Je ne savais pas qu'Alberto Moravia avait écrit des nouvelles pour la littérature jeunesse. C'est pourquoi, intriguée, j'ai emprunté ce recueil de huit nouvelles.
Qu'en dire ?
Le recueil est recommandé pour les jeunes lecteurs à partir de dix ans ; les histoires sont faciles à comprendre et amusantes.
Le parti pris de Moravia rappelle celui des fables de la Fontaine : les animaux sont doués de paroles et de pensées afin de mettre en scène les comportements et les désirs humains. Il n'y a pas forcément de morale explicite à la fin de chaque nouvelle, cependant le texte apporte quelques clefs au lecteur comme ne pas être ancrés dans ses certitudes comme le Pin Gouin professeur de géographie soutenant, mordicus, que la glace ne peut pas fondre car elle est aussi solide que la pierre. La force des lois de la nature lui démontreront que voyager, même contre son gré, est source de confrontation avec l'altérité et la nouveauté.
Moravia met en scène les interrogations enfantines, avec la Gi Rafe qui ignore qu'elle est girafe parce que devenue orpheline trop tôt : pour se construire, on a besoin du miroir que sont nos parents, on a besoin de leurs enseignements, de leur expérience pour grandir et savoir qui on est. Grandit-on seul ? On aimerait bien parfois or c'est entouré de sa famille, de ses amis que l'on acquiert expérience et maturité.
Par petites touches, Alberto Moravia, par le biais de l'humour, apporte quelques réponses aux nombreuses interrogations des adultes en devenir. Ohhhh, ce délectable espace-temps dans lequel les jeunes lecteurs peuvent se reconnaître : tout ce qui est plus vieux qu'eux date d'au moins un milliard d'années, le temps ne passe pas aussi vite qu'ils le souhaiteraient, surtout lors des activités obligatoires. L'époque des parents c'est de la préhistoire quant à celui des grands-parents il remonte, au moins, à l'époque des dinosaures.
Ahhhh, l'histoire du pauvre morse qui s'interdisait de penser car au Pôle Nord, il fait tellement froid que les pensées gèlent et ne restent dans l'air … donc tout le monde peut savoir que chacun pense ce qui est loin d'être une vie tranquille.
La dernière nouvelle est un peu plus triste que les autres, du moins l'ai-je perçue ainsi. Cha Calot est amoureux de la belle Gi Raffine, un tantinet bêcheuse, et aimerait l'épouser. Or l'odeur de Cha Calot est difficilement supportable pour Gi Raffine qui préfère celle des plantes à celle des charognes. C'est l'éternelle histoire d'amour impossible du ver de terre amoureux d'une étoile. C'est aussi une manière de montrer qu'il est important d'aller au-delà des différences pour réaliser quelque chose. Cha Calot épousera une jeune fille de sa condition, une demoiselle Hyè Ne, mais aura toujours le cœur serré lorsqu'il croisera son premier amour, son étoile jamais atteinte.
Un recueil agréable à lire et intéressant car Moravia soulève nombre de questions que se posent les jeunes enfants. Le texte est judicieusement servi par les illustrations d'Anaïs Vaugelade.
Traduit de l'italien par Diane Ménard et illustré par Anaïs Vaugelade
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4 commentaires:
je ne connaissais pas non plus, belle découverte !
Merci Eimelle. La surprise a été excellente car j'avais lu Moravia il y a près de 30 ans, "Le Mépris" "Le conformiste".
Oh oui cela semble etre toute une bien belle decouverte...de chouettes nouvelles
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