Je ne lis pas souvent de pièces de théâtre car je préfère
être spectatrice. Mais, me répondrez-vous, lire une pièce de théâtre est aussi
en être spectatrice. Vous avez parfaitement raison, vous répondrai-je alors.
Juin 2021 est un mois anniversaire pour « Le Mois
Anglais » qui fête ses dix années d'existence, les organisatrices ont
élaboré un programme permettant un voyage dans le temps au gré des lectures.
Le voyage temporel commence avant 1837 et pour illustrer la
littérature anglaise d'avant cette date, j'ai choisi d'alléger ma PAL en
sortant de ma bibliothèque « Comme il vous plaira » de Shakespeare.
La pièce est une tragi-comédie romantique dotée d'éléments de
comédie pastorale.
En ces temps de pandémie, la légèreté en lecture est toujours
bienvenue.
A la disparition de Sir Roland de Boys, leur père, Olivier
est chargé de l'éducation de son jeune frère Orlando. Olivier déteste Orlando
et fait en sorte que ce dernier ne soit pas mieux traité qu'un paysan ou
serviteur.
Sir Olivier pense avoir, enfin !, l'occasion de se
débarrasser de son encombrant frère, lorsque Orlando décide de défier Charles
un lutteur expérimenté. Las, pour Olivier qui ne sera pas un nouveau Caïn,
Orlando triomphe et tombe amoureux de la belle Rosalinde, nièce du Duc
Frédéric, usurpateur des biens de son père.
La foudre de la haine tombe sur eux, pour des raisons
différentes, ne leur laissant que la fuite en forêt d'Ardenne, où s'est réfugié
le Duc déchu.
Alors que Rosalinde, déguisée en garçon, fuit en compagnie de
sa cousine Coelia, fille de l'usurpateur, et de Touchstone, le bouffon
ducal – jusque-là tout le monde
suit ? - Orlando prend la poudre d'escampette en compagnie d'Adam, un
vieux et fidèle serviteur.
Bien entendu tout ce petit monde se croisera et recroisera,
qui sous un masque qui sans fard. De ce ballet joyeux, l'amour vaincra.
Rosalinde, la belle et piquante Rosalinde, aime mener son
monde : c'est elle qui décide des déguisements pour la fuite, c'est elle qui
orchestre les amours des autres, sous les traits de Ganymède, jeune
propriétaire d'une bergerie. « Aimez qui vous adore ! »
clame-t-elle Phébé, bergère qui repousse
les avances de son soupirant Sylvius. Car c'est ce qui devrait être en
amour : aimer celui ou celle qui nous aime et non s'entêter à aimer celle
ou celui qui ne nous aime pas. Si tout était aussi simple, y aurait-il matière
à écrire roman ou pièce de théâtre ? Y aurait-il matière au
tragique ?Sans doute pas.
« Comme il vous plaira » ouvre une fenêtre sur un
monde dans lequel le tragique ne serait plus. Dans une farandole de d'actions
espiègles et de confusions sur les corps – Shakespeare s'appuie sur le
travestissement femme/homme pour que Rosalinde s'assure de la véracité de
l'amour qu'Orlando éprouve pour elle, et pour que Phébé comprenne que le
véritable amour se trouve sous ses yeux et non dans un miroir aux alouettes –
le dénouement apporte la joies dans les cœurs... tous les cœurs.
Les méchants deviennent gentils, les mesquineries sont
oubliées, les torts réparés, les ronchons retournent dans leur grotte de leur
plein gré ronchonner sur le monde et ses joies factices à leurs yeux.
La tragédie du frère jaloux de son benjamin plus aimé que
lui, qui ouvre le bal laisse place à la liesse des libertés retrouvées.
Entre les deux extrêmes, on chante, on tient banquet, on
rime, on philosophe ou on médite dans un monde magique. Magique, oui !
Magique car qui a déjà croisé une lionne affamée dans la forêt d'Ardenne
permettant ainsi à Orlando de sauver son frère Olivier et de retrouver
l'équilibre familial ? La forêt devient enchanteresse et lieu de tous les
possibles et de la perfection. Au nom de la perfection dans un monde idéal, les
sexes ne devraient pas être en guerre et ne pas se tromper ou se mentir. Tout
devrait tendre vers l'ordre absolu, ce qui est intangible et devrait être
perpétuel.
Ainsi Rosalinde évoque-t-elle les quatre vitesses du temps.
Ainsi Touchestone évoque-t-il les sept degrés de querelle (j'ai relu plusieurs
fois ce passage tant il est d'une grande intelligence). Ainsi Monsieur Jacques,
le bougon de service, évoque-t-il les sept âges de la vie. Le nombre, les
nombres paradigmes du Paradis ? Disons qu'ils expliquent les étapes
essentielles des sentiments et de la vie.
Le mirth*, c'est la vie !
Il est absolu à la fin de la pièce : les frères ennemis
se réconcilient, les hommes et les femmes fusionnent dans l'amour et l'hymen,
Rosalinde redevient femme et Junon, l'hymen, triomphe !
Deux heures de bonheur absolu en compagnie de la verve shakespearienne.
*la gaieté, l'amusement, l'hilarité
Pièce traduite de l'anglais par Jean Anouilh
Quelques avis:
Babelio Maremurex Actes Sud Les trois coups L'oeil d'Olivier
Lu dans le cadre
5 commentaires:
Oh j'adore shakespeare....j'avais vu cette piece....je me souviens avoir bien aime...mais en lisant ton compte rendu...je ne m'en souviens plus...mdr...a revoir alors...;)
Je suis une inconditionnelle de Shakespeare et j'essaie de ne pas rater la séance théâtre quand une de ses pièces est jouée dans mon coin.
Je n'avais jamais lu "Comme il vous plaira" et j'ai vraiment aimé ces deux heures de lecture hors du temps.
Une pièce de Shakespeare qui semble moins connue que d'autres : je ne connaissais pas du tout (en même temps, je ne suis pas une spécialiste de l'auteur, loin de là ^^). Elle semble différente de ce que j'ai lu jusqu'ici (MacBeth), plus dans le tragique (et on le côté comique est peu voire pas du tout présent !). A découvrir donc !
Oh oui je ne rate pas une de ses pieces...j'adore cet auteur....on a la chance, dans un theatre, il passe du NTL https://www.ntlive.com/
avec sous titrage espagnol....il y a beaucoup de shakespeare...
J'avais aimé la version film de "Comme il vous plaira" et j'aime lire des pièces mais je n'ai pas lu celle-ci. ;)
Enregistrer un commentaire