Une jeune anglaise, Lucy Honeychurch, séjourne à Florence en compagnie de son chaperon et cousine Miss Charlotte Bartlett. Comme toute jeune fille de bonne famille, et de la bonne société, Lucy voyage et visite l'Italie, en l'occurrence Florence, guide Baedeker en main pour être sûre de ne pas s'égarer.
Elles ont réservé une chambre avec vue dans une pension recommandée par les touristes anglais et sont très désappointées quand elles constatent qu'elles n'auront pas vue sur l'Arno.
Un homme et son fils, Mr Emerson et George, cèdent leurs chambres à Lucy et Charlotte. Ces dernières s'aperçoivent, très vite, que les deux hommes sont mis à l'écart par les anglais de la pension : MM Emerson et fils ne sont pas convenables.
L'Angleterre sous règne d'Edouard VII est puritaine, dans la continuité des règnes précédents. Pourtant, le monde change à grands pas en ce début du XXème siècle. Lucy se retrouve confrontée aux préjugés de classe et moraux de la « bonne société » anglaise, même à l'étranger, et découvre, également, combien la vision de l'autre est étriquée et remplie d'a priori défavorable.
L'auteur, E.M. Forster, emmène son lecteur dans un chassé-croisé amoureux entre Lucy et George, attirés l'un par l'autre sans vouloir se l'avouer. La jeune fille n'aspire qu'à prendre son envol, l'audace lui manque encore, pétrie de préjugés qu'elle sait être des oeillères, qu'à rencontrer l'inattendu, l'extraordinaire et le sublime. Le jeune homme a été élevé dans l'athéisme et une liberté de pensée faisant de lui un « bohême » attirant et intriguant.
Lors d'une sortie commune avec les pensionnaires de la pension Bertolini, ils échangent un baiser au milieu des violettes de Fierone, scène extraordinaire et sublime. La conséquence de cette délicieuse folie sera la fuite de Lucy à Rome pour rejoindre la famille de Cecil Vyse.
Peut-on réellement oublier un baiser passionné parmi les violettes de Fierone ?
De retour en Angleterre, Lucy choisira de se fiancer au distant et froide Cecil Vyse pour oublier ses aspirations de jeune femme désirant s'émanciper. Or, l'émotion amoureuse de Florence revient frapper à la porte de Lucy quand elle apprend que les Emerson et fils ont loué un cottage non loin de chez ses parents.
Le voyage initiatique de Lucy s'achèvera-t-il sur une note agréable ? Je n'en dirai pas plus sinon que la chute est surprenante.
« Avec vue sur l'Arno » est une romance, de prime abord gentillette, qui s'avère être une critique, subtile et mordante, de la société anglaise sous le règne d'Edouard VII : à petits coups de dents, le carcan de préjugés de la bonne société est battu en brèche, ses travers mis en lumière, le mépris de Cecil envers les femmes est insupportable, et pas seulement parce que je suis une femme bénéficiaire de tous les combats féministes des années 70/80, tout en étant, hélas, conforme à l'époque. Les prémices du mouvement des Suffragettes sont présents en filigrane, motivant les écarts de Lucy, d'abord avec le guide Baedeker puis avec les convenances.
J'ai apprécié le regard de l'auteur sur ses personnages : il s'en moque gentiment ou pas, selon le caractère de ces derniers, il les fait se remémorer peintures classiques, poèmes ou tragédies shakespeariennes, il les embarque dans des égarements artistiques ou dans des situations cocasses.
J'ai suivi leur pérégrinations avec plaisir, je me suis posée à leurs côtés devant les tableaux de maîtres de la Renaissance italienne, devant l'architecture magnifique florentine ou les paysages d'un printemps méditerranéen inspirant. Une petite voix susurrait, discrètement, celle de Mr Emerson père, que tout ce beau monde, pétri de certitudes, n'aimait pas réellement son prochain donc en était d'autant plus intransigeant avec lui.
Un roman qui peint, avec humour, une Angleterre « moyenâgeuse » dont les indécrottables préjugés deviennent ridicules sous la belle lumière italienne. La Renaissance des idées a toujours un accent italien pour les voyageurs du nord de l'Europe.
Traduit de l'italien par Charles Mauron
Quelques avis:
Babelio Charlotte Sens critique Critiques libres Lectrice à fleur de mots Alexielle Papillon
Lu dans le cadre
3 commentaires:
Et bin cela semble etre un livre interessant...peut-etre a lire pour le mois anglais de l'annee prochaine....
J'adore cette histoire. Le film est une pure merveille.
artdelire.org
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