Dès les premières lignes du roman le décor est planté : maison ancienne au milieu de nulle part, loin de tout, des collines verdoyantes et un homme qui se prépare à partir en voyage aux Etats-Unis, son pays natal. Une silhouette au loin qui se rapproche et provoque la sortie d'une femme énergique armée d'un pistolet. Elle tire en l'air au grand dam de l'homme sur la marche d'escalier.
Daniel Sullivan doit se rendre à l'anniversaire de son père qu'il n'a pas vu depuis des années. Lorsque la petite famille quitte son domicile pour accompagner Daniel à l'aéroport, ce dernier entend, à la radio, le nom d'une femme dont il n'a plus de nouvelles depuis plus de vingt ans. Elle fut son premier véritable amour, sa première douleur et sa première honte.
Se joue une partition polyphonique : celle des souvenirs des principaux personnages du roman et leurs destins croisés.
Comment Daniel pourra-t-il expliquer à son épouse Claudette,
ancienne star de cinéma qui organisa, de main de maître, sa disparition du
monde ? Epouse fantasque, intransigeante et exigeante, Claudette a une
emprise particulière sur le monde et les siens tout en étant assujettie aux
opinions de sa mère, la très française et parisienne Pascaline.
« Assez de bleu dans le ciel » s'articule autour
des moments clés de la vie de ses personnages. Ainsi peu à peu le lecteur
parvient-il à recoller les pièces d'un puzzle, celui de la vie d'un mariage et
de sa lente dissolution.
Maggie O'Farrell cisèle ses personnages avec tendresse et
humour : ils sont tour à tour charmants, amusants, graves, émouvants et
agaçants.
Chacun à sa manière vit une fuite en avant lorsque certaines
situations leur échappent. Cette fuite implique, à chaque fois, la séparation,
ou la perte, de ceux qu'ils aiment. C'est ce que nous faisons également dans la
vie, selon les circonstances et notre personnalité. Et c'est pour cette raison
qu'ils nous touchent tant.
Daniel Sullivan, brillant professeur de linguistique, vit une
fuite en avant en cumulant les addictions : sexe, conquêtes, stupéfiants
et alcool. Il perdra les meilleures années de vie avec les enfants de son
premier mariage, dans les méandres boueux d'une procédure de divorce américaine
plus que tortueuse. La conséquence est qu'il baissera les bras et quittera le
pays pour l'Irlande, terre de ses ancêtres.
La fuite en avant est un peu une histoire de famille
puisqu'il découvrira que sa mère en a été victime : elle a étouffé un coup
de foudre dans un mariage mal assorti. Une douleur muette avec pour refuge ses
enfants et ses livres.
Daniel sombrera au tréfond de ses angoisses et de ses
addictions jusqu'au moment où son fils aîné le prendra sous son aile, le temps
qu'il soigne et expulse le trop plein de dégoût de soi lors d'une expédition
touristique jusqu'au désert de sel d'Acatama, dans les Andes chiliennes.
L'auteure nous transporte avec beaucoup de poésie dans ce paysage majestueux où
les sédiments et autres minéraux n'ont pas été altéré depuis que la mer s'est
retirée il y a des temps immémoriaux. Il y assez de bleu tant à Atacama qu'en
Irlande pour tisser le destin d'un homme.
Devant le spectacle extraordinaire du désert de sel, le lecteur se plaît à imaginer que Daniel comprend que le prix à payer pour renaître et reconquérir son épouse est d'aller au bout de sa démarche et de dire que leur réconciliation peut avoir lieu... comme il s'était réconcilié avec les enfants de sa première union. On quitte, ravagé, pour mieux revenir en se souvenant des cachettes d'enfants, ces lieux magiques frontière entre réalité et merveilleux.... se souvenir des belles choses.
« Assez de bleu dans le ciel » est un roman qui m'a
enchantée par la justesse du ton, la justesse des personnages, par l'art de l'auteure
de faire plonger le lecteur dans les réminiscences tant des personnages que les
siennes. La poésie est au détour d'une phrase, d'une description, une plage, un
feu dans le poêle, une tasse de thé, un désordre artistique, le tumulte
enfantin... la vie, tout simplement la vie.
Quelques avis
Romans sur canapé Dans la bulle de Manou Mots pour mots Sens critique Livraddict
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2 commentaires:
Et bin ton mois celte commence bien...cela semble etre tout un bien bon livre
Lu il y a un petit moment , je dois dire que je ne me souvenais pas de tout ! Souvenir d'une bonne lecture .
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