quelqu'un qui ne vivait qu'à travers ses livres, Corinne, pour retrouver l'amour de sa vie, brave ses peurs et ses angoisses....Paul est une chance qu'elle a été idiote de laisser passer une fois, si elle le retrouve, elle lui dira son amour. Elle qui a cru reconnaître Paul parmi les "Visages de morts" exposés par le photographe Jasper Shifer, se dit que ne pas connaître la vérité serait rater une fois de plus sa vie "Elle avait compris que sa vie n'aurait jamais aucun sens si Paul restait mort." (p 23). Son enquête est son fil d'Ariane pour sortir du labyrinthe intérieur de ses lectures et son repli sur soi: lentement, elle renaît, doucement elle voit à nouveau le monde autour d'elle, tendrement son coeur se remet à battre à la chamade pour un homme qui lui file, consciencieusement, entre les doigts.
C'est avec un entrain sans pareil que le lecteur suit les pérégrinations de notre libraire devenue globe trotter, telle Indiana Jones à la recherche de son amour perdu. Entre la vie vécue par procuration et la vraie vie, les frontières deviennent de plus en plus distendues au profit de la réalité, des vraies rencontres ou des échanges à corps perdus.
"La libraire a aimé" ou quand la réalité rejoint la fiction et inversement: un petit bonheur vivifiant, une bulle dans laquelle on se prélasse le temps de la lecture, un moment ou des longs instants lorsque l'on ne veut pas arriver trop vite à la fin....la dégustation a du bon!



Merci pagesapages d'en avoir fait un livre voyageur!


Le blog de l'auteur ICI