samedi 31 décembre 2022

L'oiseau moqueur

 


La quatrième de couverture n'en dévoile pas trop et met tout de suite dans l'ambiance

"Pas de questions, détends-toi". C’est le nouveau mot d’ordre des humains, obsédés par leur confort individuel et leur tranquillité d’esprit, déchargés de tout travail par les robots. Livres, films et sentiments sont interdits depuis des générations. Hommes et femmes se laissent ainsi vivre en ingurgitant les tranquillisants fournis par le gouvernement. Jusqu’au jour où Paul, jeune homme solitaire, apprend à lire grâce à un vieil enregistrement. Désorienté, il contacte le plus sophistiqué des robots jamais conçus : Spofforth, qui dirige le monde depuis l’université de New York. Le robot se servira-t-il de cette découverte pour aider l’humanité ou la perdre définitivement ?"


Le titre de la première traduction était « L'oiseau d'Amérique », moins porteur, il faut l'avouer. J'ai mis un peu de temps à comprendre ce changement, les indices se récupèrent tout au long de la lecture.

Walter Tevis imagine, en 1980, un monde sur lequel règne les robots, des plus sophistiqués aux plus basiques, un monde dystopique poussant à l'extrême la robotisation d'une société.

Souvenez-vous des années 80 ! La robotique, en plein essor, était le gage d'une société moins soumise au travail et plus portée vers les loisirs. L'avenir semblait radieux et, ma foi, heureusement que le monde merveilleux des robots prenant la place des humains n'a pas été créé. Quoique, maintenant, nous avons le courant transhumaniste surfant sur les progrès scientifiques et technologiques époustouflants, frôlant dangereusement la ligne rouge.

Revenons au roman « L'oiseau moqueur ».

Le monde de Paul Bentley est aseptisé, automatisé au plus haut point. Les êtres humains sont en voie d'extinction, ils ne savent plus communiquer entre eux ou penser ou encore s'intéresser à quoi que ce soit de dérangeant. La rengaine « Pas de questions, détends-toi » est la phrase magique intimant à l'humanité de ne pas faire de pas de côté. Aussi, a-t-il été nécessaire de proposer des dérivatifs chimiques et naturels aux hommes : calmants, haschich et stérilisation massive des populations. Ainsi annihile-t-on la curiosité d'esprit, l'envie d'apprendre inhérentes à l'être humain.

Nous sommes en 2400, même le dernier robot le plus sophistiqué, Spofforth, est au bord de la neurasthénie, cherchant, désespérément, à se suicider chaque année, sans y parvenir. En effet, les robots de sa classe craquaient à moyen terme et se suicidaient si bien qu'un léger changement dans la programmation fit de Spofforth une IA dépressif.

Au début de la lecture, le sourire me venait facilement aux lèvres puis très vite il disparut sous l'effet glaçant de la dystopie.

Les livres n'ont pas été brûlés comme dans Fahrenheit 451, ils ont été tout simplement retirés des bibliothèques pour être oubliés au fin fond des réserves, dans les sous-sols.

Plus de livres, plus de lecture, plus d'accès à l'imaginaire, plus de structuration de la pensée, plus d'échanges de points de vue, plus d'envie d'apprendre et de savoir, plus d'émulation, plus de projection dans le passé ou dans le futur. On assiste à l'appauvrissement de langage et donc à la disparition du libre-arbitre et des émotions. Pour que les êtres humains puissent supporter cela, il a fallu les rendre dépendants aux anti-dépresseurs et aux joints. Cependant, malgré cela, certains se rassemblent et s'immolent en place publique.

Bien entendu, Paul sera le grain de sable dans les rouages d'une société qui tourne à vide. Il apprendra à lire en tombant, par hasard, sur un manuel d'apprentissage de la lecture.

Bien entendu, accéder à la lecture lui ouvrira les portes de la réflexion et donc... des questionnements existentiels. Ce qui le conduira auprès de Spofforth, à New-York et lui permettra de rencontrer Mary Lou, jeune femme élevée en marge des pensionnats. Avec elle, Paul apprend à aimer, à partager, à éprouver d'innombrables émotions, sensations et sentiments. Les deux amants, les Adam et Eve d'un monde en devenir, recouvrent leur humanité et sont la clef d'un avenir rassurant : ils sont un bug dans le bug qui construisit le monde de 2400.


