mardi 14 juillet 2020

Rencontre avec Stephen King


Il y a cinq ans j'ai lu mon premier Stephen King « 22/11/63 » , roman de SF où la part du fantastique est omniprésente. Je m'étais régalée de bout en bout.
Cet été, la médiathèque de Guingamp a de nouveau proposé aux adhérents les sacs mystères dont le principe est le suivant « Chaque sac contient un livre, un CD ainsi qu'un DVD ayant un point commun. Un seul indice est donné à l'emprunteur, la surprise de la découverte a lieu une fois arrivé à la maison ! », le seul indice étant l'appellation dudit sac. Celui que j'ai emprunté, il y a quinze jours, avait pour indice « Etranges hôtels ». J'aurais du me méfier : hôtel … étrange … quand j'ai ouvert le sac en question, j'ai sorti le DVD « The grand Budapest Hotel » de Wes Anderson accompagné du CD audio de la BO. Jusque là tout allait bien. Quand je sortis le roman, j'ai cru à une mauvaise plaisanterie, une erreur de casting : « Shining » de Stephen King, roman mis en images par Stanley Kubrik. Je n'ai jamais pu regarder plus de vingt minutes du film tant l'angoisse me tétanisait.
Que faire ? Retourner illico à la médiathèque pour changer le sac ? C'est que le DVD me plaisait bien. Regarder le DVD, écouter le CD et laisser tomber le roman ? C'était une solution.
Sauf que.... je me suis dit qu'après tout je pouvais prendre le risque de lire « Shining » sachant qu'à tout moment le geste simple de fermer le livre mettrait fin à d'éventuels tourments.

Abandonnant le cycle de « Dune » pour « Shining », j'ai quitté l'aride Arrakis afin de me rendre dans le Colorado pour y passer un hiver pas comme les autres.
Autant vous dire que je n'étais pas très fière en m'attaquant au premier chapitre car en compulsant divers articles « Shining, l'enfant lumière est un roman d'horreur écrit par Stephen King et publié en 1977. Cet ouvrage, le troisième qu’il publie, l’établit comme une figure importante du genre fantastique. » (source Wikipedia) ce qui ne me disait rien de bon : horreur pour moi c'est éprouver une peur sans nom, une terreur éprouvante pour les nerfs.

J'ai donc pris mon courage à deux mains et entrepris de suivre le parcours de Jack Torrance, sa femme Wendy et son fils, « l'enfant lumière » Danny dont le don de médium provoquera la convoitise de ce qui se terre dans la mémoire de l'hôtel Overlook au cœur du Colorado.
D'emblée, King, instaure une ambiance particulière à laquelle le lecteur ne peut échapper : la mise en place des personnages, de leurs caractères, de ce qu'ils sont, est tellement bien réalisée qu'on ne lâche pas le récit car on veut savoir ce qui se passe après.
L'Overlook Hotel devient un lieu d'isolement dans lequel est confinée une famille dont les parents sont au bord du divorce en raison de l'alcoolisme du père.
L'immense bâtisse au passé sulfureux de règlements de comptes mafieux, de crimes passionnels, devient un personnage à part entière dès que …. « winter is coming ».
L'auteur place son lecteur face à ses angoisses les plus profondes : comment réagirions-nous si nous étions bloqués un hiver entier dans un hôtel vide, craquant sous le souffle effrayant des tempêtes hivernales ?
Les personnages sont placés dans des situations extrêmement angoissantes, terrifiantes parfois, mais est-ce la présence de forces maléfiques ou l'expression de leur propre délire  d'alcoolique repenti, mais pas tant que cela, pour le père, l'angoisse permanente de la possible violence paternelle pour la mère ou la peur viscérale de perdre ses parents pour le garçonnet hyper sensible ? Le monstre est-il tapi dans le passé d'une bâtisse ou en soi ce qui le rend d'autant plus horrible ?

J'ai sursauté à chaque grincement de porte, à chaque bruit étrange ressemblant à des voix. J'ai regardé avec circonspection l'extincteur d'incendie lorsque Jack ou Danny avaient l'impression qu'il avait bougé. J'ai frémi quand je les ai suivis dans le parc des animaux de buis, j'ai frissonné quand Jack est resté près de la chaudière et s'est pris d'intérêt pour les vieux papiers oubliés. La peur, l'angoisse, le mal-être, le picotement désagréable sur la nuque, tout cela je l'ai ressenti sans pour autant être terrorisée au point d'arrêter brutalement ma lecture.
Bien au contraire, j'ai apprécié l'installation du décor, la construction de l'ambiance fantastique par la seule force d'évocation du langage écrit, simple, juste et épouvantablement efficace.
Stephen King a l'art de mettre son lecteur face à ses peurs intimes, ses angoisses avec des situations du quotidien. Le lecteur est confronté à lui-même et à ce qu'il ressent dans l'ombre des méandres de l'intime. King maîtrise ce qu'il peut avoir de fantastique au sein du réel anodin et il l'exprime avec brio dans ce roman haletant.

Une deuxième rencontre réussie qui en provoquera d'autres à plus ou moins longue échéance.
Merci le sac mystère « Etranges hôtels » pour avoir permis à la lectrice que je suis de franchir un pas important dans la découverte d'un auteur important de la littérature contemporaine.



2 commentaires:

rachel a dit…

Oui bin vraiment pas pour moi...j'ai essaye le film...j'ai arrete...;)

Katell a dit…

Rachel, moi aussi j'ai essayé plusieurs de regarder le film et comme je le dis en introduction de mon billet je n'ai jamais pu aller au-delà du quart d'heure.
Par contre, le roman est largement moins anxiogène que le film. D'ailleurs Stephen King avait été en colère après Kubrik et je le comprends.
Franchement "Shining" ne fait pas plus peur que les romans policiers de Patricia Cornwell ("Mordok" notamment)