La littérature nordique regorge de romans policiers à faire frémir les plus audacieux, raison pour laquelle j'ai préféré renouer avec Jens Christian Grondhal dont j'avais lu, il y a quelques années, le délicieux « Virginia ».
1977, un jeune étudiant travaille, pour l'été, à la gare centrale de Copenhague et aperçoit une jeune femme étrange, un peu perdue. Après avoir un peu discuté avec elle, il décide de l'héberger quelques jours chez lui. Randi, puisqu'elle s'est ainsi présentée, disparaît rapidement, lui laissant la clef d'une consigne. Il l'ouvre et trouve une enveloppe dans laquelle il y a une forte somme en marks allemands. Il la dépose, anonymement, dans la boîte aux lettres du commissariat le plus proche.
Quinze ans plus tard, le hasard lui fait croiser le chemin de la jeune femme énigmatique. Il la suit et s'aperçoit qu'elle lui avait donné un faux nom, elle s'appelle Sonja, est mariée et vit non loin de chez lui. Sa curiosité est en éveil et il fait en sorte de prendre contact avec elle, elle qui le subjugue encore.
Au fil de leurs rencontres clandestines, Sonja lui raconte son été 1977, en République Fédérale d'Allemagne alors qu'elle est sur le départ de son travail de jeune fille au pair dans une famille aisée de Hambourg, elle décide de prolonger son séjour, profitant du départ en vacances de la famille d'accueil.
Lentement, Sonja, s'effeuille, explique comment le hasard lui a fait croiser la route d'un groupe de terroristes allemands, sa liaison amoureuse avec un des hommes l'entraîne dans une spirale dont elle n'est que spectatrice jusqu'à ce qu'elle aide, une seule fois, en apportant une voiture de secours au groupe.
Chaque aveu amène Sonja à exprimer son sentiment de culpabilité car, sans le savoir et sans le vouloir, elle a participé à un braquage sanglant. Ses mains sont rouges, irrémédiablement rouges.
« Les mains rouges », avec délicatesse et des mots justes, explore les méandres de la culpabilité, du remords, d'une vie rongée en silence jusqu'au jour où le temps de prendre ses responsabilités sonne quand le procès des terroristes s'ouvre en Allemagne quinze ans après les faits.
Le narrateur et Sonja assistent aux premiers jours du procès, les idéalistes d'hier ont vieilli, on a peine à croire qu'ils eurent un parcours jalonné de violence. Sonja prend conscience qu'elle ne pourra plus avancer tant qu'elle n'aura pas divulgué, à la veuve comme aux autorités, son erreur de jeunesse qui la ronge depuis les événements.
Jens Christian Grondhal aborde également un sujet récurrent dans ses romans : la relation ambigüe entre un homme et une femme, un sentiment amoureux à la lisière de l'amour partagé et du sentiment à sens unique. L'étudiant devenu homme n'a jamais oublié sa brève rencontre avec Rani/Sonja, son mystère l'a toujours obsédé comme l'envie de connaître son histoire.
« Les mains rouges » rappelle aussi les années soixante-dix, celles qui furent de plomb en Italie, celles des Brigades rouges, d'Action directe ou encore de Fraction Armée rouge dite Bande à Baader. Epoque d'une jeunesse en révolte contre l'ordre établi du capitalisme n'ayant trouvé que l'action violente pour se faire entendre. Entre romantisme exacerbé et spirale infernale des attentats.
Je me souviens de la fascination éprouvée devant les actes extrêmes de ces organisations terroristes, souvent menées par des jeunes gens éduqués et lettrés. Il y avait comme un air de forêt de Sherwood, une forêt et son Robin des bois qui auraient mal tourné. Les Etats-Unis avaient leur Vietnam, l'Europe ses groupes révolutionnaires armés et prêts à avoir les mains rouges.
Traduit du danois par Alain Gnaedig
Quelques avis :
Lu dans le cadre
2 commentaires:
Oh tout un polar intrigant comme je les aime !....oh je le note.....
Cette lecture m'a beaucoup plu. J'aime le style de cet auteur danois.
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