Ce qui m'a plu dans le roman c'est que l'auteur pousse jusqu'au bout le raisonnement du tout robotique en vogue dans les années 80. Le monde est sans odeur, sans saveur quand on n'a rien à faire pour gagner son pain, une alimentation d'ailleurs insipide puisque fabriquée à partir d'une plante, produite en monoculture, dont le nom est un numéro, garantie avec OGM.

Walter Tevis, avec une écriture des plus efficace, relate la remise en route d'un cerveau humain, celui de Paul Bentley. Il reconquiert sa liberté de penser, de créer, de réfléchir, d'inventer et de croire en une entité supérieure, celle de Dieu.

L'éveil à la conscience de Paul est faite d'obstacles, de peurs et surtout d'aventures parfois cocasses, parfois émouvantes. Il y a une scène édifiante : celle de l'usine de fabrication de grille-pain qui tourne en boucle stérile -assemblage des pièces, montage final, vérification … et mise au pilon pour défectuosité et enfin recyclage puis tout recommence- tout cela parce qu'un boulon est tombé dans un rouage de la chaîne. Ce que Paul remarque et répare en un seul geste. Depuis combien de temps durait le cycle infernal ? Aucun robot n'avait « pensé » à ce type de panne. L'oeil humain est irremplaçable, CQFD.

L'absurdité de ce monde dystopique est que les robots ne parviennent même plus à se réparer, entraînant une série de dysfonctionnements et amenant le monde au bord du chaos.

Les robots remplaceront-ils l'homme en le transformant en être dénué de bon sens et d'intelligence ? Derrière l'horreur de la disparition de la Culture, de la lecture, de l'écriture, de tous les objets véhiculant le savoir et la connaissance, l'espoir est toujours présent : il est nécessaire de faire confiance à l'être humain car il y en aura toujours un qui ouvrira les yeux, par hasard ou pas, et qui se redressera et partira à la reconquête de son humanité.

La fin du roman est absolument magnifique : le geste d'amour, de Paul et Mary Lou, envers Spofforth m'a émue au plus haut point.


« L'oiseau moqueur » est un très beau roman sur ce qui fait la beauté de l'humanité, capable du pire comme du meilleur.

Traduit de l'anglais (USA) par Michel Lederer

Un extrait:

"Pourquoi ne nous parlons-nous pas ? Pourquoi ne nous blottissons-nous pas les uns contre les autres pour nous protéger du vent glacial qui balaye les rues désertes ? Autrefois, il y a très longtemps, il existait des téléphones privés à New York. Les gens se parlaient alors, peut-être à distance, de façon étrange, avec des voix rendues ténues et artificielles par l'électronique, mais ils se parlaient. Des prix des produits alimentaires, des élections présidentielles, du comportement sexuel de leurs enfants, de leur peur de la météo et de leur peur de la mort. Et ils lisaient, ils écoutaient les voix des vivants et des morts leur parler dans un silence plein d'éloquence, connectés à cette rumeur du discours humain qui devait s'enfler dans leur esprit pour dire : Je suis humain. Je parle. J'écoute. Je lis."

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mardi 27 décembre 2022

Bons baisers de Lénine

 


La dernière fois que j'ai lu Lianke Yan, c'était en 2008, année des jeux olympiques d'été à Pékin. J'avais souhaité lire un roman à contre-courant de ce que faisaient passer les autorités chinoises dans les médias. Je n'avais pas été déçue en lisant « Servir le peuple ».

« Bons baisers de Lénine » dormait depuis plus de deux ans dans ma bibliothèque, le défi « En sortir 22 pour 2022 » m'a poussée à le sortir de son rayonnage.


Benaise est un village perdu au milieu de nulle part dans les montagnes du Henan, et chaque habitant y vit « bénaise » autrement dit tranquille et sans souci majeur.

Benaise a une particularité, et non des moindres, qui est d'être peuplée uniquement de gens handicapés, éclopés, malmenés par la vie. Tout ce petit monde vit loin du charivari du monde, en marge de ce dernier, menant son quotidien loin des tracas administratifs des autorités du district.

On apprend, grâce aux commentaires de l'auteur, roman dans le roman, que Benaise est depuis la nuit des temps le refuge des infirmes.

Benaise est « dirigé » par une figure féminine, Mao Zhi, qui ramena dans le giron du district le village. Cette dernière voit d'un mauvais œil le chef du district souhaiter organiser la « benaisade » à laquelle participeront les villageois.

