mardi 24 août 2010

Que font les grands hommes une fois partis?

Telle est la question que l'on se pose lorsqu'un homme politique, de talent, d'envergure, à l'aura indéniable, quitte la scène du pouvoir à l'issue d'un scrutin électoral.
Eté 1956, la traversée du désert du Général de Gaulle laisse à ce dernier beaucoup de loisirs: fatigué de la versatilité des Français, il part se ressourcer sur une plage bretonne. C'est flanqué de sa fidèle ordonnance Lebornec, d'Yvonne (dite "Tante Yvonne"), de son fiston Philippe et de son chien Wehrmacht, rejeton d'un chien d'Hitler, que Charles de Gaulle savoure l'air vivifiant et iodé de la côte bretonne...incognito, même si un baigneur le prend pour Jacques Tati. Le lecteur, réjoui, découvre un de Gaulle en short kaki et en tongs (prises sur l'ennemi, clin d'oeil à la guerre d'Indochine, prélude à une décolonisation dans la douleur), s'installant sous le parasol en compagnie d'Yvonne, qui tricote inlassablement en écoutant d'une oreille distraite les "Mémoires" dictées par son général d'époux, et de Philippe, croqué sous les traits d'un jeune garçon en plein émoi adolescent, attiré par les filles et ne sachant comment solliciter son général de père pour appliquer une technique d'approche.
Les journées à la plage, se scandent au rythme de la dictée de ses Mémoires, de ses méditations déambulatoires et de ses bains de mer....il ne manque plus que l'ambiance à la Rohmer pour que le décor soit idéal. Le burlesque est au détour de chaque planche: entre la confusion des mouettes et des coiffes bretonnes, les allusions à la grande taille du général, qui a toujours pied, les "crises" de Wehrmacht, défendant contre les communistes imaginaires ses croquettes, les gaffes du général (la scène de la cabine de bain en éponge qui transforme le général en évêque est à mourir de rire), ses emportements lyriques lorsqu'il dicte ses Mémoires et sa rencontre avec Churchill (c'est toujours comme ça les vacances: on tombe sur des connaissances au moment où on s'y attend le moins!), le lecteur passe de joyeux moments à rire (à la limite de la jubilation) de la vision gentiment ironique du Grand Homme que dessine Jean-Yves Ferri. Cependant, le Général est toujours grand seigneur: il n'hésite pas à réitérer l'appel du 18 juin au micro des surveillants de baignade pour récupérer un ballon perdu....ni à compter fleurette à une jeune femme éperdue d'admiration. Le tout avec un humour ravageur qui donne une autre dimension, celle du comique qui s'ignore, au personnage incroyable que fut le général de Gaulle.
"De Gaulle à la plage" est une lecture hilarante, à lire au gré des planches (une lecture d'affilé nuit à la saveur de l'humour décalé de l'auteur), d'un pan de vie d'un homme politique devenu mythique.




L'avis de Planète BD   Evene   Philippe Poisson   Krinein 

NB: j'ai lu cette BD dans l'édition Télérama.

5 commentaires:

brigitte a dit…

Une bonne entrée en matière pour les collègues de lettres de terminale ... enfin pour ceux qui ne sont pas engagés dans la résistance contre ces nouveaux programmes !

liliba a dit…

Déjà vu des billets sur ce livre, il FAUT que je le lise !

Anonyme a dit…

Est-il disponible partout ou seulement sur la boutique Télérama? >Je le veux!

Anonyme a dit…

Au fait, je n'ai pas bien compris moi comment les lycéens vont en venir aux mémoires de De Gaulle. En plus ce sont ses Mémoires de guerre? Drôle de programme au programme.

Katell a dit…

@liliba: oui, c'est une BD qui vaut le détour!
@anonyme: on le trouve dans toute les bonnes librairie (Télérama sort une série de titres BD cet été)