samedi 25 juin 2022

La saga des Cazalet: Etés anglais


 

Depuis le temps que le premier tome de la saga des Cazalet dormait dans ma PAL Kobo, il aura fallu le programme du Mois anglais, l'officiel, 2022 pour que je me décide à l'ouvrir.

1937, les rumeurs d'une prochaine guerre vont bon train à Londres dans les milieux d'affaires et politiques. Un seul espoir demeure : la visite de Neville Chamberlain en Allemagne nazie.

La famille Cazalet prépare les vacances d'été, ses membres se retrouveront à Home Place, la propriété familiale, autour de la Duche, la matriarche, et le Brig, le patriarche. Trois générations se retrouvent sous un même toit, avec toutes les différences de tempérament, d'âge et de visions du monde.

« Etés anglais » est l'ouverture de cette saga familiale et est, donc, un tome de présentation des membres de la famille et d'exposition de la situation géopolitique et sociale des années 1937-1938 dans une Angleterre encore meurtrie par l'horreur de la Grande Guerre. Cependant, en cet été 1937, malgré les rumeurs inquiétantes, on fait connaissance avec les Cazalet avec bonheur. J'ai eu l'impression de retrouver une autre saga, française, « Les Thibault ».

J'ai suivi les Cazalet pendant les deux étés du roman : les trois frères, Hugh (revenu mutilé de la Grande Guerre), Edward, Rupert, et leurs différences, les trois épouses, Sybil, Viola et Zoë la seconde épouse de Rupert, une jeune femme aux abords égocentriques, égoïstes, préoccupée par son apparence, les fêtes et l'attention masculine ; elle apparaît frivole, inconséquente et immature...une véritable pénible. La tribu enfantine, entre les deux aînés, Simon et Teddy, partis de la maison pour suivre leur cursus au collège, les petits derniers, Lydia et Neville, qui sont à la traîne pour tout parce que trop jeunes pour entrer dans le cercle des grands et trop vieux, à leurs yeux, pour être soumis aux astreintes des « bébés » comme l'heure de la sieste. Puis, il y a les filles adolescentes ou en passe de l'être, Polly (et son chat Pompée), Louise et Clary, l'âge des questionnements, des envies de liberté et des premiers émois. Enfin, il y a Rachel, la sœur Cazalet, célibataire dévouée à ses parents.

Elizabeth Jane Howard dresse le portrait de tout ce petit monde, sans édulcorer la réalité de l'époque tout en éprouvant de l'empathie pour eux.

Les portraits de femmes forment une jolie galerie de caractères. Sybil est une femme qui tente de voir la vie du bon côté, elle aime sa vie d'épouse et de mère, elle est proche de son mari, leur relation est empreinte de tendresse et de complicité. Viola, ancienne ballerine, semble plus réservée, plus froide. La vie conjugale est loin d'être passionnelle, les choses de l'intimité entre époux ne sont pas sa tasse de thé, elle se soumet au devoir conjugal sans entrain. Cependant, elle est loin d'être revêche, c'est une femme de tête qui sait ce qu'elle veut et ne veut pas. Quand Louise devient une jeune fille attirante, elle ne voit pas d'un bon œil Edward lui offrir des tenues trop femme ou la sortir au restaurant. Comme si elle pressentait un geste, une attitude déplacés d'Edward envers sa fille.

Puis, il y a Zoë, seconde épouse et belle-mère de deux jeunes enfants, rôle auquel son métier d'actrice de théâtre ne l'a pas du tout préparée. Elle craint Clary et Neville, elle n'ose entamer une relation de confiance avec Clary qui lui reproche, sans cesse et en silence, d'avoir pris la place de sa mère. Zoë est à mille lieues de comprendre les enfants car elle apparaît, au début du roman, comme étant, elle-même, encore une enfant.

Quant à Rachel, elle est l'archétype de la jeune femme de bonne famille altruiste et empathique dans l'âme. Elle a ses idées, sa vision du monde tout en se laissant régenter par ses parents au grand désespoir de son amie Sid. Entre elles est née une amitié trouble faite d'admiration, d'amitié profonde, de respect et d'attirance tue, elles s'aiment sans se l'avouer vraiment.


Les portraits défilent au gré des repas en famille, des parties de tennis sur le gazon de Home Place, des sorties à la plage, des thés et de l'attente du résultat de la visite de Chamberlain en Allemagne nazie. Sous le soleil estival, les jeux de plage, les parties de campagne, se tapit une sourde inquiétude. Une inquiétude insidieuse s'empare de chacun. Qui ne veut pas voir l'été s'achever pour ne pas entrer au collège, qui ne veut pas suivre uniquement une éducation destinée aux jeunes filles de la bonne société, qui redoute de mener une grossesse non désirée ou subie, qui ne veut pas être pris au dépourvu en cas de conflit... la prévoyance et l'anticipation étant mères de la réussite financière, qui craint de voir partir au loin les fils et les frères se faire massacrer. La varicelle remet un peu d'ordre dans les projections des peurs et des craintes.


« Etés anglais », premier opus de la saga, aborde aussi de nombreux thèmes tels que l'homosexualité, l'adultère et ses conséquences, le viol et la honte qui s'en suit, l'inceste, la violence au sein des établissements scolaires secondaires pour garçons, les traumatismes dus à la guerre des tranchées ou la pauvreté. On sait que l'équilibre fragile sera rompu par l'annonce en 1939 de l'entrée en guerre de l'Empire britannique. Les cartes de la société seront rebattues, les fissures sont présentes, en apparence anodines.

Ce qui fait toute la saveur de ce premier tome c'est la description, d'entomologiste, des rituels, des repas, des jeux et distractions pratiqués au sein de la famille, le quotidien, les lectures, les préoccupations des personnages sont narrés avec une réelle précision historique, celle d'une Angleterre insulaire s'il en est, en cette veille de second conflit mondial. Entre insouciance et inquiétude, l'annonce des accords de Munich abolit un monde que tout un chacun pensait immuable.

Traduit de l'anglais par Anouk Neuhoff

Quelques avis :

Babelio  En attendant Nadeau Lecteurs Le Parisien Le Monde Télérama

Lu dans le cadre

 
 



2 commentaires:

rachel a dit…

Ouah il semble bien complet ce roman....bien detaille...esperons que cela continue avec les tomes...

eimelle a dit…

j'ai bien envie de découvrir cette série aussi!