C'est au cours de la fête que vient à l'idée du chef du district d'utiliser les talents inouïs des Benaisois pour créer une troupe de cirque et gagner ainsi de l'argent afin d'acquérir la momie de Lénine, délaissée à Moscou car trop coûteuse à entretenir. Si cela se concrétisait, quelle réussite pour le chef en question et quel rayonnement glorieux pour cette région perdue au milieu de nulle part et quel merveilleux développement économique en perspective. Une occasion unique de mettre en pratique le slogan de Deng Xiaoping « enrichissez-vous ».

A partir de là, commence une aventure rocambolesque, drolatique et incroyable au cours de laquelle tous les défauts et qualités humaines seront passés au crible ravageur de l'humour de l'auteur.

Il est impossible de résumer ce roman fleuve en quelques lignes qui ne lui rendraient absolument pas justice. Il faut le lire, surmonter son organisation déroutante (les notes peuvent devenir des chapitres à part entière) qui m'a rappelé celle de « L'arbre monde » de Richard Power (qui a peut-être lu Lianke) puisque la lecture part des « racines » pour arriver à la dernière partie « les graines ». La narration naît et croît tel un arbre majestueux, emmenant le lecteur dans les méandres des frondaisons, ces petites notes qui apportent, l'air de rien, beaucoup au récit.

La galerie des personnages est croquée de manière drolatique avec juste ce qu'il faut de pointe ironique. Ils sont tous attachants et j'ai suivi avec jubilation leurs aventures et déboires, tantôt riant de bon cœur, tantôt avec émotion.

Je me suis demandé, à plusieurs reprises, pourquoi la censure chinoise n'a pas sanctionné « Bons baisers de Lénine » car Lianke n'y va pas de plume morte pour critiquer l'appareil politique chinois. Aurait-elle bon goût ? Ou l'auteur possède-t-il au plus haut point l'art de l'ironie subtile  et ainsi échapper aux risques d'emprisonnement ? A moins que la censure, devant la notoriété internationale de Lianke, a compris qu'il était un des grands romanciers contemporains.

Lianke met en place avec « Bons baisers de Lénine » une fable extraordinaire, un conte hallucinant où la momie de Lénine tient lieu de Graal communiste. Mao Zhi, elle, espère qu'une fois la quête accomplie, Benaise soit « déjointée » et retourne dans l'oubli afin que tout un chacun puisse y vivre paisiblement, loin des tracas administratifs et des exigences du Parti. Sauf que le chef du district ne tient absolument pas à abandonner sa poule aux œufs d'or. Sauf que... forcément rien ne fonctionnera comme prévu sinon ce ne serait pas amusant. Entre les délires de gloire et de richesse des uns et des autres, s'immisce une angoisse récurrente, celle qui naît de l'opposition entre les idéaux de la Chine révolutionnaire d'hier et la vision nouvelle de la Chine capitaliste d'aujourd'hui.

Yan Lianke réussit, magistralement, à conter cette quête du Graal avec une narration longue (655 pages), un récit protéiforme, frisant carrément le délire (le lecteur est emporté dans un maelstöm de situations relevant du picaresque ou de la farce comique sans filtre), et laisse au lecteur une liberté d'interprétation incroyable.

« Bons baisers de Lénine » est un roman jubilatoire, succulent, parfois cruel, qui m'a embarquée dans un voyage romanesque délirant et joyeux.

Traduit du chinois par Sylvie Gentil

(Roman de 655 pages)

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lundi 26 décembre 2022

Le piège d'or

 


Les (fantastiques) dessous des classiques nous emmenaient en décembre à la découverte du Grand Nord. J'ai choisi de partir en Amérique du nord aux côtés d'un auteur classique méconnu James Oliver Curwood. Il y a du Jack London dans ses récits sans sa dureté.


« Bram Johnson est une créature hors du commun. Un géant solitaire, métis esquimau à la tignasse rousse et au rire fou. À la fois une légende vivante et… un criminel. Capable de disparaître comme par magie, il parcourt les étendues glacées du Grand Nord canadien avec sa meute de loups assoiffés de sang, loin du monde des hommes. Pour les Indiens superstitieux du Barren, il s’agit d’un homme-loup ! […]"


D'emblée le décor est planté : l'immensité glacée du Grand Nord canadien, sa solitude pouvant mener à la folie, sa faune et ses tribus sans pitié.

Bram, métis solitaire à la tignasse rousse vit avec sa meute de loups, sans cesse pourchassé par les autorités pour meurtre. Légende vivante, homme-loup aux yeux des Indiens du Barren, il mène une vie isolée du monde des hommes. Il apparaît et disparaît aussi soudainement qu'un esprit, provoquant la peur parmi les natifs et les hommes de la Police montée.

