samedi 6 juin 2020

Généalogie et enquête criminelle.


La journée commence mal pour l'inspecteur Grant Foster qu'on appelle sur une scène de crime dans un cimetière de l'ouest londonien : le cadavre est amputé des deux mains et semble venir de nulle part.
Lors de l'autopsie, Grant Foster repère des marques sur la peau de la victime . Après observation attentive, il s'avère que les marques forment une inscription énigmatique faite de cinq chiffres et d'une lettre majuscule : 1A137. A quoi ou à qui cela renvoie-t-il ? Les suppositions vont bon train de la plus réaliste à la plus farfelue. Et si cela fait référence à un code ? Heather, une des ses adjoints, a son idée et demande à son supérieur s'il sait ce que c'est que la généalogie.
C'est ainsi qu'entre en scène, Nigel Barnes, jeune généalogiste, qui s'occupa d'aider la mère d'Heather dans la construction de son arbre généalogique.
Très vite, Nigel traduit le code : 1A137 renvoie à l'année 1879. Pourquoi cette référence ? Que s'est-il passé à cette époque ?
Les cadavres se succèdent, sans avoir de lien apparent entre eux. La pression s'exerce de plus en plus lourdement sur les enquêteurs d'autant que la presse commence à faire ses choux gras de l'enquête qui piétine suite à l'assassinat d'une jeune femme de la haute société londonienne.
Les recherches effectuées par Nigel Barnes emmènent l'inspecteur Foster et son adjointe Heather dans les bas-fonds du Londres victorien où une affaire de crimes en série avait défrayé la chronique et instauré un procès à l'issue peut-être discutable.

Le roman fait des allers-retours entre passé et présent, interrogeant le premier pour éclairer le second. L'auteur prend son temps pour présenter les personnages principaux, camper leurs caractères, leurs forces et leurs faiblesses : les placards familiaux regorgent de squelettes qu'on souhaite oublier ; Nigel Barnes et Grant Foster en auront leur part.
Dan Waddell se fait pédagogue pour permettre aux non initiés de comprendre les rudiments de la généalogie et de ce qu'elle implique : plus proche d'une enquête précise, lente et fastidieuse dans les méandres du passé que d'un passe-temps « à la con » comme la considérait Foster en début d'enquête.
Il plonge le lecteur dans le labyrinthe des archives consignées sur des kilomètres de rayonnages dans les sous-sols de vastes bâtiments, lieux de mémoire d'un Londres souvent effrayant. Il réussit à provoquer une profonde angoisse au lecteur lorsqu'un employé des archives met un temps infini à remonter des réserves : pénombre, bruits insolites, ombres furtives... de quoi avoir l'estomac noué.
Peu à peu, les deux enquêtes entrecroisées soulèvent un voile posé sur une affaire dont la ressemblance avec celle que les protagonistes vivent est troublante : l'amputation des cadavres renvoie au comportement des acteurs de l'affaire qui eut lieu en 1879. A mesure que les découvertes de Nigel Barnes sortent des archives, le mobile du tueur se devine derrière un suspense fort bien mené.
Le lecteur ne peut qu'être, non pas troublé, intrigué en se confrontant à la question affleurant sa lecture : notre présent présente-t-il des échos de notre passé ? Notre passé n'est-il qu'une ligne infinie sur laquelle se joue les partitions de notre présent et de notre avenir ? Sommes-nous une somme de déterminisme et d'atavisme ?
Or, pour se connaître n'est-il pas essentiel de savoir d'où nous venons ? Ne sommes-nous pas l'addition d'une multitude de chemins de traverses, de cul-de-sac, d'ornières et de sentes agréables sous nos pas ?
Chaque victime, dans le roman, est un point sur la carte, illimitée, de sa destinée loin d'être solitaire : en eux, les voix (et les voies) des ancêtres, proches ou lointains, résonnent dans la mémoire individuelle.
Nous sommes UN et un TOUT, parfois cela nous rattrape, parfois ce sera pour une autre génération... tant que le travail de mémoire collective s'effectuera à l'aune des mémoires individuelles.

« Code 1879 » est le premier opus d'une série d'enquêtes avec le personnage récurrent de Nigel Barnes. L'essai est transformé et il me tarde de lire les suivantes.

L'avis de Les livres de George Sand

Lu dans le cadre



4 commentaires:

Les Livres de George a dit…

Je vois que nous avons toutes les deux étaient très séduites par ce polar !

rachel a dit…

oh cela semble etre toute une bien belle serie...sympa le theme et intrigant

eimelle a dit…

je ne connaissais pas du tout, c'est noté !

Katell a dit…

@Anne claire: je ne peux que te remercier de m'avoir conseillé de le lire.
@rachel: ce premier opus est prometteur pour la suite.
@eimelle: tu ne regretteras pas cette lecture!