vendredi 26 juin 2020

La vie tranquille des cottages anglais?


J'aime l'univers de la BD mais je n'en suis pas une grande lectrice, le « Mois Anglais » a un peu bousculé les lignes de ma zone de confort.
Un premier pas étant fait, restait à réaliser le deuxième ce qui ne fut pas facile : autant je connais des auteurs de BD ou roman graphique américains, français ou belges autant je séchais lamentablement sur les auteurs anglais. J'aurais pu lire un opus des aventures de Blake et Mortimer, or je tenais à lire "anglais".
C'est là que l'on est content d'avoir dans ses relations un prof d'anglais pouvant fournir, au quart de tour, un précieux nom. Ce fut celui de Posy Simmonds, dessinatrice de presse, auteure de BD et illustratrice de livres pour enfants.

« Tamara Drewe » tomba entre mes mains et ce fut une belle rencontre.

Tout est calme à Stonefield où Beth Hardiman a aménagé une retraite studieuse et « cosy » pour écrivains. Elle les choie, elle les dorlote, elle est à l'écoute, elle sait ce qui leur fera plaisir, elle fait tout pour que rien ne vienne troubler leur travail.
La vie est rythmée par les repas pris en commun au cours desquels les échanges sont riches d'enseignement : le mari de Beth, Nichola, auteur de romans policiers adaptés à la télévision, en est souvent la vedette, le point de mire que les écrivains débutants, surtout les femmes, admirent. Je ne sais pas trop pourquoi, d'emblée Nichola m'a agacée et je me suis dit que ce personnage cachait quelque chose.
Glen Larson, universitaire américain en mal d'inspiration vient à Stonefield pour finaliser son roman. Il va sans dire que le vaniteux Nichola, magnifique spécimen de mâle dominant, l'irrite au plus haut point tant il est son anti-thèse : élégant, charmant, brillant alors que Glen, tout en rondeurs, est maladroit et manque de style.
L'harmonie se fissure lorsque Tamara Drewe revient au cottage familial à la mort de sa mère. Qui est donc Tamara ? Une jeune femme dont la chronique hebdomadaire dans un journal people est attendue et lue avec avidité par les lecteurs.
Elle est se sent belle depuis qu'elle a fait refaire son nez et en devient provoquante au point de déstabiliser l'univers réglé de Stonefied : elle veut montrer au monde entier qu'elle est belle, attirante et joue, beaucoup, sur la gamme de la croqueuse d'homme.
La lézarde enfle, se creuse puis ronge la réalité, en apparence lisse, de cette campagne anglaise en proie à la désertification et à la spéculation immobilière.
Le phénomène prend de l'ampleur quand deux adolescentes, désoeuvrées, s'introduisent en catimini dans l'intimité de Tamara. L'une d'elle devient incontrôlable quand le petit ami de Tamara, Ben le célèbre batteur d'un groupe de rock, vient passer quelques jours.
De mensonge en imbroglio, les relations entre les personnages se dégradent jusqu'au point de non retour pour certains. C'est cette dégradation que décrit avec justesse et humour, Posy Simmonds : on suit le sillage de la rancoeur, de la haine, de la jalousie dans le cadre bucolique d'une Angleterre rurale endormie.
Les traits de caractère des personnages sont ciselés par le coup de crayon et le regard scrutateur de l'auteure sur un pan de la société anglaise. Qu'il est délectable de se sentir privilégié grâce au procédé des pensées de quelques personnages réservées au seul lecteur.
Plusieurs points de vue sur la femme sont abordés : Beth, l'épouse aimante, tolérante envers son mari volage, secrétaire attentive et fidèle jusqu'au moment où la goutte d'eau fait déborder le vase. Tamara, la jeune femme de la ville, libérée sexuellement et assumant ses désirs jusqu'à ce que la vacuité de sa vie lui saute au visage, Casey l'adolescente fascinée par le monde des célébrités que les journaux people étalent à perte de page, vivant une vie par procuration, Jody sa meilleure amie, adolescente délurée, plus affranchie que Casey, par qui le dérapage arrivera. Deux facettes d'une adolescence terne, avide de sensations fortes et d'émotions intenses, deux sensibilités différentes et attachantes.
La narration est fluide, les dessins subtils et beaux et c'est ce qui m'a conquis dans ce roman graphique à la fois tendre et brutal où le marivaudage n'a pas toujours un « happy end ».

Lu dans le cadre du





2 commentaires:

rachel a dit…

Et bin toute une bien belle decouverte....sympa

Katell a dit…

Je ne cesse de faire de belles découvertes au cours de ce Mois Anglais.