Philip Raine, patrouilleur de la Police montée canadienne, se lance à sa poursuite, bien décidé d'en finir avec cet homme hors du commun.

Un long périple, doté de nombreux dangers, est entamé par le patrouilleur. Le souffle glacé du Grand Nord étreint faune et flore, recouvre de silence les forêts interminables en apportant à Raine le fardeau de la froide solitude.

Jim Curwood relate la vie de Bram Johnson et laisse le lecteur apercevoir une personnalité loin d'être inhumaine, bien au contraire : Bram aurait pu se débarrasser de Raine plus d'une fois mais ne le fait pas. Lors de leur confrontation, intense dans la nuit polaire, Bram laisse tomber de sa poche un piège. Quand Raine le récupère il découvre qu'il est particulier : des cheveux d'un blond doré en sont une des composantes. Comment l'homme-loup a-t-il pu se procurer ces mèches de cheveux ? Qu'a-t-il commis pour les avoir ? Et surtout à qui appartenaient-elles ? L'enquête commence ainsi que l'histoire sentimentale entre le patrouilleur et la blonde captive.


« Le piège d'or » est, sans conteste, un roman d'aventure. Il happe son lecteur dès les premières pages et le confronte avec deux univers différents : celui de l'immensité blanche et glaciale des paysages du Grand Nord, mystérieux et truffés de dangers, et celui de la civilisation policée.

Avec Bram Johnson et Philip Raine, ces univers s'affrontent dans un combat digne du western des grandes plaines étasuniennes. Car, à mes yeux, « Le piège d'or » est un western doté des poncifs du genre : le gentil blanc de la Police montée, le meurtrier fou métis recherché depuis tant d'années qu'on le croyait mort et les méchants issus d'une tribu indigène. Raine est suffisant et méprisant envers les membres de la tribu indigène qui poursuit les blancs ayant accosté dans le Barren, il est dénué d'empathie envers Bram qu'il considère comme un aliéné qu'il faut supprimer. Cerise sur le gâteau, il est tellement imbu de lui-même qu'il ne peut concevoir que la jeune captive puisse avoir des sentiments envers Johnson. Ce dernier a sauvé la jeune femme des griffes d'une tribu indigène agressive et est subjugué par la blondeur dorée de sa chevelure. Au point qu'elle lui a donné plusieurs mèches dont il s'est servi pour le fameux piège d'or.

« Le piège d'or » ayant été écrit au début des années 1920, il est nécessaire de prendre du recul en lisant les passages décrivant les membres de la tribu indigène comme étant des « noireauds », des « moricauds » et décrits comme des petits êtres malfaisants suivant plus leurs instincts animaux que leur intelligence. Ces passages sont choquants pour des lecteurs contemporains d'où l'importance de connaître le contexte historique de l'époque.

En réfléchissant à la manière dont l'auteur met en place la psychologie de ses personnages principaux, je ne suis pas certaine que son héros soit celui que l'on croit : il fait de Philip Raine un homme épouvantablement insupportable avec sa vision conquérante et dominatrice du monde. Tout doit être soumis à la supériorité de la civilisation blanche ainsi qu'à l'autorité du mâle. La pauvre captive, suédoise, n'a pas son mot à dire : Raine est incapable de comprendre pourquoi elle ne voit pas en Bram un aliéné dangereux ne méritant que la mort. Est-ce intentionnel de la part de l'auteur que Raine ne soit qu'une caricature de cow-boy ?

Je me pose la question car Bram m'a paru plus humain et plus empathique que Raine. Bram a ses blessures intimes qui ont fait qu'il est devenu un être asocial, préférant la solitude et l'amitié avec ses loups à la compagnie des hommes. Sous son aspect de brute sauvage, Bram est un homme vivant en symbiose avec la nature du Grand Nord : il est dur car la survie dans un environnement extrême exclut la moindre faiblesse physique, et cependant à l'écoute des sensations d'autrui.

J'ai vraiment aimé ce héros à la marge cachant sous une apparence brutale un cœur chaleureux, capable de compassion et d'empathie envers ses semblables. J'ai frissonné quand il explique à Raine pourquoi il a commis le meurtre dont il est accusé, quand il dit que l'autre l'avait accusé d'être un voleur alors que ce n'était pas le cas. J'ai eu l'impression de voir Elephant man, cabossé par la vie et les hommes lâchant leurs instincts cruels envers les plus faibles, envers ce qui est différent.


