dimanche 26 janvier 2020

Entre le Nouveau Roman et moi il y a incompatibilité.


D'ordinaire je ne commence pas un commentaire par la copie du résumé. Les circonstances font que je déroge à la règle.
« Un ancien gardien de but se croit licencié de l'entreprise où il travaille et il quitte tout. Son errance finit par se transformer en vraie fuite après qu'il a étranglé une caissière de cinéma. Il va se livrer à de gratuites et dangereuses extravagances, jusqu'au jour où il assiste à un match de football au cours duquel le gardien de but réussit à arrêter un penalty : sa peur va alors être jugulée. Cet itinéraire intérieur, aux fausses allures de roman policier, permet à Peter Handke de démontrer sa maîtrise. »

Par où commencer ?
Dire que le résumé s'emballe un peu trop ? Sans doute.
Dire que le quiproquo se transforme en road movie dans une Allemagne des années cinquante-soixante encore meurtrie par la guerre et l'horreur qui fut révélée ? Certainement.

Bloch, ancien footballeur, devenu monteur dans une entreprise, interprète le regard du contremaître comme l'affirmation de son licenciement. D'emblée une dichotomie se fait jour entre le réel et la compréhension du réel qu'en a Bloch. Cette dichotomie ne fera que s'accentuer au fil du roman construit, certes habilement, comme une intrigue policière, ce qui permettra à l'auteur de jouer à écrire un roman qui n'en est pas un.
Dès la première page, la patte du mouvement littéraire du « Nouveau roman » se sent avant de se dévoiler et ôter toute envie de s'investir au lecteur.
Je me suis forcée à lire jusqu'au bout « L'angoisse du gardien de but au moment du pénalty » par pur masochisme. Je suis retombée dans mon défaut de lectrice qui ne s'autorise pas à fermer un roman qui l'ennuie, pour rester polie.
Bloch est la petite fourmi que le lecteur, captif de sa peur de fermer le livre, suit l'oeil rivé à la loupe, une loupe qui n'encourage pas à l'empathie. De toute façon, aucun des personnages ne fait naître une once de ce sentiment si important dans l'écriture romanesque. Bloch est un élément d'expérience littéraire et non un véritable personnage.
Tout est froid, linéaire et irritant. Irritant, j'insiste, car j'ai longtemps attendu l'étincelle qui apporterait la magie romanesque. Le roman n'est pas une thèse, n'est pas un récit factuel, objectif, neutre ni un rapport clinique sinon il n'y aurait que des essais ou des rapports légistes à lire.
Irritant dis-je ? C'est qu'il y a une émotion à se dégager du roman et des personnages ! Oui mais... non.
Je suis passée complètement à côté de la maîtrise de l'auteur, je ne comprends même pas où elle se situe. Dans la technique d'une narration clinique digne d'un extra-terrestre observant la vie sur terre ? Peut-être. Je savais que le Nouveau Roman était un mouvement littéraire qui ne me parlait pas, j'en ai une nouvelle fois la preuve trente ans après mon passage en fac de lettres.
Avant de vouer aux gémonies Peter Handke et son style littéraire, j'ai replacé le « roman » dans son contexte socio-historique : première édition en 1970... CQFD. Voilà pourquoi je ne ferme pas la porte à l'envie de lire un autre roman de l'auteur pour peu qu'il ne soit pas resté englué dans le naufrage du Nouveau Roman qui aurait pu tuer le roman.
Je veux voyager, vivre mille et une vie en lisant des romans et non me faire suer à lire une expérience sur des fourmis appelées pompeusement personnages au nom de la linguistique.

Vous l'aurez compris, je n'ai pas adhéré à l'histoire ni à la manière de la mettre en scène. Je ne fais pas partie des téméraires qui auront eu la révélation après cette expérience des plus dérangeante et décevante.

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