mercredi 22 juillet 2020

La soif, le pouvoir et la connaissance


La sortie prochaine du film « Dune » a motivé mes vacances littéraires sur Arrakis. J'étais restée sur le film de David Lynch ainsi que sur le premier tome du cycle imaginé par Frank Herbert. Il était temps de reprendre la saga depuis le début aussi l'été est-elle la saison propice aux longues lectures.

J'ai lu les trois premiers tomes, « Dune », « Le messie de Dune » et « Les enfants de Dune », une plongée dans un monde où intrigues, jeux de pouvoir, violence, philosophie, prophétie et prescience rythment la vie sur Arrakis et l'Impérium, issu du jihad butlerien, mouvement qui détruisit les ordinateurs afin que l'humanité reprenne le pouvoir de penser, de retenir, de réfléchir.
Nous sommes dans un monde où les humains ont quitté la planète mère depuis si longtemps qu'ils l'ont oubliée. Le monde, ou plus exactement les mondes sont sous la domination de l'Empire et la dépendance à l'Epice, denrée rare que l'on ne trouve que sur une seule planète : Arrakis. Celui qui saura en prendre le monopole deviendra le maître des mondes de l'Imperium.

« Dune », premier tome de ce space opéra, est le roman où les personnages principaux et leurs motivations sont installés par l'auteur et prennent corps sous les yeux du lecteur.
Les Harkonnens, les Atréides, l'ordre du Bene Gesserit, les Mentats, les Fremens, la CHOM et sa Guide des navigateurs, l'Empereur, l'ordre de Bene Tleilax qui maîtrise la génétique, les Ixiens, concepteurs et fabricants de machines de haute techonologie, les Maisons majeures et les Maisons mineures orchestrent une course au pouvoir des plus retorses et ce au beau milieu du Plan imaginé par les Soeurs Bene Gesserites. Ces dernières manipulent pour unir leurs élèves aux chefs des Maisons. Leur but ? Réussir à donner naissance à celui qui sera le Kwisatz Haderach, celui qui pourra voir le passé et le futur.

Paul, l'unique fils de Leto Atréides, éduqué par sa mère, Jessica, Soeur Bene Gesserite, pourrait être le Kwistz Haderah en raison de ses facultés exceptionnelles. Il devient l'objet de toutes les convoitises. C'est sans compter la rivalité entre Harkonnens et Atréides qui provoquera la mort du Duc Leto et la fuite de sa concubine, Jessica, et de son fils Paul.
Les tribus Fremens les recueilleront et les accepteront comme leurs après le rite de l'Epice. Jessica, enceinte de sa fille Alia, deviendra la Révérende Mère des Fremens. Paul accroît ses perceptions et ses capacités jusqu'à la prescience et deviendra le chef de la rébellion. Il comprend également combien est dangereux le rêve de rendre Arrakis verdoyante : c'est le désert et les vers qui produisent l'Epice. Sans elle et sans le Mélange, les humains ne peuvent développer leurs capacités mentales leur permettant de ne plus utiliser la haute technologie. Saura-t-il le faire comprendre et accepter à ceux qui rêvent de ne plus subir la dure existence dans le désert ?
Saura-t-il endiguer les effets du rite de l'Epice sur sa sœur qui le subit in-utero ? C'est l'enjeu du deuxième tome.

« Le messie de Dune » est l'opus qui montre combien le pouvoir peut être dangereux même pour les hommes de bien souhaitant améliorer le sort de leurs semblables.
La bataille d'Arakeen a vu les cohortes Fremens remporter une incroyable victoire que les forces impériales. Paul est reconnu Duc d'Arrakis, sa puissance politique et religieuse rayonne dans tout l'Imperium au point de supplanter l'Empereur Padishah Shaddam IV, de la Maison Corrino.
Une croisade furieuse et violente met à feu et à sang l'Empire, Paul constate le danger de devenir une déité sans qu'il puisse faire quoi que ce soit. Alia, sa sœur devient de plus en plus étrange au point de sembler être l'Abomination : saura-t-elle se sortir du joug des millions d'existences en elle, la pré-née ? Saura-t-elle faire les bons choix ? Et Paul, le « Madhi », trouvera-t-il sa voie ?