« Le piège d'or » est un vrai roman d'aventure qui aborde des sujets importants et complexes tels que la confrontation avec l'autre, avec la différence de culture, avec les blessures intimes que chacun peut porter en soi. La nature est une grandiose présence, monumentale et impartiale : que l'homme peut être minuscule à côté d'elle !


Traduit de l'anglais (USA) par Paul Gruyer et Louis Postif.


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mardi 20 décembre 2022

Jack et la grande aventure du Cochon de Noël

 


La magie de Noël vue par J.K Rowling, autrice des aventures d'Harry Potter, avait fait la joie des lecteurs, petits et grands, l'an dernier au moment de sa sortie en France.

Comme souvent, j'ai laissé passer la déferlante avant de me plonger, aussi, dans ce conte de fée.


Jack est un petit garçon timide, aimant le calme et la sérénité. Il a un ami très cher : LC autrement dit Lo Cochon, une peluche avec laquelle il a grandi. LC sait tout de Jack et inversement. Ils se comprennent sans avoir besoin de mots et puis... LC possède l'odeur rassurante qui n'appartient qu'à lui « ...un mélange de tous les endroits où LC avaient vécu ses aventures, et de la caverne tiède et sombre qui se formait sous les couvertures de Jack, sans oublier le soupçon de parfum de maman qui ne manquait jamais d'embrasser LC, lui aussi, et de le serrer dans ses bras lorsqu'elle venait dire bonsoir à Jack. » (p 13-14)

LC est d'autant plus cher à Jack quand les parents de ce dernier se séparent, que le nouvel ami de sa mère se révèle être le père de Holly, sa partenaire de lecture en CP, et qu'Holly, en pleine crise d'adolescence devient insupportable, irritable au point de commettre un geste épouvantable : jeter par la fenêtre de la voiture, alors qu'il neige sur la route, le pauvre LC tant sa rage est immense. C'est un peu comme si elle martyrisait Jack en s'en prenant au pauvre LC.

C'est le drame en cette veille de Noël. LC est perdu, Jack est tant dévasté qu'il refuse le « remplaçant » de LC, un Cochon de Noël, tout rose, tout dodu, et tente de lui arracher la tête. Jack pique une crise de rage aiguë dans sa chambre qu'il met sans dessus-dessous, balançant tous ses jouets aux quatre coins de la pièce. Epuisé, il s'endort tout en se promettant de partir, une fois reposé, à la recherche de LC.

La veille de Noël est le temps de tous les possibles.

Jack est réveillé par des voix et se rend compte que les jouets sont doués de parole... parce qu'ils sont avivés par les sentiments des humains envers eux. Le Cochon de Noël, propose à Jack de profiter de la magie unique de cette nuit particulière pour partir à la recherche de LC au pays des Choses perdues. Ce ne sera pas sans danger car règne sur ce pays l'épouvantable Grand Perdeur, dévoreur d'objets.

Commence alors l'extraordinaire aventure de Jack et du Cochon de Noël.


Tous les codes du conte de fée sont dans ce roman délicieux à lire : la magie, bien sûr, la quête, les embûches, les rencontres bénéfiques et maléfiques, les dangers à surmonter, le courage qui ne doit pas faiblir, la volonté et l'amour porté à l'objet perdu.

J'ai eu plusieurs fois la larme à l'oeil au cours de ma lecture, certainement parce que l'enfant en moi est toujours à l'écoute des contes. J'ai aussi perdu mon « doudou » aimé, Margotte du Manège enchanté, et je me suis plu à penser qu'elle devait passer des jours heureux sur l'île des Bien-Aimés.

Les rencontres faites par nos deux héros sont cocasses et parfois bouleversantes, chacune apporte sa part de lumière au récit, avec les objets, j'ai eu des frissons de peur dans la Rocaille des Indéplorés, j'ai ri en écoutant la Boussole fulminer contre les Mauvaises Habitudes, j'ai encouragé Jack et CN et été bluffée par la présence du Père Noël. Quant à l'ultime rencontre entre Jack et LC autant vous dire que ma gorge était serrée. Ridicule pour une adulte ? Non, car cela prouve que mon âme d'enfant et ma soif de Merveilleux sont toujours présentes.

Tous les ingrédients sont présents pour concocter un très joli conte de Noël. Sans compter que les illustrations de Jim Field sont très expressives et apportent une dynamique au récit.

Traduit de l'anglais par Jean-François Ménard.


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