Frank Herbert joue avec délectation sur la gamme universelle des luttes de pouvoir, des ambitions, de la veulerie, du courage, de la fidélité, des compromissions qui font la grandeur et la petitesse de la nature humaine. Quand Paul constate qu'il est parvenu au bout de ce qu'il peut supporter, quand le poids de ses visions fait qu'il ne sait plus quelle voie choisir pour atteindre un futur acceptable pour tous, une seule issue s'offre à lui : la fuite du « Madhi » dans le désert pour s'y fondre et disparaître à jamais.
Peut-on maîtriser le Temps ? Connaître le futur est-il une voie pour façonner le présent, le maintenant ? Guider les peuples peut-il se faire sans perdre une partie de soi ? Qu'est-ce que guider les peuples ? Vouloir leur bien, leur bien-être ? Gommer les différences et abattre les murs ?
Quand Paul « Madhi » choisit de se perdre, devenu aveugle, dans le désert pour qu'un ver géant se repaisse de son eau et de sa chair, il laisse en héritage à ses jumeaux et à sa sœur un bien lourd fardeau. Les premiers parviendront à apprivoiser et dompter leurs pouvoirs de pré-nés tandis que la seconde sombrera dans l'obscurité des siens.

« Les enfants de Dune » est l'opus du rééquilibrage des forces.
L'Epice est devenue rare car la végétalisation de Dune provoque un déséquilibre écologique : l'humidité trop importante provoque la mort des vers et fissure leur symbiose avec les truites de sable. Certains expérimentent l'élévage des vers à des fins peu scrupuleuses. Or il n'y a que sur Arrakis que l'Epice peut être produite car tant qu'il reste du vrai désert la symbiose ver/truite des sables peut permettre l'existence de l'Epice.
Alia, devenue Régente, se perd dans les intrigues et l'absolutisme de son pouvoir. Peu à peu, la réalité la fuit et elle se laisse submerger par une de ses vies intérieures... et par n'importe laquelle : l'affreux et odieux Baron Vladimir Harkonnen. Ce dernier prend possession du libre-arbitre d'Alia et l'amène jusqu'à la folie destructrice.
Et les jumeaux dans tout cela ? Et « Madhi » ? Paul a-t-il réellement disparu ? Cet étrange Prêcheur pourrait-il être un avatar de Madhi/Paul ?
Les jumeaux ont grandi, leur âme vieille de millions d'années et de vies, a du mal à coïncider avec leur corps de jeunes adolescents. Leurs capacités prennent de l'ampleur au point d'inquiéter leur tante Alia. La raison d'Etat ne dicterait-elle pas leur disparition ? En effet, « on » tente de les annihiler sauf qu'ils mettent en échec le commanditaire : le jeune Leto est porté disparu, du moins le fait-on croire, tandis que sa sœur Ghanima le pleure grâce au pouvoir d'auto-suggestion qui saura la faire sortir gagnante d'une confrontation avec un Diseur de Vérité.
Les trahisons, les complots vont bon train tant à Arakeen, la capitale, qu'au fin fond des sietchs, villages troglodytes des Fremens.
Dame Jessica revient sur Arrakis pour mieux en partir, fausse captive, pour éduquer l'héritier de la Maison Corrino, le jeune Farad'n, dans l'art Bene Gesserit.
Leto affronte des innombrables vies dans un combat mortel dont il triomphera. Il accède alors à l'infini, à la compréhension de la complexité des fils du Temps. Il franchit un cap supérieur à celui franchi par son père.
Leto comprend l'équilibre écologique d'Arrakis, il sait ce qui créé l'Epice, il sait que le rêve de verdure et d'eau tombant du ciel ne peut être viable et qu'il doit être détruit.

Le lecteur se régale avec la pérégrinations, joyeuses, mystiques et tragiques des personnages. Les situations font frémir, espérer, pleurer ou sourire, elles rythment les pages, scandent le tempo du récit.
L'absolutisme du pouvoir politique ou religieux est voué à être combattu et abattu depuis que le monde est monde. Le cycle de « Dune » est une manière extraordinaire d'en explorer toutes les facettes grâce à un personnage à part entière qu'est la planète Arrakis.
« Dune » est protéiforme et pourrait être considéré comme le premier space opera. Toujours est-il que ce cycle est un incontournable pour le lecteur de SF et un plaisir de lecture sans cesse renouvelé.
Le cycle de « Dune », on peut le dire, est une saga culte ! Une pierre sur laquelle se sont appuyés bons nombres de romans. D'ailleurs, « Game of Thrones » a du se nourrir abondamment, et intelligemment, de « Dune ».

Pour en savoir plus c'est ici Wikipédia




2 commentaires:

rachel a dit…

Tu en parles si bien...vraiment Dune est un des space operas les plus reussis....une merveille...et lala tu arrives a mon prefere: l'empereur-Dieu...j'adore tellement Leto le fils....oui

Katell a dit…

Merci Rachel pour ton soutien. J'aime beaucoup le personnage de Leto, le fils. Il est plus rayonnant que son père Paul.